Dirge - Elysian Magnetic Fields

Chronique CD album (01:06:21)

chronique Dirge - Elysian Magnetic Fields

Nous ne sommes pas les premiers, pour le coup, à nous attarder sur le cinquième album des parisiens. C’est qu’une fois de plus, on aborde le nouveau venu avec appréhension et les veines glacées d’effroi. Nous savons que nous sommes proches de la faute, de la bordure, de la rupture. Formé au milieu des années nonante (heu… quatre-vingt-dix), le combo bâtit une carrière durable et décisive à l’instar des bordelais de Sleeppers. Faisant fi des idées reçues, les premiers épisodes dans les sillons de Pitchshifter (qui s’en souvient ?) ou Skinny Puppy jusqu’à l’arlésienne Wings of lead over dormant seas de 2006, plus de 120 minutes de musique profonde et puissante conçue en une année.  2 pièces distinctes dont 5 titres qui mènent à « Nulle Part » et une plaque éponyme de 60 minutes. Me demande si ce fait d’armes a inspiré leur désormais compagnon de label Rorcal.

 

Luttant contre les malentendus,  un groupe rouennais plutôt post-rock (avec violoncelle) porte le même patronyme. Nirvana doit avoir eu plus d’emmerdes pour moins que ça ! Evoluant au fil des changements de line-up (pas tant que ça en 17 ans !),  Dirge grave une identité propre au fil des années. Une identité assez unique et reconnaissable dans le paysage rock frenchy. Et de me souvenir des premiers mots lus sur le groupe dans les pages de la Revue Assourdissante de la Génération Electrique qui voulait les propulser sur le devant de la scène – là, davantage à l’instar de Prime Time Victim Show-. Ces belles envolées sur la fin de mèche des nineties où tous les groupes étaient plus imparables les uns que les autres. Allez, je range ma nostalgie.

 

Bizarrement, je passe un peu à côté de leur « platinum » And shall the sky descend. Bien sûr, je sais que cette plaque constitue un point d’accroche majeur dans la discographie du groupe. Leur musique, à l’époque, n’a jamais été si humanisée, profonde, emprunte d’une tension larvée pour 4 titres monumentaux sous impulsion de parties minimales, de samples malins, et d'instruments peu habituels comme le didgeridoo ou le violon, en plus d'une belle collaboration avec la chanteuse de Von Magnet.

 

Je redécouvre vraiment le groupe avec le titre « The Coiling » sur la compilation Falling Down chroniquée ici.

 

Elysian magnetic fields qui nous occupe aujourd’hui apporte autant de réponses qu’il pose de questions. Comme principale déconvenue, on a toujours pu admirer les parisiens par leur singularité, hors ici, on a une impression pressante de déjà-entendu. C’est qu’ils commencent à se bousculer sévèrement les combos – à la Neurosis- que le raffut bourdonnant et lancinant devient une marque de fabrique (de plus en plus préfabriquée d’ailleurs) pour de nombreux groupes du rock lourd. Mélopées lourdes, rythmes robotiques, répétés jusqu’au décharnement et basse anguleuse et/ou rebondie. La force de frappe est intacte cependant, ça c’est le métier qui veut ça. L’introduction par « Morphée Rouge », typique, souffle un vent brûlant et puissant. Nous voilà bien embarqués dans des travées déjà bien foulées. C’est confortable.

 

A « Obsidian », nous sommes davantage conquis, la voix bien sûr. Juste, martiale,  elle dirigera tous les tourments à venir dans la lourde noirceur qui s’étale. Oui le groupe maîtrise à la perfection son art, « Cocoon » est un titre fort, émotionnellement prenant, un grand moment du disque. Lorsque le propos s’apaise, c’est dans une poignée d’arpèges (cfr U.S Christmas) qui s’étiolent dans des éclats de cymbales. Le parti pris de ne pas céder  à l’envie de l’explosion d’énergie pure nous amène sur les filets cristallins d’un rock résolument post de haute facture « Sandstorm ». Mogwai va faire la gueule en écoutant ce titre.

En réponse au choix des chemins empruntés, on parcourt des chemins plus délicats, plus fragiles aussi qui requièrent toute notre attention, notre émotion. La section rythmique offre encore de belles envolées où l’on peut se perdre, les yeux fermés à dodeliner de la tête, sourd au monde extérieur. La collaboration avec Nick de Kill the Thrill apporte son lot de trouvailles électroniques, discrètes qui soutiennent les morceaux. 

 

Sur le morceau éponyme, chaque note, chaque pièce de sample, chaque pattern s’imbriquent les unes aux autres, on touche un nouveau sommet, l’index tendu vers un univers imaginaire. Un autre chef d’œuvre ! « Narconaut » est un titre sobre, sombre qui puise dans les eaux rouillées du fleuve indus, une contenance faussement apaisante avant que le massif  « Falling » ne s’empare du reste de notre état conscient. Ils sont définitivement passés maître dans les ambiances les Dirge ! « Apogée » ne porte que très justement son titre.

 

Oui, on croise des univers familiers dans ce disque, en même temps, est-ce vraiment possible d’y échapper ? Elysian magnetic fields apparaît comme une pièce maîtresse d’un genre bien engorgé pour le moment. On entend les râles, les essoufflements des novices chahutés dans la course alors que Dirge, sans hâter le pas, nous apporte un grand bol d’air frais. Magistral

photo de Eric D-Toorop
le 20/07/2011

4 COMMENTAIRES

Pidji

Pidji le 20/07/2011 à 13:17:01

Excellent, encore une fois.

mat(taw)

mat(taw) le 21/07/2011 à 09:10:13

jamais de faute de goût non plus en terme de pochette ce groupe. y a bon

Wild Thing

Wild Thing le 03/08/2011 à 16:16:22

Superbe chronique pour un superbe album! Encore une preuve que les groupes français de qualité sont légion et méritent un peu plus de soutien.
ps: long live Pitshchifter!

Ukhan Kizmiaz

Ukhan Kizmiaz le 04/08/2011 à 15:30:58

W oo

Merci WT.

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