David Bowie - EART HL I NG

Chronique CD album (48:57)

chronique David Bowie - EART HL I NG

> "Welcome to the jungle, we got fun and games" <

 

1996, la tournée de l'album 1.Outside terminée, David Bowie et son équipe du moment retournent immédiatement en studio pour mettre en boîte ce détonnant nouvel album.

2 semaines et demi après, l’enregistrement est bouclé. Cet enchaînement – incroyable pour ce bientôt cinquantenaire – apportera à EART HL I NG la fraicheur de la concision qui faisait défaut au précédent boulimique 1.Outside de 1995. Si ce dernier – concept - album était aux croisées de Nine Inch Nails (avec qui ils font une tournée en co-tête d’affiche) et de David Lynch (un titre sera en intro et outro de Lost Highway), le nouveau lui naviguera sur les terres de l’électro-jungle-drum‘n’bass du moment. Cette approche musicale secoue les charts et c’est Prodigy qui s’infiltre dans toutes les radios. Le groupe Underworld sera lui aussi revendiqué par le guitariste. Dans tous les cas Bowie sait bien ce qui se passe autour de lui musicalement et reste à l’affût des nouveautés. De toute façon féru du numérique et des nouvelles technologies qu’il est, il n’avait pas attendu 1997 pour fricoter avec les machines. Parce que oui, ici les machines vont jouer leur rôle.

 

Niveau humain, pour EART HL I NG il est accompagné des musiciens qui l’ont accompagné sur la précédente tournée, à savoir :

Reeves Gabrels (furieux à la guitare, quel son !)

Gail Ann Dorsey (LE groove à la basse, et quelle voix sur les chœurs et les duos, disques et lives !)

Zachari Alford (démentiel batteur, quel acrobate avec son instrument !)

Mike Garson (de retour depuis le début des année 90, clavier/pianiste star, déjà avec Bowie en 73-75 et qui a collaboré, puis collaborera, avec Mick Ronson en solo, Nine Inch Nails, Smashing Pumpkins, The Dillinger Escape Plan, No Doubt ou Herbie Hancock)

 

Ne tergiversons pas, l’album navigue de titres aux rythmes ultra pressés (niveau vitesse) comme "Little Wonder" – et ses histoires de dwarfs (!) – ou "Battle For Britain (The Letter)" à d’autres plus posés et ultra massifs (tendance indus) comme "Seven Years In Tibet" ou "I'm Afraid Of Americans" . Plombage garanti. Textures métalliques définitives. Avec toujours ces puissantes explosions compressées de Reeves Gabrels à la guitare (qui doit avoir un micro actif et des sacrés effets).

Et puis des beats, samples, et autres loops, sont constamment injectés, mais à des niveaux différents, dans la construction des morceaux et des mélodies. Ces ajouts d’ailleurs seront fait maison. Ils n’ont pas été piochés dans la discothèque des autres pour exister. Les loops batterie seront construits par Zachari Alfort à partir de sons obtenus de son instrument, des matériaux, pour ensuite êtres boostés à 160 BPM. Pour les autres, c’est une sombre histoire de parties et de sons guitares, saxophone, ou autres, passés dans un sampler-synthetiser pour être ensuite distordus, coupés, accélérés…

 

La présence – improbable  – de ces rythmes pressés, la guitare bien particulière et explosive de Reeves Gabrels, et ces passages ultra massifs à la distorsion davantage indus/metal que rock, laissera du monde sur le carreau. Nous ne sommes ni dans du « lounge » tranquille, ni dans de la pop décorative. La machine n’attend pas et la guitare transperce. Le film Running Man illustre le propos. Ici le cœur se cale sur le BPM des machines, ils nous font courir, on ne sait pas où l’on va ni véritablement ce que l’on aura au bout, on ne sait pas d’où va venir la prochaine attaque… On sort de l’écoute essoufflé. "Like A Dead Man Walking". Jusqu'à en avoir mal.

EART HL I NG demande une certaine endurance et on peut dire qu’on ne les avait pas vu venir avec ce nouvel album.

 

David Bowie, et le groupe, s’amusent. C’est même la première fois depuis 1974 qu’il s’occupe de la majeure partie de la production.

"Seven Years In Tibet" (le meilleur morceau peut-être) verra Bowie reprendre le sax, sur disque et en concert, pour passer d’un groove contagieux à un niveau sonore très puissant et oppressant sur le refrain. Une version chantée en mandarin sera aussi enregistrée, présente dans les pistes cachées du DVD Best Of Bowie et sur des EP/singles.

 

Si le son a quand même une certaine – relative – retenue sur disque (en atteignant quand même des apogées inimaginables pour un album de Bowie), en concert il en sera encore autre chose.

Le titre "I'm Afraid Of Americans", un morceau des sessions de 1.Outside remanié pour EART HL I NG, offre à Bowie, conjointement à "Hallo Spaceboy" des mêmes sessions, de quoi tétaniser son public en concert. Pour ces deux morceaux, les versions live ont la distorsion poussée à 12, la batterie est hyper punitive sur les refrains, les lumières sont offensives et aveuglantes, les voix insistantes, pour un ensemble du plus martial. Le morceau sera imagé par un très beau clip avec en guest Trent Reznor (Nine Inch Nails).

 

EART HL I NG est un disque pour eux que l’on pourrait qualifier de récréatif (quand une suite au complexe 1.Outside était alors envisagée), où Bowie se permet d’encore tous nous surprendre tout en signant à nouveau des excellents titres. Ceux-ci, d’une approche nouvelle, apporteront une variété à ses futures set-list de concerts pour donner à ses futurs shows de 2H30 sa dose de surprise dans le choix de morceaux.

 

Voilà c’est fait, en 1 album il clôt l’intérêt que l’on pourrait avoir pour l’electro-jungle-drum‘n’bass.

Au suivant ?

photo de R.Savary
le 03/12/2016

1 COMMENTAIRE

Eric D-Toorop

Eric D-Toorop le 09/12/2016 à 11:12:10

un album frénétique, mystique qui va réconcilier pas mal d'amateurs plus adultes de l'époque Let's Dance, perdus après Tin Machine et Black Tie White noise.
Pour tous les autres, un bien bel album des 90's

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