Gory Blister - Art Bleeds

Chronique CD album (29:20)

chronique Gory Blister - Art Bleeds

En dehors des classiques pondus par les cadors du genre (cf. les 5 mousquetaires Death, Atheist, Nocturnus, Pestilence et Cynic), il n'existe pas des wagons et des wagons de véritables pépites portant l’étiquette « Technodeath ». Quelques généreux fournisseurs alternatifs ont certes contribué à allonger un peu la liste des incontournables – notamment Sadist, Theory in Practice, Gorod, Carcariass, ou encore Necrophagist si l’on accepte de revoir à la hausse la quantité de poils utilisés dans la confection de ces chefs d’œuvre de dentelle technique –, mais ça n'en fait toujours pas tant que ça au regard des brouettes de petits bijoux charriées par certains genres moins exigeants. A la mini-brochette de fins bretteurs de 2e génération ci-avant mentionnée, on peut se permettre d’ajouter un autre gang de la Botte: Gory Blister. Car si le Skymorphosis dont on vous parlait il y a quelques temps est très bon sans être exempt de défauts, son prédécesseur Art Bleeds s’approche de plus près de ce que l’on peut considérer comme un véritable coup de maître.

 

Bon, évacuons d'emblée les reproches justifiés qui séparent d’une fine membrane ce 1er skeud du statut pleinement mérité de tuerie légendaire… Primo (plutôt que « Et de 1 ». On est en Italie… Capice?), le registre dans lequel évolue le groupe est TRES marqué par les œuvres du Death post-Human, ce à quoi se rajoute une grosse louche de la fébrilité turbulente et criarde typique d'Atheist. C’est sûr: il est difficile de s’extirper de l’ombre des précurseurs. Néanmoins certains tics sont vraiment voyants (l’accélération à 0:35 sur « Anticlimax », le décollage d’hélico à 0:45 sur le morceau-titre, le break tortillonneux à 1:00 sur « Primordial Scenery »…). Secundo, l’intervention d’une chanteuse lyrique – mixée en avant avec le naturel d’une retouche Photoshop de Catherine Deneuve dans « Jeune & Jolie » – ruine la marche de l’album aussi efficacement qu’un coup de barre à mine dans les rotules, notamment lors de ces vibratos excessifs sur l’interlude « Mermaids Beloved ». Tertio, l’aptitude du groupe à enchaîner les virages soudains et les changements de décor à la vitesse du batteur au galop abime un peu le potentiel de certains titres (« Cognitive Sinergy » notamment) à devenir de véritables tubes, de ceux que Chuck Schuldiner réussissait à composer avec une apparente et déconcertante facilité.

 

Maintenant, une fois la blouse blanche du disséqueur de cheveux en 4 remisée au placard, Art Bleeds s’avère être une pure orgie d’huiles essentielles endorphiniennes. Rarement étalage de maestria métallique aura été aussi fluide, aussi rapide et – après avoir fait l’effort de s’être passé plusieurs fois la bête pour en apprivoiser les multiples subtilités – aussi lisible. « Primordial Scenery », « Art Bleeds », « Anticlimax », « A Gout From The Scar », « Comet… »: l’ambiance est cosmique, le réservoir à énergie pure déborde par tous les orifices, les arcs électriques fusent de toutes parts, le feu d’artifice n’est que bouquets finaux sur compositions florales plus définitives encore, les sprints sont fulgurants, les tiroirs sont pleins de recoins fractals… Mazette, on s'en prend plein les mirettes! Et cette impression d'ingurgiter un concentré de talent pur est encore renforcée par le fait que, loin de se perdre en inutiles ronds de jambes Progo-dandy, les morceaux crachent toute leur substance (… et il y en a!) en moins de 4 minutes.

 

Détail qui m’arrache encore quelques râles de plaisir supplémentaires: la liste des remerciements révèle que le groupe serait en plus fan du pape du Nawak qu’est John Zorn… Bravissimo les potos!

 

S’il peut paraître à première écoute un petit peu excessif, et collé d’un poil trop près aux basques de Tonton Chuck, ce 1er album de Gory Blister s’avère donc en fait très vite être de ces petites merveilles qui viennent parfois (... trop rarement!) s’ajouter à la liste de nos albums alambiqués de chevet. De l’Art, en effet, et saignant à souhait!

 

PS: ma version de l'album, issue des ateliers Sekhmet records, ne contient pas « Never Let Me Down », la reprise de Depeche Mode. C’est pourquoi je ne vous en causerai pas plus avant… (à noter qu'on ne la trouve pas non plus sur le Bandcamp du groupe)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: le mélange 85% Death / 15% Atheist proposé sur Art Bleeds est suffisamment fougueux et virtuose pour être classé dans la courte liste des disciples surdoués, plutôt que dans celle des clones gentils-mais-peu-utiles. Bref: grosse claque!

photo de Cglaume
le 07/05/2017

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