Infectious Grooves - The Plague That Makes Your Booty Move...It's the Infectious Grooves

Chronique CD album (44:42)

chronique Infectious Grooves - The Plague That Makes Your Booty Move...It's the Infectious Grooves

1991. Il y a tout juste un an, Suicidal Tendencies collait une énorme mandale à la scène metal internationale avec un « Lights…Camera…Revolution! » ayant l’impact d’une batte de baseball en titane s'écrasant sur une mâchoire de lépreux. C’est donc tout en haut de la vague (ou plutôt de la rampe, ces messieurs étant plus connus pour leur amour du skate que pour celui du surf) que la tête pensante et prêchante du groupe, Mr Mike Muir, et la recrue encore fraîche Robert Trujilo (qui, depuis, a fait du chemin …) décidèrent d’aller se donner du bon temps dans un side project moins « sérieux » et « violent », au sein duquel il pourraient donner libre cours à leur amour pour la déconne cartoonesque et le funk hautement groovy… Le tout reposant néanmoins sur de solides fondations metal et gardant ce mordant issu d’une adolescence plus souvent passée à côtoyer les gangs qu’à faire des bouquets de coquelicots dans les vertes prairies de Mr Ingalls. Après s’être entourés d’olibrius de la même espèce, dont certains issus des rangs de Jane’s Addiction (Stephen Perkins) et d’autres ponctuellement détournés de la maison mère (Rocky Georges), Mike et Robert donnèrent naissance à Infectious Grooves, beau bébé ressemblant en tous points à ses parents: vilain, farceur, cynique, prompt à se livrer aux pire bouffonneries et n’arrêtant pas de claquer des doigts et de taper du pied en lâchant périodiquement des « c’mon ya stupid’ fool, move ya’ booty » …

 

Manifestement nos zigotos avaient une pressante envie de relâcher la pression. En effet ce qui saute aux oreilles sur cet album – et ce dès le tout début de « Punk it Up », alors que Robert tire de sa basse des lignes ayant le moelleux et le ressort d’un trampoline de velours –, c’est l’énorme panard que le groupe semble prendre, chaque seconde de l’album débordant d’un enthousiasme qui nous empêche de les imaginer autrement qu’arborant une large banane leur fendant la trogne d'une oreille à l’autre. Portés par l’euphorie d’une liberté artistique totale, les bougres se laissent aller à concrétiser sans prise de tête tous leur délires, vocaux ou musicaux, s’offrant un blues parodique sur bruit de vinyle crachotant (« Infectious Blues »), un solo d’harmonica (à 1:54 sur « Stop funk’n with my head »), une orgies de djembés et autres congas (à la fin de « Back to the People ») ou une grosse farce rigolarde (« Mandatory Love Song »). Et puis paf, allez les gars, maintenant on est connus, on est signés chez Epic: on a les moyens de se lâcher en voyant grand... Pourquoi on n’inviterait pas carrément Ozzy dans notre asile de fous (cf. « Therapy »)? Le summum de ce délire musical grandeur nature reste quand même les courts sketchs nous présentant Sarsippius, le chanteur ridicule mais néanmoins attachant qui continuera de hanter l'univers du groupe sur les albums suivants.

 

Mais même si Infectious Grooves a tout de la grosse farce de potaches, rien à voir avec ces groupes qui nous sortent des albums-blagues Carambar qu’on écoute 2 fois et qui nous gavent aussi sec (non non, n'insistez pas: pas de nom!). Infectious Grooves est plutôt du genre à nous arracher un fou rire à force de grimaces grotesques alors qu’en même temps il nous explose les plombages à même le bitume en nous sautant sur la tronche à pieds joints. Parce que dans le fond c’est du sérieux ce qui se trame ici. Que ce soit le père Trujilo et ses galipettes à la basse, la gratte de Dan Pleasants tordue dans tous les sens à grands coups de pédale wah wah, les multiples petits soli bien rock sur lesquels plane l’ombre de Rocky Georges, ces chœurs aux racines HxCx ou cette pointe de folie menaçante qui rampe toujours sournoisement en arrière-plan des invectives de Cyco Miko, il semble évident qu’on n’est pas au cirque Pinder ici! Et si Infectious Grooves garde toujours les pieds solidement plantés en terres métalliques, c’est que le père Siegel tartine la plupart des compos d’épaisses coulées de gratte rythmique au grain et aux dimensions qui ne sont pas sans rappeler la patte d'un certain Mike Clarke.

 

D’ailleurs c’en est confondant. Si des morceaux comme « Infecto Groovalistic », « Back To the People » ou « Stop Funk’n With My Head » ont clairement pris leurs distances d’avec la scène metal, le riff ouvrant « Monster Stank », ou – plus criant encore –, « I’m Gonna Be My King » qu’on pourrait sans mal confondre avec « Alone » sur la première minute, nous font retomber en pleine sphère Suicidal Tendencies. On peut toujours se plaindre du fort rapprochement stylistique des 2 groupes sur « Mas Borracho » et « Freedumb », mais il est ici évident que dès les débuts du petit frère groovalistique, l'inceste était manifestement déjà d’actualité. Même le titre « Infectious Grooves », pourtant censé être une déclaration d’intention, est généreusement gavé de guitare aux relents ST-iens. M’enfin il faut reconnaître que ce mélange des genres accouche d’une collection impressionnante de morceaux aussi jouissivement puissants que donnant irrésistiblement envie de bouger son popotin. « Punk It Up », « Therapy », « Stop Funk’n With My Head », « Monster Stank », « Back To The People », « You Lie … », « Do The Sinister », « Infecto Groovalistic » – enfin quasiment toute la tracklist quoi! – donnent envie de s’acheter une basse, de se trouver un copain rasta/punk à guitare, et d’aller écraser des mémères à caniche au volant d’une caisse tirée sur le parking de la plage en écoutant à fond les ballons des reprises thrash de Prince …

 

Si vous adorez « Give a Monkey … » de Fishbone, l’aspect le plus groovy des Bad Brains, Living Colour ou encore Dub War et que vous ne connaissez toujours pas Infectious Grooves, foncez sur « The Plague … ». Si comme beaucoup, vous avez déjà croisé leur route, mais que vous êtes restés coincés sur « Groove Family Cyco », remontez donc un peu dans le passé vous rendre compte de la qualité de ce premier album joyeusement pétillant. Et plus généralement, pour peu que vous appréciez autre chose que les gros décibels dépressifs ou la saturation über evil, offrez-vous le gros bol d’air frais de ce Fléau qui – en plus de faire bouger votre booty – reste l’une des pierres angulaires de la fusion (le style musical, pas la réaction subatomique que certains voudraient bien maîtriser …). Mais allez plutôt sur Youtube mater les clips de « Therapy » ou mieux, de « Punk It Up », pour voir de quoi il en retourne …

photo de Cglaume
le 30/05/2010

3 COMMENTAIRES

fuzo

fuzo le 30/05/2010 à 13:47:52

Magique !!!!!!!!!

vkng jzz

vkng jzz le 02/06/2010 à 14:03:56

l'album parfait, avec Ozzy en guest en plus.. un de mes cd favoris.

gromatou

gromatou le 28/04/2013 à 16:22:52

Pas grand chose a rajouter, belle chronique très complète, pour cet immense disque, je viens de me le remettre et c'est toujours aussi bon!des bonnes années, ces années 90, ce son, y'avait aussi Fishbone, Urban dance squad, Primus, souvenirs souvenirs...

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