Öxxö Xööx - Rëvëürt

Chronique CD album (01:17:39)

chronique Öxxö Xööx - Rëvëürt

Öxxö Xööx, Igorrr, -i Snor: les pseudos des trois hurluberlus aux commandes de Naät, le premier album de Whourkr, n’étaient pas que de simples masques pseudonymesques servant à cacher des blases somme toute ordinaires, mais également le nom des projets solos de ces artistes multicartes aussi prolifiques qu’inventifs. Etant tombé sous le charme (le mot est faible) de l’électro-bleuargl metal de l’entité tricéphale, j’acceptai de chroniquer Nostril, le dernier album en date du susmentionné Igorrr – non sans un mouvement de recul initial, avouons-le, causé par l’étiquette « breakcore / baroque » accolé à ladite chose. Et là triple salto arrière dans le slip, surprise de niveau 9 sur l’échelle de Richter, coup de Foudre avec un whattheFuck majuscule: l’album devenait ma révélation de l’année 2010! Alors forcément, quand la proposition de se pencher sur Rëvëürt arriva, malgré les poussées de boutons que provoquent habituellement chez moi les termes « doom » et « gothique », je me lançais joyeusement dans cette aventure nouvelle, prêt cette foi(s) encore à être converti à de nouveaux horizons musicaux.

 

M’enfin bon, les statisticiens de Lourdes vous le diraient mieux que moi: les miracles à répétition, c’est rare.

 

A vrai dire, dresser un bilan tranché d'écoutes pourtant multiples et attentives de l’album s'avère assez complexe, du fait des forts contrastes émotionnels que ce dernier produit chez l’auditeur cglaumien. Idéalement, il m’aurait fallu écrire une « chro-schizo » pour rendre compte de l'expérience, si seulement l’exercice n’avait pas déjà été effectué pour le Posthume de Wormfood (qui, tout bien considéré, a bien des points communs avec Rëvëürt). Mais ne nous emballons pas et commençons plutôt par décrire le contenu de l’assiette, avant d’y planter notre scalpel et d’en mastiquer le contenu avec attention…

 

L’univers Öxxö Xööxien (aussi pénible à écrire que dur à prononcer!) est donc constitué d’un doom liturgique qui fait communier dans un œcuménisme de bon aloi les sombres lamentations d’une musique gothique aux accents transylvaniens avec les aspirations spirituelles des musiques sacrées. A cela se greffent des poussées de rage métallique propulsées par une folie et une Boîte à Rythmes toute Whourkro-Igorrrienne. Plus un clavecin mutin et généreux qui renforce encore la parenté avec le projet solo de Mister Gautier Serre. Les morceaux sont longs, les tempos majoritairement lents, et la tonalité dramatique – quand ce n’est pas tragique – quoiqu’alternant avec des phases de recueillement apaisé. On pense parfois à Elend, d'autres fois au « Vamp-pi-riiiiia » de Moonspell, et souvent aux cyclopéennes dimensions de cette cathédrale sonore où l’on se retrouve à errer, de bains de lumière colorés à la palette de vitraux kaléidoscopiques en cryptes sombres où règnent en maîtres dénuement et mal être. Voilà pour le portrait-robot.

 

Alors dis coco, il blesse où-donc, le bât?

 

Mettons tout de suite les trémas sur les ï: primo, comme je le disais d’entrée de jeu, les atmosphères doom comme gothique ne sont a priori (a fortiori et a posteriori non plus en fait) pas trop ma came. Donc bref, si manque d'adéquation avec mes goûts il y a, sur le fond par contre, rien à redire. Secondo – et là réside l’un des liens les plus flagrants et malheureux avec le dernier album de Wormfood – le registre « lamentations noyées de sanglots » souvent pratiqué par Laurent me brosse violemment le poil dans le mauvais sens, tout comme cela est d'ailleurs le cas avec le chant d'un Philippe Courtois (Misanthrope). Question d’atomes non crochus quoi. Dommage car à côté de ça, quand il accepte de ne pas trop rouler les R, Laurent est un vrai bon chanteur, habité et captivant. Et la touche d’apaisante sensualité angélique apportée par Laure embellit l'ensemble de manière exquise. Tertio, si la BAR sied à Whourkr et Igorrr, elle fait par contre un peu perdre de sa superbe et de sa majesté aux grandioses visions Öxxö Xööxiennes. Voilà, c’est dit. Ça c’était pour la « dark side of Öxxö Xööx ».

Maintenant Rëvëürt est quand même traversé de mélodies superbes, les morceaux possèdent une structure dynamique qui – en dehors de quelques longueurs (sur « Ämä », le début de « Ctënöphörä », la fin de « Nöc Säë » et les deux extrémités de « Lïnï ») – maintiennent notre attention en éveil. Et on est souvent époustouflé devant la maestria avec laquelle est sublimée cette sensation lancinante de mal être, ainsi que devant la grandeur et la majesté de l’édifice musical construit. Sans compter qu’à maintes reprises on assiste à des poussées de folie Igorrriennes qui jaillissent tel des zébulons malicieux du fond de la nef, pour notre plus grand plaisir (mais est-il vraiment besoin de la préciser?).

 

Au final, je suis donc très partagé entre le plaisir profond apporté par ce voyage sombre et quasi mystique au pays du clair obscure doomy, et ces quelques piqures lancinantes qui m’agacent les terminaisons nerveuses comme la flanelle grise du costume du dimanche picote les miches du lardon du XVIe. D'autant que ces piqures renforcent mécaniquement le sentiment de rejet initial provoqué par un mélange de styles pas franchement taillés sur mesure pour mes oreilles. Soyons clairs: quand l’album sera chroniqué sur un webzine comme Slow-End, j’imagine sans mal que ça va sévèrement dithyrambiquer, et que ça va plafonner dans la notation comme sur le podium de fin d’année. Il n’y a qu’à voir comment Öxxö Xööx a déjà reçu les faveurs de la compil’ Combat Nasal pour être fixé. Pär cöntrë, vü lës göüts dü cgläümë ët lës rësërvës ci-dëssüs ëmïsës, töüt çä cöülë förcëmënt möïns dë söürcë däns lës cölönnës CörëÄndCöïënnës...

 

 

 

La chronique, version courte: un trip sombre, majestueux et religieux entre doom, gothique et musiques sacrées, original mais potentiellement dérangeant.

photo de Cglaume
le 30/08/2011

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