Kalisia - Cybion

Chronique CD album (71:11)

chronique Kalisia - Cybion

« Ambition, Vision, Exception »

 

Si j’étais un créatif à catogan et pompes violettes chargé de bosser sur un slogan publicitaire coup de poing pour promouvoir Cybion, je pense que celui-ci finirait dans ma short list, devant « Technique, Cinématographique, Magique », un peu trop basiquement descriptif.

 

Vous l’aurez compris, Cybion est une œuvre colossale et épique. Et pourtant ce n’est rien d'autre (!) qu’un seul et même long morceau – oui c’est ça, à la Crimson, mais découpé en 4 parties distinctes pour un total de 20 pistes – qui met superbement en musique une épopée de science-fiction à la croisée du Cycle de l’Élévation et de Fondation. Brett Caldas-Lima, l’homme derrière Kalisia, avait sans doute à cœur d’offrir un premier album à la hauteur de l’attente générée par Skies, la seconde démo du groupe sortie en 1995. Et on peut dire que le bougre s’est donné les moyens d’arriver à ses fins, son space opéra death/thrash mélodico-progressif étant au moins aussi somptueux que le double digipack lui servant d'écrin (n'envisagez même pas de vous contenter de la version standard, hérétiques!) et dont l’artwork et le livret ne sont pas sans rappeler le On The Wings Of Phoenix de Symbyosis.

 

D’ailleurs il n’y a pas que l’emballage qui rappelle le groupe de Franck Kobolt et Corrosive Bob: en effet, en plus d’une thématique futuriste commune, côté musique et son, on retrouve le même tranchant clinique, le même souci des atmosphères, des mélodies et des expérimentations contrôlées, la même délicate symbiose entre profusion instrumentale et lisibilité de la trame. Mais d’autres noms s’imposent également à l’auditeur au cours de cette grosse heure de musique (...si l'on ne compte que le 1er CD): Sybreed (sur « Contact Experience »), Diabolical Masquerade (sur le début de « Down Below ») et surtout Cynic, groupe avec lequel Brett a noué des liens privilégiés puisqu’il a joué avec eux sur scène, qu'il s’est occupé de leur son, qu’il reprend « How Could I » sur le CD Bonus et que Paul Masvidal intervient sur la reprise de « This Dazzling Abyss ».

 

Rentrer dans le détail d’un pavé aussi dense serait laborieux – déjà que mes chroniques ont la mauvaise habitude de traîner en longueur… Sachez toutefois que le niveau technique des intervenants est exceptionnel, sans que l’auditeur s’en retrouve pour autant étouffé dans d’indigestes démonstrations. La présence (omni-!) d’un clavier pourra en rebuter certains, mais celui-ci s'impose naturellement et s'avère rapidement indissociable des atmosphères hollywoodiennes régulièrement développées sur l’album. Si la guitare et le synthé tricotent de nombreuses et excellentes leads et rythmiques – et se taillent de fait la part du lion –, la basse est également à l’honneur et les amateurs de ronronnements délicats auront ici de quoi se pourlécher les babines. Côté vocal enfin, Cybion nous promène dans une merveilleuse tour de Babel où, en dehors des passages parlés (priorité au récit!), vous croiserez de nombreux chœurs lyriques, des voix robotisées, du chant extrême, clair, masculin et féminin, combinés dans toutes les configurations imaginables.

 

Si on ne remarque aucun vrai moment de flottement au cours de cette longue aventure, la 2e partie – « Elevation » – reste néanmoins le moment où ce tourbillon de notes et de sensations est le plus ébouriffant, avec des pics sur « Blinded Addict », « Blessed Circle » et « Black Despair ». Néanmoins, malgré l'éblouissement provoqué par les ors et la savante horlogerie de cette fresque grandiose, en faisant un effort d’objectivité, on pourra déceler de microscopiques brèches dans cet imposant joyau. Par exemple, côté enveloppe sonore, Cybion se révèle particulièrement clean, à la limite de l’aseptisé, ce qui ne risque pas de caresser les amateurs de war metal dans le sens du poil. Côté synthé, notamment sur la phase « Revelation », les sonorités adoptées prennent parfois une couleur rose-kitchounet qui pourrait hérisser quelques poils. Enfin, à l’instar d’un album de Biomechanical, l’abondance des informations et le caractère grandiloquent de certaines ambiances ont de quoi noyer l'auditeur non averti sous le flot incessant issu de cette inépuisable corne d’abondance.

 

M’enfin Cybion est avant tout l’un de ces monolithes rares et impressionnants que seuls quelques artistes visionnaires comme ceux précédemment cités, Unexpect, Orphaned Land ou encore Devin Townsend sont capables de créer. Tout ici est réfléchi dans le moindre détail (la progression alphabétique des titres des morceaux, le langage créé sur mesure pour l’album, la durée de 1:11:11 …), et le plus beau c’est que cela n’est pas vain, qu’on décolle, qu’on écarquille les yeux, qu’on voyage… Et qu’on finit conquis. Plus qu’un album, Cybion est une expérience quasi-mystique que je ne saurais trop vous recommander de tenter.

 

PS: le CD bonus contient une version remixée et remasterisée de Skies, ainsi que 4 reprises (de Dream Theater, Cynic, Emperor et Loudblast), légèrement réarrangées tout en restant fidèles aux originaux. A noter également des featurings de Angela Gossow (Arch Enemy), Christophe Godin, Ludovic Loez (S.U.P.) et Paul Masvidal (Cynic)

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: un monument de death/thrash épico-mélodico-futuriste entre Crimson, On The Wings Of Phoenix et Focus. ** Bave… **

 

photo de Cglaume
le 02/02/2012

2 COMMENTAIRES

Mi

Mi le 02/02/2012 à 10:36:20

J'ai un peu de mal à rentrer dans cet album. C'est vachement bien foutu, c'est sûr, mais je trouve ça trop dense, trop tout-le-temps-à-fond et au bout du compte un peu indigeste. En fait, ce qui me gêne c'est que ça manque (à mon goût) de variations d'intensité, de passages plus calmes pour se reposer. A chaque fois que je me l'écoute, au début je me dis "chouette c'est trop bien" et au bout d'un moment j'en peux plus parce que j'aimerais juste que ça se calme de temps en temps (ou plutôt, au risque de me répéter, que ça change d'intensité).
Bon ça reste mon avis, mal exprimé en plus. Ce (double) CD est quand même vachement bien.

cglaume

cglaume le 02/02/2012 à 10:50:45

L'effet que tu évoques, c'est celui que j'essaie d'exprimer à travers la comparaison avec Biomechanical.
Dense oui, c'est sûr.
Mais bien.
Comme tu dis quoi ;)

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