Beneath The Massacre - Dystopia

Chronique CD album (32:24)

chronique Beneath The Massacre - Dystopia

Je le confesse: l’ultra-brutalité technique à la mode Spawn of Possession / Origin / Decrepit Birth, ça m’emmerde. Les déluges de blast goulûment déversés sur un riffing ultra-alambiqué, ce dernier nécessitant une décomposition en série de Fourier pour commencer à en saisir la logique interne, ça a sans doute un intérêt scientifique, mais ça échoue à drainer l’endorphine jusqu’à mon cerveau reptilien... Ou alors il faut s’appeler Necrophagist. Allez-y, balancez donc les pierres, ça rebondira.

Et pour continuer joyeusement en mode Jean-Pierre Bacri, je vous dirai de plus que ça m’éneee-rveuh-moi, ces groupes qui encorisent à outrance leur death et qui balancent à intervalles réguliers de ces mosh parts à vocation fédératrice qui – dans les faits – uniformisent et nivellent par le bas leur propos.

 

Là, il a bien lâché son lest fielleux le cglaume… Il est calmé maintenant Pépère?

 

Oui je sais, je sais… Mais tout ça n’était pas gratuit: je voulais insister sur l’exploit accompli par Beneath The Massacre. C’est que les québécois pratiquent une sorte de deathcore brutal, hyper technique et hyper véloce, qui – sur le papier du moins – a tout pour me tirer des baillements de compétition. De la grosse caisse flattée à l’octuple pédale (au bas mot), du blast non stop – du « groovy » au gravity –, des mosh parts qui freinent un grand coup pour aller charcler profond dans l’humus, des guitares qui tissent leur toile avec la prolixité d’un Spiderman sous EPO… Bref, vous voyez le topo!

 

Et pourtant, Evidence of Inequity – l’EP qui a servi d’acte de naissance au groupe – est un chef d’œuvre du genre. L'animal m’avait d'ailleurs sévèrement scotché. Le 1er album, Mechanics of Dysfunction, s’avérait déjà un poil moins digeste, m’enfin ça restait du bon, et puis bordel: « Society’s Disposal Son » et « Modern Age Slavery », c'est pas de l'arme de destruction massive 4 étoiles ça, Madame?! Et patatras, en 2008, Beneath The Massacre repointe le bout de son growl pour nous prouver que l’excellence de leur premier EP n’était pas qu’un heureux fruit du hasard. En clair, Dystopia, c’est de la grosse bombasse Bébé!

 

Bon, ne jouons pas non plus les autruches: les éructations d’Elliot sont salement monotones et basses du front, certains morceaux peinent à nous flatter l’hypothalamus, et puis une écoute distraite de l’opus provoquera immanquablement quelques sérieux maux de tête vu que le matraquage ne cesse qu’assez rarement. Mais nom d’une p’tite hostie d'calisss', que ces canadz’iens savent expertement dribbler entre saccades au scalpel, décélérations moshy monumentales et sprints de malade – tout ça devenant comme par miracle immensément accrocheur. Tiens, arrêtez-vous un instant sur « Reign of Terror »: alors que la migraine menace sous le flot d’informations, à 2:45, le groupe balance une bonne vieille giclette de saccades mortelles dans la plus pure tradition Decapitatedesque. Rhaaaaaa!! Et quelques poils plus tard, pas loin du début de « Our Common Grave », rebelote sur une superbe doublette lead tricoteuse / bûcheronnage à la hache. Sans parler de cette mosh part façon pointillés sismiques sur « Never more » (à 0:54), ni de cette coulée rampante de caoutchouc fondu qui nous englue vers 1:30 sur « Condemned ».

 

Arrivé à ce point, le lecteur futé qui ne connaitrait pas trop nos lascars et qui aurait eu le courage de lire le pavé précédent va se dire: « Mouais, je vois tableau: un ouragan de baffes non stop, saupoudré de quelques pauses groovy… C’est un peu comme de se coincer les couilles bien serrées dans un étau, et de relâcher parfois l’étreinte le temps d'une bière fraîche… On ne retient de l’expérience que ces moments d’extase libératrice, et on occulte la douloureuse réalité: c'est du syndrome de Stockholm musical caractérisé ça! »

 

Il y avait en effet peut-être un peu de ça sur Mechanics of Dysfunction. Mais sur Dystopia, si on peut éventuellement ressentir un certain épuisement du fait d’un trop plein d’informations simultanées, il ne s’agit jamais de la lassitude due à l’impression d’être exposé à un invariable mur de brutalité sans queue ni tête. Et il serait réducteur de penser que le plaisir ressenti ici n’est qu’occasionnel. Tiens, pour appuyer mon propos,  j’appelle à la barre 2 morceaux parmi les plus uniformément jouissifs de l’opus. Commençons avec « The Wasteland », pièce haletante, inhumaine presque, qui rappelle un peu Spawn Of Possession. Ce titre pousse le concept d’épilepsie stroboscopique jusqu'au bout de sa logique tout en restant délectable aux oreille d’un fan de BaK, le groupe ménageant des parenthèses « Stop’n’Go façon morse » ainsi que des courses de fond purement épiques de toute beauté. Témoin n°2, « Bitter » allie un riffing à la Gorod, des ralentissements mélodiques et du bucheronnage moderne hyper hargneux – sans parler d’un putain de solo sur tapis de basse – pour un résultat carrément superbe, foi de lapin! Là, vous les avez, là, vos exemples de panards ininterrompus.

 

Peu nombreux sont les barbares du metal (…vraiment…) extrême dont les décibels rugueux réussissent à donner à mon soyeux pelage des reflets si lumineux (… pas sûr que l’image soit très parlante tout bien considéré!). Et pourtant, avec Dystopia, Beneath The Massacre réussit cet exploit les grattes dans le nez. Juré-craché: j’ai quasiment autant de plaisir à enfourner cette galette dans mon lecteur qu’un bon petit Devin Townsend, un vieil Overkill ou un Illdisposed groovy de la fesse. Si c’est pas un argument de poids ça, je ne peux plus rien pour vous…

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: Des flots incessants de riffs en cascade, du blast n’en-veux-tu-pas-en-voilà-quand-même, des saccades façon old-Decapitated passé en démultiplié, des mosh parts au napalm... Le brutal deathcore technique de Dystopia renoue avec l’excellence d’Evidence of Inequity.

photo de Cglaume
le 21/01/2013

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