Korn - The serenity of suffering

Chronique CD album (49:00)

chronique Korn - The serenity of suffering

Que l'on soit fan ou pas du "genre" que les californiens ont lancés, il faut savoir reconnaître l'importance de cette bande sur toute une génération qui s'est ouverte au métal en commençant par le "néo".
D'ailleurs, l'histoire qui lie KoRn a ses aficionados est faite d'amour et de désamour. Des grands bonheurs, des déceptions, bref, tout ce qui fait d'un groupe un grand groupe populaire. Sauf qu'avec le temps, les "kids" des 90's ont délaissé les sacs Eastpak patchés pour porter les cartables de leurs gosses et les membres de KoRn commencent sans doute à avoir des soucis de prostate.

La maturité n'empêche pas les auditeurs les plus crédules de croire ce genre de déclaration de Jonathan Davis et Munky : "notre futur album sera un véritable retour aux sources".
Cette éternelle promesse, parfois foireuse peut être à double tranchant : 
-soit le groupe fait une copie évidemment ratée de ses meilleurs albums
-soit il tente de faire du neuf avec un peu de vieux.
 

A ce petit jeu, avec "Korn III: Remember Who You Are", le groupe avait remporté la palme de l'album passéiste médiocre avant de s'engouffrer dans la mode Dubstep avec "The path of totality". Un album déjà faiblard en 2011 devenu (en plus !) ringard en 2016.
Pourtant, en 2013, entre le retour de Head à la guitare et la sortie annoncée de "The paradigm shift", beaucoup espèraient revoir le groupe à son meilleur niveau. Un pétard mouillé. Enfin, presque, un souffle de renouveau semblait venir mais on pouvait y percevoir, avec quelques efforts, des qualités qui étaient depuis longtemps éteintes avec un léger coup d'oeil dans le rétro.
Pas de quoi faire bander, d'autant plus que le groupe propose l'année suivant une tournée pour les 20 ans de son album éponyme, histoire de contenter les fans de la première heure, de se faire un paquet de pognon sur une ère révolue...mais qui a su réveiller de vieux instincts.

Hormis David Silveria (définitivement out, qui est en conflit ouvert avec ses anciens copains), on retrouve sur "The serenity of suffering" la personnalité de chacun des membres originels : celle qui a aussi fait le succès du groupe. Une belle surprise que l'on doit à un son moderne et énorme. 
Un adjectif trop souvent galvaudé qui ne manque, cette fois, pas de sens quelque soient les conditions d'écoute. Mais c'est au casque que l'on perçoit toutes les finesses de ce son...et d'écriture.


Un production signée Nick Raskulinecz, qui n'est pas la moitié d'un trou de balle, et qui a orienté le groupe vers des sons rappelant la lourdeur d'"Untouchables" avec une touche résolument moderne.
Que l'on apprécie ou pas le travail de KoRn, la qualité de la prod', du mix, du mastering (de Josh Wilbur) est irréprochable. Chaque morceau met en valeur le bon instrument au bon moment, il offre plusieurs couches sonores (plus ou moins audibles mais toutes très équilibrées), installe une ambiance et donne encore plus de sens aux compos et aux paroles.

Car les efforts du groupe en la matière n'auront pas été vains. Nourri de ses précédentes expériences parfois loupées, KoRn s'est sacrément enrichi et trouve toujours le "petit truc" qui enjolive son titre. Une bidouille électro discrète ("Take me"), en fond, ou de manière plus classique un effet sur la guitare, du scratch à l'ancienne ("Insane", "Next in line") : il y a toujours quelque chose "en plus", mais jamais "en trop".
Pour résumer : le groupe maîtrise ce qu'il a tenté d'amadouer depuis trois albums.

 

Enfin, et ce n'est pas le moindre des faits : les membres sont de nouveau inspirés, semblent laisser transpirer un peu de plaisir dans cet album.
Plus un ressenti qu'une interprétation argumentée, cela explique peut-être que l'on retrouve simplement un album bien travaillé, cohérent de bout en bout qui fut plaisant à composer.

En fait, tout commence par la pochette, qui reprend les codes visuels de KoRn : l'enfance avec un paquet de trucs "malsains" (même si on a déjà vu bien pire entre ces pages). 
On retrouve d'ailleurs la peluche d'"Issues" un peu plus ridée, abîmée et dégueulasse qu'en 1999. Tout un symbole.
La suite, musicale, est surtout l'occasion pour le groupe de faire un véritable show.  

 

Pour la section rythmique, c'est bien simple : le batteur frappe fort, tape juste, et profite d'une vraie résonance, d'une belle présence, à l'instar de Fieldy plus discret, peut-être légèrement effacé par la multitude des autres sons et la puissance des guitares (cf. la suite). Il n'empêche qu'on retrouve le bassiste fidèle à lui-même, fidèle à son "son", à sa technique et donne sur bien des morceaux le relief ("Please come for me") et la rondeur ("Black is for the soul") qui manquaient aux précédents albums.

Difficile également de passer à côté des deux Ibanez qui ne sont pas loin de fendre les plaques tectoniques.
Elles sont inspirées, on reconnaît facilement la patte de Munky, un peu moins celle de Head, mais le résultat est à la fois, lourd et brutal pour du KoRn. Avec des sons rappelant encore l'époque "Issues"-"Untouchables", le duo se marie de nouveau parfaitement. Cela ne l'empêche pas de faire de la place au mélodique : un créneau dans lequel Davis* s'invite...avec pas mal de réussite.

 

Le véritable show, il est là : Davis tient une forme olympique, si bien que tout son registre y passe. Capable de pousser d'énormes cris, de jouer sur les crescendi, de faire de la place au mélo, il retrouve surtout ce jeu vocal habité...à l'ancienne. 
Cette petite comédie avait pas mal disparu, les derniers albums étant plus lisses au niveau du chant. Cette fois, dès "Insane", on retrouve des mimiques du passé qui manquaient...et à chaque titre, le chanteur trouve le moyen de caler le "petit truc" qui va marquer sa prestation.
Un grand coup de gueulard, une petite voix folle (la montée sur "Everything falls apart" en est même étourdissante), des échos, le rire scandé d'"Insane", les borborygmes de "Rotting in vain", l'association avec l'excellent feat de Corey Taylor (qui a retrouvé de la voix) ou tout simplement un chant mélo avec de belles lignes de chant : tout y passe...et tout est réussi.

 

Cela faisait donc longtemps que KoRn n'avait pas offert 50 aussi bonnes minutes...au point qu'il faille vraiment fouiller pour trouver les ratés. Mais, on a tendance à se focaliser, se trouver totalement happé par les bons points et le bon rythme maintenu durant les 13 pistes et une certaine force qui se dégage des morceaux.
Peut-être est-ce parce que l'on n'attendait plus grand chose de KoRn, habitué à nous décevoir, mais "The serenity of suffering" procure un premier bel effet de surprise et continue, au fil de ses écoutes, de délivrer ses petits secrets, ses effets, ses finesses derrière un gros mur musical. 

"The serenity of suffering" est sans doute la meilleure preuve qu'en apprenant de ses ratés et en s'appuyant sur ses forces, on peut remonter une pente qui semblait pourtant bien raide.

 

*[je ne peux pas cacher une certaine admiration pour Jonathan Davis, que je considère, malgré des choix artistiques parfois décevants, comme un des 10 meilleurs chanteurs de ces 30 dernières années dans la grande famille metal].

photo de Tookie
le 22/11/2016

5 COMMENTAIRES

pidji

pidji le 22/11/2016 à 09:18:17

Quoi ? Le nouveau Korn est bon ? Faut que je jette une oreille alors.

Eric D-Toorop

Eric D-Toorop le 22/11/2016 à 10:41:45

tu m'intrigues...

fuall

fuall le 26/11/2016 à 18:45:45

il est effectivement tres bon

gulo gulo

gulo gulo le 16/03/2018 à 06:57:02

Putain il est abominable, celui-là.

gulo gulo

gulo gulo le 11/09/2019 à 12:55:18

Erratum : il m'est fort sympathique, en vrai.

AJOUTER UN COMMENTAIRE

anonyme


évènements