Ecorce - Ordeals Of The Void

Chronique mp3 (53:36)

chronique Ecorce - Ordeals Of The Void

Dites voir, vous qui savez: je me trompe ou la vague « modern death » (...c’est comme ça qu’on disait à l'époque), qui ne cessait de grossir il y a encore quelques années de cela, a fini par s’écraser mollement sur les côtes de Metalland, disparaissant corps et bien sans laisser beaucoup de traces, de fragments d’écume ou d'embruns discographiques? Ils sont passés où, dites, les Om Mani, Djabah, Clampdown, Klang!!!, Saw & co qui constituaient le fer de lance de troupes formées à l’école de la Klonosphere d’alors? Pour un Gojira ayant réussi à accéder aux grosses scènes américaines et un Trepalium ayant brillamment opté pour l’auto-entreprenariat en fondant sa Petite Entreprise Swing Death, combien sont-ils à être tombés au champ d’honneur? C’est qu'au final les adorateurs de Meshuggah ont préféré la pure orthodoxie et le vernis 2.0 du djent, tandis que les accros aux bleuargl et aux rythmiques qui secouent la couenne en mode saccades moshy ont cédé à l’appel du deathcore...

 

Non non: ces bouffées de nostalgie ne sont nullement le fruit de lendemains vaseux post-beuverie hautement chargée en sulfites. C’est l’écoute d’Ordeals Of The Void, du one-man-band instrumental Ecorce, qui a déchaîné (ou « des chênaies » pour rester dans le sylvestre) cet afflux de vieux souvenirs. Car les 13 titres qui y sont proposés offrent leur lot de guitares lourdes, essentiellement rythmiques, parfois hypnotiques, prenant un malin plaisir à ne pas rebondir là où on les attendrait naturellement. C’est sûr, ici l’ombre du colosse Meshuggah nous protège des coups de soleil, tout comme ces riffs pachydermiques qui affolent les sismographes depuis que Gojira en a cédé les droits à la communauté métallique internationale. D’où le retour des fantômes évoqués dans le gros tas de mots ci-dessus, ceux-ci venant nous hanter d’autant plus facilement que l’absence de chant laisse ici le champ libre aux vagabonderies de l’esprit.

 

Mais évitons d'être réducteur, d’autant que le bois dont est fait Ecorce (!) n’est pas celui du bonzaï qui reproduit en plus petit ce que d’autres font mieux en grand. Car au-delà de la télégraphie meshugguienne et de la pesanteur gojirienne – et au risque de s’automutiler méchamment –, le groupe connait bien d’autres façons de bucheronner: il thrashe à fond de train sur « Hc 11 » et « HC 10 » (entre autres), obtient de nos fessiers de s’agiter follement au son d’un « Hc 7 » au groove proprement trepaliumesque, et déchaîne à intervalles réguliers les blasts et vents furieux d’un black échevelé. Du coup cette violence froide, ces lourdeurs mélodiques entêtantes, ces lancinances sexy nous font penser très fort aux excellents She Said Destroy. Ce qui ne peut manquer de nous séduire. Surtout qu'au sein de cette courte heure de musique, on déniche de bons petits morceaux sans gras et sans reproche comme « Fago Sepihard (18) », un « Hc 5 » traine-savates mais étonnamment accrocheur, ou encore les « Hc 11 » et « Hc 7 » précédemment évoqués.

 

Reste qu’il manque peut-être à Ordeals Of The Void la présence de ce hit incontournable qui serait susceptible de nous pousser à annoncer la venue du nouveau messie Modern Death, ainsi que le supplément de chaleur organique qu’aurait pu apporter un véritable groupe (et notamment une vraie batterie – mais bon, je pinaille vu le genre pratiqué…). D’autant que, ajoutant la dimension instrumentale à une musique déjà froide et hypnotique par nature, Ecorce souffre un peu du « syndrome Kong »:  bien que la musique soit bonne, cette "absence d’intervention humaine" nous conduit parfois à rêvasser en nous détachant petit à petit de ce qui ne devient plus qu’une agréable bande-son, mais plus tout à fait un album en tant que tel.

 

Et forcément, c’est un peu dommage.

 

N’empêche que si vous êtes en manque d’un metal poilu et moderne, Gojiro-Meshugguien-mais-pas-que, généreux et intelligent, essayez Ordeals Of The Void: il sera la mousse-sur-le-tronc qui vous indiquera où se situe le Nord modern métallique dans la jungle discographique actuelle.

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: chacun ses fantasmes, certes... Mais si le vôtre est de mettre la main sur un bon petit album instrumental entre Meshuggah, Gojira et She Said Destroy – sans compter de régulières poussées black et thrash – eh bien vous pouvez cesser de sacrifier des cochons d’Inde sur l’autel de Kali pour voir vos souhaits exaucés: Ordeals Of The Void est dès à présent disponible, notamment via Bandcamp.

photo de Cglaume
le 18/02/2015

1 COMMENTAIRE

Matt666

Matt666 le 18/02/2015 à 14:21:07

Hyper bien ! Merci !

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