Bookakee - Ignominies

Chronique CD album (50:01)

chronique Bookakee - Ignominies

Les mêmes causes provoquent invariablement les mêmes effets. Il ne faut donc pas s'étonner qu'un chroniqueur qui s'était fait titiller la curiosité par un groupe nommé Mike Litoris Complot (les fans de Gronibar doivent se jeter sur The Art of Pony Party!) bloque sur une formation répondant au doux nom de Bookakee. Comme quoi, parfois il faut peu de choses pour éviter à un promo les affres de la corbeille « Pas CoreAndChroniqué »...

 

Si le groupe est parfois présenté comme la réponse québécoise à Gwar – je l'ai lu sur internet, c'est donc vrai –, c'est uniquement du fait des costumes arborés sur scène et lors des sessions photos, bien que, si vous voulez mon avis, ceux-ci évoquent plus un Slipknot fraîchement arrosé de liquide séminal que les Muppets de l'espace. Parce que musicalement parlant, la comparaison n'a pas vraiment lieu d'être, les Canadiens évoquant plutôt un mariage entre Beneath The Massacre et Cephalectomy placé sous le signe des expérimentations malicieuses. Pour le dire autrement, Ignominies – leur deuxième album – cogne dur et précis. On a donc ici affaire à un Deathcore ultra-technique et plutôt froid, garni de moult mosh parts saccadées, gargarismes glougloutants et riffs excessivement éjaculatoires. Sauf qu'au lieu d'en rester là et d'être donc aussi conviviale qu'un réceptionniste de chambre mortuaire, la musique du quintet est constamment mélodique et variée – à l'image du «True Northern Mystigrind » autrefois pratiqué par les adeptes de l'aération crânienne. Et fusent les leads charmants, et chantent les soli chamarrés, et volettent les twins flamboyantes... Sans compter un supplément de moelleux apporté par une basse aussi amicale que bien présente. Par contre, ne vous méprenez pas: tout cela reste ancré dans l'extrême le plus grumeleux, ce rappel à l'ordre étant constamment asséné par une batterie à haut débit froidement clinique, ainsi que par le chant de Philippe Langelier qui en passe par toute la palette de circonstance – growl profond, cris, shriek, pig squeal – avec une facilité et une brutalité qui rappellent Julien Truchant de Benighted – ce rapprochement n'étant pas uniquement dû au featuring de celui-ci sur « Bréhaigne ».

 

« Tu ne parlais pas également d'expérimentations malicieuses un peu plus haut? »

 

Si si, effectivement. Nos amis canadiens sont de sympathiques polissons dont l'extravagance ne s'arrête pas au port de panoplies outrancières. C'est que leur musique s'ouvre régulièrement à d'autres horizons. Comme le Flamenco et ses castagnettes, sur « Bréhaigne » ainsi que sur « Muliebria », ce penchant étant certainement dû à l'arrivée récente de Jonathan Gagnon qui a 20 ans de Jazz Manouche dans les pattes. Comme le Heavy Metal épique et généreux, dont l'esprit vient souffler par au moins 3 fois sur l'album (écoutez ces incroyables twins héroïques parader sur fond de guimbarde à 3:30 sur « Bréhaigne »). Comme l'Electro (attention, passage Trance / Dubstep à 2:49 sur « Celestial Decimation »). Comme le Prog atmosphérique champêtre (gambadons sereinement, aux côtés de Devin, à la moitié de « Celestial Decimation »).

 

Mais ce saupoudrage d'un peu de pittoresque par-ci, et d'un peu de singularité par-là ne suffit pas pour rassasier le groupe. Celui-ci s'offre donc carrément un entracte en pleine tracklist, de « Intermission 1 » (« It's Information time folks! ») jusqu'à « Intermission 2 » (« And now on with the show! »), au sein de laquelle il s'en va sauter en mode instrumental, de champignon en plate-forme, aux côtés de Super Mario (« Mario Whirl »), pour ensuite s'accorder deux minutes de rêverie duveteuse sous la couette zébrées de stridulations Electro caressantes (« Refuge Insidieux »). Vous en connaissez beaucoup, vous, des zozos pareils?

 

Ok, la plage « Noise » ne sert pas à grand chose, et certains morceaux sont un peu bourratifs (« As We Assault Empyrean », « Scullion »). Mais globalement sur Ignominies il arrive bien plus souvent que l'on prenne son pied plutôt que ceux-ci se prennent dans le tapis, foi de lapin! Alors vous aussi, acceptez ce Bookakee généreux, et laissez-vous asperger par ces brûlants excès techniques, ces généreuses coulées mélodiques et ces régulières giclettes d'éléments pétillants qui pimentent une musique dont vous prendrez bien soin de laisser quelques gouttes rentrer également dans vos oreilles. A appliquer en masque – pour être au maximum de la symbiose avec les Canadiens – ou plus traditionnellement au casque.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: Ignominies propose un mélange excitant, brutal, technique et pourtant mélodique des répertoires de Beneath The Massacre et Cephalectomy, le tout relevé de nombreuses digressions osées qui raviront les amateurs d'espiègleries métalliques.

photo de Cglaume
le 14/03/2019

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