Festerday - Iihtallan

Chronique CD album (52:49)

chronique Festerday - Iihtallan

« Entre les deux mon cœur balance... »

 

Ils sont quelques-uns à avoir ainsi hésité, oscillant un temps entre les bras musculeux du Death Metal et les traits livides du Black. Comme Darkthrone qui, avant de rédiger le règlement intérieur de l'Inner Circle et de composer A Blaze in the Northern Sky, a sorti le très Swedeath-friendly Soulside Journey. Ou Benighted qui, avant d'imiter le cri du cochon dont on commence à faire des rillettes de son vivant, a démarré en courant tout nu dans les neiges du grand Nord. Pour les membres de Festerday, c'est un peu la même histoire. Sauf qu'ils n'ont jamais vraiment eu envie de faire de choix, sans pour autant vouloir tout mélanger dans les marmites Black/Death ou Death/Black. Ainsi, après avoir démarré en 1991 dans le Death craspec de salle d'autopsie (« Festerday » est un titre de Reek of Putrefaction, le premier Carcass), les Finlandais se sont dits que le Black sympho ce n'était pas plus mal. Ils ont alors décidé de prendre un patronyme plus approprié, et après avoir constaté que Georges Pernoud avait déjà déposé « Thalassa », ils se sont repliés sur ...and Oceans (enfin c'est ce que m'a raconté Xuaterc, qui connaît bien le sujet). Et puis la fièvre Electro/Indus se faisant de plus en plus brûlante, nos amis ont opté pour le sobriquet de Havoc Unit... Pour au final continuer leurs aventures de front au sein de ces trois entités distinctes mais parallèles.

 

… Et ça n'est pas plus mal, finalement, de vivre ainsi au grand jour sa schizophrénie, sans refouler telle ou telle composante de sa personnalité!

 

Avec Iihtallan, il est donc question de grumeaux, de barbaque et de furoncles. Mais s'il n'a pas oublié les thèmes cracra et l'acidité des vocaux de la bande à Jeff Walker (quoique les réminiscences que l'on trouve ici fassent plus penser à Necroticism qu'aux débuts Goregrind des Anglais), ce premier album boit à bien d'autres sources de pus. Le gras des guitares par exemple, et cette propension à recourir au D-beat primaire, évoquent clairement les débuts tumultueux de la scène scandinave voisine. Le groove putride, les décélérations occasionnelles et les humeurs visqueuses donnent à penser que le groupe se laisserait bien tenter par un jumelage finno-américain avec la bourgade où Chris Reifert (Autopsy, Abscess) traîne ses bottes. Et puis les « Huh! » caractéristiques que Kena Strömsholm laisse échapper à l'occasion – au début de « Gravelove » ou sur « Edible Excrement » – indiquent une tendresse certaine pour Tom G. Warrior.

 

Old schoooooooooooooooooooool, donc, pour le dire plus clairement.

 

Mais après trente ans à fêter l'oncle Fester (le groupe s'est créé peu avant le renversement des Ceausescu, eh oui), il ne faut pas trop compter à ce que cette bande de vieux baroudeurs reste sagement cantonnée dans son petit pré carré stylistique. C'est pourquoi ceux-ci s'offrent 3 minutes et demi à jouer à Amon Amarth le temps de la charge victorieuse « Vomiting Pestilence » (… ou plutôt à un Unleashed torse-poil sur le pont du drakkar, vu le gras des guitares). Sur « The Human Race Disgrace », oubliée la simplicité crasse du riffing dans la gadoue: à partir de 1:11 Festerday décide de se lancer dans le tortillon guitaristique pour fan de Voivod. A l'heure du cunni' (« Your Saliva My Vagina »), le groupe enfile ses 'tiags pour se promener du côté de Swansong et de la pédale HM-2 endeath'n'rollisée de Wolverine Blues. A la fin de « Tongues for Rotten Kisses », c'est un peu de mélancolie finnoise qui filtre, de celle que l'on peut entendre autour des 1000 lacs de leurs compatriotes d'Amorphis. Sur « Kill Your Truth », le groupe s'en va tâter du panzer dans le bac à sable de Hail of Bullets, tandis qu'il revisite le split Emperor/Enslaved le temps de « Let Me Entertain Your Entrails ». Bref, no-no-limit, chacun-fait-fait-fait-c'qui-lui-plaît-plaît-plaît, et ce plaisir de jouer aboutit à de vrais bons moments qui enflamment les entrailles, comme le punky et juteux « Control Not Your Soul », ou le groove hyper plombé de la fin de « Your Saliva My Vagina ».

 

Pourtant, même si on a objectivement pris du bon temps, à la fin de Iihtallan on a l'enthousiasme mi-figue, mi-raisin. Peut-être du fait de cette hétérogénéité relative. Peut-être parce que 53 minutes c'est un peu long pour ce genre d'exercice. Peut-être parce que l'intérêt d'une poignée de morceaux est très relatif (« Into the Void », « Gravelove »...), et que certains exercices de style n'amusent que le groupe. Car honnêtement, qui prend son pied sur le duo « Flowers of Bones » / « Flowers of Stone » – dont le but semble être de montrer qu'une idée de compo peut aboutir à un morceau blacky furax ou à du Stoner crado selon qu'on fait tels ou tels choix artistiques? Et quel fan de Death old school va apprécier, en fin de course, qu'on l'abandonne sur le trip chauve-souris sépia de « Let Me Entertain Your Entrails », et sa version plus-nécro-que-moi-tu-meurs « Let Me Entertain Your Entrails (Redux) »?

 

Alors il faut prendre Iihtallan pour ce qu'il est: un album de Death régressif et récréatif, fait sans prise de tête par des vétérans qui ont eu envie de sortir 5 minutes de leur Black Metal quotidien. Et ma foi, dans ce cadre, l'album tient carrément la route!

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: un peu de Carcass juvénile, des ralentissements buboniques, de la HM-2 gouleyante, des traces de corpse paints et de mélancolie finnoise, du punk, du champ de bataille, du marécage, de la chambre funéraire... Les vétérans de Festerday ne se sont privés de rien sur ce premier album sorti 30 ans après leurs fiévreux débuts.

photo de Cglaume
le 23/04/2019

1 COMMENTAIRE

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 23/04/2019 à 19:44:34

Sympathiques comme tout cet album même si ce sont un peu des traine savates.

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