Gazpacho - Demon

Chronique CD album (49:40)

chronique Gazpacho - Demon

Il serait bien malvenu de commencer cette chronique par un jeu de mots moyennement amusant et largement éculé.
Les occasions ne manquent pourtant pas lorsqu'on s'appelle Gazpacho, patronyme d'un célèbre potage froid italien.

Mais lorsqu'on connait cet album ou ce groupe, cette plaisanterie a de quoi agacer. Il s'agit de se concentrer sur la musique des norvégiens.
Eux qui en sont à leur 9eme album, et qui viennent de trouver en ma petite personne un nouveau fan.
Il faut dire qu'ils font tout sauf de la soupe.

Néanmoins, ce "Demon" ne trouvera pas facilement preneur chez les auditeurs un peu plus "bas de front", peu adeptes de la douceur, rarement enclins à la lenteur.
Etant bien incapable de revenir sur la carrière du groupe, cette chronique ne s'attache donc qu'aux nombreuses écoutes de cet album. Il y aurait sans doute des points de comparaison pertinents, mais je ne les connais pas.
Par ailleurs, je suis peu adepte de la chronique "track-by-track". Un procédé qui peut se résumer ainsi : la facilité du chroniqueur, la pénibilité du lecteur.
C'est pourtant ce que vous lirez (si vous le souhaitez encore) : les cinq morceaux méritant de longs arrêts entre leurs structures mouvantes, les incursions de différents instruments etc.

Avant de se lancer pour de bon, sachez, qu'à mon sens, aborder Gazpacho ne se fait pas n'importe comment.
Ne faites pas (comme moi) l'erreur d'une découverte au hasard de votre curiosité. C'est une ambiance, un état d'esprit.
Bien qu'excellent, cet album ne détermine pas votre humeur, il l'accompagne. Superbement.
Commencez par savoir que vous pouvez prendre votre temps. C'est rare, mais important, primordial même.
Cette première rencontre ne sera peut-être pas la bonne. Il faudra peut-être donner une autre chance à l'album et VOUS donner une autre chance.
Enfin, vous devez avoir le désir d'être au calme, au repos, tout en sachant que vos oreilles seront largement mises à contribution.
Il ne s'agit pas de vous forcer, mais d'être motivé. Ne soyez pas pressé, ce jour arrivera quand il le faudra.

Profitez d'une écoute au casque. Isolez-vous.
Si vous jouissez d'un bon matériel hi-fi et d'un peu de solitude, d'aucune sensibilité aux plaintes du voisinage, n'hésitez pas à vous couper du monde pendant 50 minutes et poussez le volume.
Qu'il fasse jour ou nuit, beau ou pas : peu importe. C'est votre état d'esprit qui compte.




"I've been walking" nous invite dans la bulle "Demon" par une voix frêle, légèrement tremblante. Un piano, un levée de percussions puis des nappes de cordes aux sonorités orientales éveillent notre curiosité. S'invitent alors les guitares, n'effacant pas un piano puissant.
A partir de là : tout se complique.
Sur dix minutes, on peut déceler tout autant de changements d'ambiances. Une guitare acoustique s'invite à plusieurs reprises, on entend au fond des choeurs féminins. Alors qu'on prend le temps de s'imaginer une douzaine d'anges en aube blanche, les choeurs disparaissent, la voix du chanteur est doublée, donnant une puissance à ses mots doucement distillés. Un clavier très 70's reste le temps de quelques minutes.
Pourtant, à la 8e minute, tout bascule. Un violon s'avance seul, la traversée du désert qui achève la 1ère piste, annonce une seconde partie à découvrir piste 3.

Entre les deux parties s'intercale "The wizard of Altai mountains".
Une rencontre, un repos, et une histoire racontée simplement. L'accordéon joue sobrement, le ton est léger. Lorsque vient le retournement plus enjoué. A la moitié du morceau l'accordéon s'offre un solo, des airs d'Europe orientale. On s'imagine alors dans un film à la Kusturica.

La marche reprend alors, dans une tout autre ambiance. La fête magique s'efface vite dans une introduction brumeuse et froide.
Le voyage prend des allures de douloureux périple lorsque le violon refait surface, lorsque la voix tremble mais distille lentement chaque mot.
Encore une fois ce road-trip musical nous emporte loin avec le piano, l'effet d'une voix posée sur une vieille bande grésillante.
On passe alors en 12 minutes par d'innombrables états, entre explosions, calme et même...lassitude. Cette lassitude semble pourtant presque calculée, elle amène progressivement l'auditeur au bout de ce long morceau pour une dernière et flamboyante montée en puissance. L'album atteint alors son paroxysme.

S'ensuit un titre fleuve. 18 minutes.
Ce qui s'annonce comme étant LE morceau devient presque LA déception.
Le titre précédent peine avalé, on entre dans "Death room". Un morceau aux ficelles bien plus grossières. Même s'il nous gratifie de magnifiques passages avec une orchestration prenante, une nappe de clavier comme filet sonore pour compléter certaines ambiances, un glauckenspiel délicat et une voix tout aussi douce : le groupe se perd dans les méandres qu'il dessine lui-même.
On entend un groupe chuter dans son propre piège : celui d'une construction progressive où Gazpacho s'autocaricature au sein même du morceau.
Il y a comme une sensation d'artificialité qui se dégage de ce titre...comme une sensation de surfait, avec finalement peu de choses.

Alors qu'il ne reste que 4 minutes à "The cage" pour nous laisser sur une bonne impression, on croit que tout est perdu. Pourtant Gazpacho retrouve en peu de temps son sens de la mélodie, et s'active entre la voix, le piano et les cordes.
Un coup de percu, un clavier de temps à autre habillent ce morceau qui nous rappelle tout le talent du groupe.
Il n'y a rien de plus classe que la puissance matinée de douceur.

Si 18 minutes de cet album sont relativement décevantes, c'est parce qu'elles font suite à un lancement magnifique.
A la limite, amputez l'album de ces 18 minutes si, après une première écoute vous n'avez pas accroché à "Death room", mais offrez vous le temps de profiter des 30 autres minutes de haute volée.
Offrez-vous ce voyage. Offrez-vous cet album.

photo de Tookie
le 06/08/2014

1 COMMENTAIRE

pidji

pidji le 06/08/2014 à 17:03:18

plutôt sympa ce disque en effet, en fond pendant une soirée tranquilou ça le fait ^^

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