Black Sabbath - Volume 4

Chronique CD album (42:38)

chronique Black Sabbath - Volume 4

Dès que le diamant est posé sur le sillon, ça commence sur une note pour le moins mélancolique, on a même l'impression que ça sent le fatigué. Puis, un petit rail, et ça repart pour un "Wheels of confusion". Mais, pourquoi ces premiers accords si fatigués donc ? Je ne saurais répondre à ça, mais une chose est certaine, le groupe a voulu nous "parler" à travers cette introduction. Volume 4, ou un nom très modeste pour ce grand groupe, et pour cause, il voulaient y mettre le nom Snowblind, mais, forcément, la compagnie de disque n'a pas accepté, c'était bien trop provocateur.

 

Cet album sent le faste et l'aise, et savoir que le groupe a migré à Los Angeles pour l'enregistrer me conforte dans ce propos. La musique n'est pas moins mauvaise, loin de là, mais sa composition tient moins d'un accord sincère au sein du groupe que du travail de Iommi et Butler. Les quatre chevelus de Birmingham sont très rapidement devenus des rockstars, et avec cet album débute la digestion de leur succès, et cette digestion passe par la drogue. Beaucoup de drogue. La moitié du budget adjugé à la réalisation de cet album en fait.

 

"Tomorrow dreams" est un tube spécialement dédicacé pour les motards, avec un son qui fait penser à celui d'un moteur de Harley. Mais, en plus de cela, le groupe se permet quelques phrasés plus planants, psychés, s'accordant pourtant si bien avec le reste du morceau. Et c'est vrai que l'on retrouve quelques titres épars comme "Cornucopia" ou "Snowblind" qui font plus penser au passé du Sabbath, celui qui utilisait trois-quatre riff par morceau bien lourds et bien envoyé... Et puis ça suffisait jusque là.

 

Oui mais voilà, arrivé au quatrième album, le groupe acquiert une renommée internationale, et, que cela vienne du producteur ou d'une partie du groupe (Iommi en particulier), il faut évoluer, changer. Et l'ère du temps, c'est le rock progressif, donc il faut développer la musique. Sauf que pour quelqu'un comme Ozzy, ce n'est pas si évident, non pas qu'il soit limité (la suite le prouvera), mais lui se sent plus proche de l'essence de la musique, au risque de paraître simpliste. Le conflit naît, et cet album, peut se voir de ces deux facettes, réparties dans tout l'album. Ozzy forcé de tâter de l'expérimental, et Bill Ward dégoûté d'enregistrer un "Cornucopia" pourtant excellent, c'est assez paradoxal quand on sait que les succès du moment qu'ils essaient maladroitement d'imiter sont les Pink Floyd, King Crimson et les Yes, et qu'ils n'ont tout simplement ni l'envie ni la possibilité de taper dans le même registre. Cependant, le miracle vient tout de même, car même si Black Sabbath tente une expérimentation, ce Volume 4 est loin d'être un raté. Quelques nappes de clavier discrètes et éparses, des bruits de Gong, et ce morceau FX qui s'avère être rien de plus qu'un délire à base de hashich, mouais... On est loin des groupes psychédéliques de l'époque, et finallement, ce qui ressort le mieux à travers cet album, ce sont les riffs, le groove (Butler, toujours, notamment sur "Cornucopia"), et ce heavy rock plombé par un gros son. Ca, c'est ce qu'on attend de Black Sabbath.

 

Alors, vu qu'ils sont parti dans l'expérimental, parfois ça marche super bien, parfois c'est moyen, parfois c'est franchement niaiseux, comme la fin de "Under the sun". Par contre dans "Changes", la voix d'Ozzy est à l'honneur, compensant sa capacité vocale limitée par une foule d'émotions qui vont droit au coeur. Le groupe avait bien réussi à se projeter auparavant dans des morceaux calmes (Comme le "Laguna sunrise" justement), mais celui là tente plutôt une véritable balade, où la voix est en forte présence, et malgré le ton aujourd'hui assez kitsch (ces sons de claviers, non mais vraiment...), ça reste un grand moment d'émotions.

 

Ce Volume 4 est à l'aurore du grand Sabotage qu'il précède, une sorte de prémice du mal de l'artiste, celui qui, trop enrichi, génère des frasques regrettables mais bizarrement inévitables. La décadence vient à point et cueille ce Volume 4 comme un fruit trop mûr.

 

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photo de Carcinos
le 22/12/2013

1 COMMENTAIRE

LudwiGretsch

LudwiGretsch le 23/12/2013 à 10:39:09

Mon préféré du Sabbath avec le suivant, bien que moins abouti dans l'absolu qu'un Sabotage ou qu'un Paranoid ! Tous les titres sont fameux malgré ce côté patchwork probablement dû aux conditions particulières durant l'enregistrement; le son, la finesse des arrangements et sa grande diversité, ce côté sombre et tourmenté empreints de magie et d'onirisme...tout, j'aime tout dans ce disque; et puis bon, Changes quoi, quelle pépite ce morceau, une vraie merveille !!!

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