Ken Mode - Entrench

Chronique CD album (46:52)

chronique Ken Mode - Entrench

Deux ans quasiment jour pour jour après un Venerable qui leur a valu beaucoup de louanges (dont l’équivalent  d’une victoire de la musique au Canada) et quelques critiques d’éternels grincheux, KEN Mode est de retour pour son 5ème album ; Réglés comme des horloges suisses, nos (plus si) petits canadiens, et extrêmement ponctuels pour un groupe si actif ces dernières années. Car en deux ans, il s’en est passé des choses pour KEN Mode : Enième changement de bassiste (Andrew Lacour, transfuge de Khann) plusieurs tournées aux Etats-Unis (avec Gaza notamment), en Europe avec Kylesa, et Circle Takes the Square, et cerise sur le gâteau,  framboise sur la bavaroise, mélasse sur la fougasse, signature sur un gros label métal : Season of Mist, ce qui devrait les éloigner encore un peu plus de leur fanbase originelle et permettre au groupe une exposition médiatique méritée par plus de 10 ans de labourages intensifs (Le groupe existe depuis 1999 et a sorti son premier album Mongrel en 2003). Et je dois avouer que si cette signature a du être salutaire pour le groupe (distribution mondiale, budget promo conséquent, conditions de tournée…), elle avait de quoi faire frémir au premier abord, syndrome Kylesa oblige. Mais KEN Mode avait de bons arguments pour rassurer ; D’abord une constance dans la qualité des sorties doublée d’une progression réelle entre chaque album, tant dans l’écriture que dans la production. Ensuite des prestations scéniques furieuses et habitées qui ont tendance à rendre futile toute tentative de leur succéder dignement sur scène. Tant d’indices qui laissaient présager autre chose qu’une demi molle consensuelle.

 

Concernant la production, exit l’ourson Ballou, bonjour Matt Bayles, autre mastodon de la production métal-hardcore du 21ème siècle qui a notamment aidé Botch, ou le pachyderme susnommé, à accoucher de leurs chefs d’œuvres respectifs il y a quelques années (We Are The Romans / Leviathan), ceci au milieu d’une tripotée d’autres groupes quasiment inconnus de nos services (Isis, Norma jean…). Et si Kurt Ballou avait apporté une certaine brillance à leur son jusqu’alors assez touffu et claustrophobique, Matt Bayles, à défaut de réinventer l’eau chaude, a le mérite de  prendre le meilleur de chaque monde et d’y ajouter une bonne dose de dynamique (la place retrouvée de la basse massive dans le mix) qui vient servir des titres furieusement plus rock’n’roll que par le passé, avec notamment  « Counter culture complex », premier titre de l’album, premier extrait dévoilé et premier single par défaut, en tête de gondole.  Et dieu que ce titre est jouissif : courte intro digne de Terry Riley, suivi d’une déflagration math-noise-métal vicelarde en roue libre, rejeton bâtard d’un Jesus Lizard et d’un Keelhaul en pleine crise d’épilepsie. KEN Mode est en forme et semble ne jamais avoir aussi bien porté son nom (acronyme de Kill Everyone Now, mode), et ce, surtout au regard d’une concurrence quasi inexistante à ce niveau de la compétition. Car KEN Mode joue dans la cour des (très) grands, prenant sa source dans la tension galvanisante d’un Kiss it Goodbye, se nourrissant des dissonances vicieuses d’un Today Is The Day première période, et démontrant des facilités en matière de calcul me(n)tal à la manière d’un Dazzling Killmen hyperactif, tout ceci étant exécuté avec une déconcertante facilité, tant le groupe maîtrise son sujet, domine la discipline, et annihile la concurrence, si seulement celle-ci ose encore montrer le bout de son misérable nez.

 

L’autre atout majeur de cet album, c’est cette construction réfléchie qui donne toute sa substance au disque. Les contractions succèdent aux relâchements.  Les morceaux rapides et véloces  alternent avec des compositions plus tendues et rampantes, les uns renforçant l’impact des autres : La parenthèse en (ken) mode « Temple of the morning star » à mi-parcours, l’usage parcimonieux des cordes,  de la guitare acoustique ou du piano par petites touches impressionnistes permettent des respirations qui altèrent, un temps, la sensation d’étouffement avant d’accentuer l’irrémédiable rechute, le tout sans pédanterie aucune, mais avec un sens certain de la dramatisation que l’on ne leur connaissait pas ; comme cette outro très cinématographique qui nous rappelle que ce n’est qu’en apercevant la lumière au bout du tunnel que l’on se rend compte de la profondeur de l’obscurité.

 

Pour ceux qui ne l’on pas encore compris, ceux trop pressés qui ne lisent que la conclusion des chroniques, et pour qui il convient d’en remettre un louche,  Entrench est à la fois un grand disque de hardcore/métal/noise (Si besoin, barrez le qualificatif qui vous chagrine, tant ce disque dépasse les étiquettes précitées) et le meilleur album de KEN Mode à ce jour. Un grand disque de par les influences qu’il brasse, toutes digérées, assimilées puis régurgitées afin d’en extraire tous les sucs, et le meilleur album des  frères Matthewson car ils ont réussi leur pari là où beaucoup d’autres échouent : à savoir se faire plus accessibles tout en restant extrêmement exigeants vis-à-vis d’eux-mêmes et de leurs auditeurs. En définitive, oui, KEN Mode tue tout le monde, maintenant, et  on accepte son sort, résigné, car on sait que dans tous les cas, on finira terrassé par la puissance absolue de l’assaut.

photo de Crousti boy
le 19/03/2013

3 COMMENTAIRES

pidji

pidji le 19/03/2013 à 14:11:10

Pas suffisamment écouté encore, faut que je remette ça !

Crousti Boy

Crousti Boy le 19/03/2013 à 19:40:47

Bah, qu'est ce que t'attends ?
File l'écouter ou t'as un blâme !

Jull

Jull le 03/04/2013 à 16:24:38

Putain ca defouraille sa mere!!!! Enorme!

AJOUTER UN COMMENTAIRE

anonyme


évènements

HASARDandCO

Ça - 24615
Chronique

Ça - 24615

Le 27/02/2015

The Murder Capital - When I Have Fear