Sacred Reich - Ignorance

Chronique CD album (32:34)

chronique Sacred Reich - Ignorance

Allez va, je ne vais pas essayer de vous bourrer le mou façon vieux loup de mer ayant navigué sur tous les océans de la planète thrash: non, je n'ai pas acheté Ignorance à sa sortie, et non, je n'ai pas gravé "Sacred Reich" au compas sur les tables de classe de mon lycée. En dehors de ceux du Big 4, les logos qui zébraient les intercalaires de mes classeurs et les marges de mon cahier de brouillon proclamaient plutôt Testament, Overkill, Sodom, Suicidal Tendencies, Sepultura ou encore Pantera. Et pourtant, c'est vrai, le groupe de Phoenix fait partie du haut du panier du thrash ricain, aux côtés des 2 premiers combos cités ci-dessus, de Death Angel, Forbidden, Exodus ou encore Dark Angel. Mais bon, à cet âge (et en cette ère du pré-Internet!), c'était le montant dérisoire de l'argent de poche alloué mensuellement et la collec' de K7 des copains qui déterminaient ce que l'on écoutait. Qui plus est, à l'époque déjà, ce nom et cette typographie me semblaient un peu douteux...

 

Et puis paf, quelques temps après le bac, l'excellent Independent me sauta au visage au détour d'un magasin de CDs d'occase. Puis rebelote avec le très sous-estimé Heal. Bordel, c'est qu'ils savent jouer de la mine anti-personnel aux endroits où ça émeut ces vils canaillous! S'ensuivit malheureusement une longue période de disette thrashistique pendant laquelle les turbulents petits frères death et black vinrent ringardiser leur aîné à bout de souffle... Jusqu'à ce jour bénit où Metal Blade décida de sortir un juteux coffret 3 CDs réunissant Ignorance, Surf Nicaragua et de pleines brouettes de bonus dodus. Yodléïïï ho, et triple youpi!!

 

Bon alors évacuons quand même la question du blaze tendancieux. Comme l'explique Wiley Arnett dans la très instructive interview suivante, à leurs débuts, nos (alors jeunes) thrasheurs avaient flashé sur un graffiti affichant « S.R. ». Voulant à tout prix l'adopter, ils décidèrent de trouver un nom qui pourrait coller avec cet acronyme... Et c'est "Sacred Reich" qui sortit vainqueur d'une longue liste de patronymes loufoques – entre autre parce que ce nom ne laissait planer aucun doute quant au style de musique pratiqué. Nos compères, plutôt portés sur les sujets de société (ils fustigent les « right-wing radicals » sur « Death Squad » et le « fascist little high school world » sur « Administrative Decision ») et comptant dans leurs rangs un chanteur juif, pensaient pouvoir se justifier d'un tel choix sans pour autant passer pour des nazis. Là, comme ça vous savez à quoi vous en tenir.

 

Maintenant le thrash façon Sacred Reich, ça donne quoi? Des riffs plutôt simples, acérés, directs, et emblématiques du style pratiqué. Un chant limité et agressif, dans un esprit « j'exploite au mieux mes maigres capacités » à la Tom Araya. Des solis typiques du genre et/mais excellents, qui ne lassent pas, même découverts sur le tard, avec déjà 20 ans de thrash au compteur. Pas de course à la vitesse exagérée, mais de bonnes petites accélérations de tueurs. Et peu de rebuts au final. Très peu même. OK, le début de « No Believers » – en dehors de la ligne de basse – n'est pas fabuleux... Mais dès la marque des 1:00, le morceau décolle violemment à la verticale, sur une série de sprints'n'stops des plus jouissifs. OK, « Violent Solutions » est un peu répétitif et inégal, et on aurait préféré une fin moins générique que « Administrative Decisions ». Mais pour le reste, c'est que-du-bon-heur. C'est sûr qu'on retrouve quelques traces assez nettes de Slayer sur ces 9 titres – notamment sur « Victim Of Demise » où l'on se surprend à avoir envie de crier quelques « Angel of Deaaaaaath! ». Et par ailleurs je vous préviens - si comme moi vous avez découvert l'Allemagne de Sodom avant le thrash de la bande à Phil Rind: vous allez retrouver de faux airs de « Agent Orange » ou encore de « Magic Dragon » sur « Death Squad » et « Rest in Peace »... Mais ne perdez pas de vue que pour le coup, c'est Onkle Tom qui sera parti à la pêche au gros son de l'autre côté de l'Atlantique, son skeud étant sorti 2 ans après Ignorance.

Les 2 premiers morceaux de l'album nous remontent donc les bretelles en mode rafales teigneuses, avant que l'instrumental « Layed To Rest » nous plonge dans une petite pépite de soft thrash sombrement expressif, à la « One » de qui-vous-savez. On glisse ensuite naturellement vers l'hymne « Ignorance », pure morceau de thrash-étalon qui reste à ce jour un classique du groupe. La suite, je vous en ai déjà brossé un rapide tableau, passons donc plus rapidement... Mais n'oublions pas de signaler la dernière tuerie sans nom (ou plutôt si, au contraire), « Sacred Reich », petit missile tubesque carrément entraînant – enjoué presque! – qui donne envie d'aller s'offrir une virée en mode Mad Max dans le quartier à mémères le plus proche.

 

Certes, les amateurs de mille-feuilles technique et de dentelles progressives à la Coroner / Mekong Delta feront peut-être la moue à l'écoute de Ignorance. Et les amoureux de Devourment et Brodequin pourraient bien de leur côté trouver léger le niveau d'agression de cette galette – qui affiche quand même 25 ans au compteur, n'oubliez pas! Mais les tubes sont là. Les riffs sont là. La marque des pionniers est là. Et ce n'est encore que le début de l'aventure...

 

PS: le coffret Metal Blade précédemment évoqué nous offre en prime une reprise sympa du « Rapid Fire » de Judas Priest avec Rob H. au chant (m'enfin perso je préfère la reprise qu'en a déjà faite Testament), une chouette cover de « The Big Picture » (reprise d'un groupe de punk / hardcore US: les MCD) et enfin le « Sweet Leaf » de Black Sabbath – sympa, sans être révolutionnaire.

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: direct, sympa, rugueux et inspiré, le premier album de Sacred Reich fait parti de l'histoire du thrash. Et même un vieux routier blasé y trouvera de quoi rendre plus moelleux son bagage métallique... 

photo de Cglaume
le 08/07/2012

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