Living Colour - Stain

Chronique CD album (44:56)

chronique Living Colour - Stain

Avec Stain, je vous parle d’un temps que les fans de Watain qui ont moins d’la vingtaine ne peu-vent pas connaiiii-treuh. Autrement dit de l’âge d’or du metal fusion, quand les Fishbone, Infectious Grooves, Mordred et autre Mucky Pup se voyaient déjà en haut de l’affi-cheuh (‘tain mais couché Aznavour à la fin!). Tellement d’or, cet âge, que certaines des têtes de pont du mouvement, comme le Groove Infectieux ou – puisque c’est eux qui nous intéressent aujourd’hui – Living Colour, avaient alors le droit aux yeux doux des majors. En ce qui concerne les new yorkais de la bande à Vernon Reid, c'est Epic (et donc Sony) qui avait mis le grappin sur leur déclinaison du genre, située en plein dans la frange du mouvement la plus imprégnée de black music. Mais là où Fishbone se faisait jazzy, là où Bad Brains tapait dans le reggae et le hardcore, là où Body Count versait dans le hiphop, Living Colour se situait plutôt dans une mouvance funk metal soft, pleine de groove et d'accroche – en un mot: cooooooool (ouaip, avec 8 'o', pas moins).

 

Sur ce 3e album – plutôt fraîchement reçu par la critique à sa sortie (prenons-en de la graine: le recul, il n’y a que ça de vrai pour écrire une bonne chronique) –, le groupe muscle quelque peu son propos en élevant d’un cran le niveau de metallitude. Et si le fond reste essentiellement constitué d'une fusion metal / funk dotée d’une grosse guitare et d’une basse bien dodue, dès qu’on se penche un peu plus attentivement sur ces 13 titres (agrémentés de 2 bonus sur l’édition qui sert de support à cette chronique), on y trouve bien d’autres éléments. Notamment un amour profond pour le rock psychédélique héritier des 60’s/70’s, gavé de substances illicites, d’étoiles colorées et de dépliants touristiques pour Kathmandu. C’est surtout Mr Reid qui semble vouer une admiration sans borne à J. Hendrix, et ses soli et autres interventions diverses sont autant d'occasions de cramer de la pédale à effet, tant il est prompt à partir dans des délires expérimentaux particulièrement colorés. A noter que sur certains passages (par exemple le ping pong cosmique animé par la basse à 3:10 sur « Go Away »), ce côté cool cosmico-psychédélique peut faire penser au Lenny Kravitz hippie de « Believe » & co.

 

Mais le groupe a bien d’autres cordes à sa basse, et sur « Ausländer », la fin de « Bi » ou encore « WTFF », on découvre un autre de ses visages, plus indus, gavé de samples mécaniques et de voix désincarnées. Par ailleurs sur « Postman », on se prend dans les esgourdes une musique extrêmement tendue, menaçante, sur laquelle Corey adopte pour l’occasion un timbre voisin du registre de Dave Mustaine. Mais à l’opposé, le groupe sait aussi nous faire de gros câlinous, se faisant tendrement mélancolique sur le doux mais superbe « Nothingness », cotonneux et invitant à l’abandon sur « Hemp », ou tout simplement chaleureux et grand sur « Leave it Alone ». Si leur présence sur une major les pousse parfois à écrire des tubes calibrés pour la radio (« Leave it Alone », « Never Satisfied », « Nothingness »), cela ne s’avère finalement pas trop préjudiciable à la qualité des morceaux, et ça n'empêche pas non plus nos loustics de contrebalancer ces accès d’over-accessibilité par des coups de sang plus virulents (par exemple sur « Mind Your Own Business » qui alterne fougue punk et gros metal bluesy & groovy, ou sur le furieux « This Little Pig »). Et puis quand on lui balance des merveilles comme l’über cool « Ignorance is Bliss » et sa groovitude décontractée, comme l’irrésistible « Mind Your Own Business » qui fait salement travailler les muscles de la nuque, comme « Ausländer » et son déhanché contre-nature mais grandiose, ou comme cette espèce de B.O. épique mais néanmoins relativement expérimentale qu'est « Wall », je ne vois pas de quoi se plaindrait le peuple, hein, franchement …!?

 

Pour faire simple, si vous aimez marquer la mesure en tapant fort du pied, si vous êtes à la fois cool comme Fonzy, metal comme Lemmy et funky comme Austin Powers, et si votre étagère « Fusion » présente des trous béants correspondant à de sévères impasses – qu’on va pardonner pour cette fois, allez, mais c’est la dernière hein ! – précipitez-vous sur Stain, album qui apportera du soleil et du moelleux au fond de vos tanières, cavernes et caveaux (et des perspectives nouvelles si vous vous laissez séduire par la philosophie de « Bi »:) ).

photo de Cglaume
le 09/01/2011

7 COMMENTAIRES

Tookie

Tookie le 27/05/2011 à 10:06:47

Je suis justement en pleine redécouverte de cet album ! Si je te suis parfaitement sur des titres tubesques à la "Leave it Alone", je trouve au contraire que cela les dessert un peu on a l'impression qu'ils auraient pu se retrouver sur une BO d'un film...de la fin des 80's...Alors aujourd'hui on s'en fout, mais à l'époque (j'étais trop jeune) je me demande si ça ne faisait pas un peu tâche... ?! (c'est une question, pas une affirmation!)

Je trouve là que c'est un petit défaut qu'ils n'ont pas sur la majorité des morceaux qui sont bien grooooooooove (avec 9 "o") et que ça fait du bien !

cglaume

cglaume le 27/05/2011 à 10:24:50

Bah en fait j'écris justement "Si leur présence sur une major les pousse parfois à écrire des tubes calibrés pour la radio ...cela ne s’avère finalement pas trop préjudiciable".

tube calibré, préjudiciable: c'est bien pour souligner que cela aurait a priori plutôt tendance à les desservir, en effet, comme tu le dis ...

Mais qu'ils s'en sortent quand même super bien ! ;) C'est la marque des grands !

Tookie

Tookie le 27/05/2011 à 10:49:15

Ha je n'avais pas compris cette tendance dans ce sens en te lisant ;)

cglaume

cglaume le 14/12/2023 à 22:29:50

Album interprété dans son intégralité ce soir à l’Alhambra. Meilleur concert de 2023, haut la main 🤘🤘

el gep

el gep le 14/12/2023 à 22:39:40

Oui mais le jeu de mots sur Watain, c'était quelque chose, quand-même...
Living Colour, à part le morceau ''Time's Up'' et quelques bribes ici et là, j'en retiens pas grand-chose... trop FM pour moi.
Même si je connais moins ce disque, le seul que je n'aie pas acheté d'ailleurs. (les autres disques sont restés chez ma mère, comme 90

el gep

el gep le 14/12/2023 à 22:41:18

comme 90 pour cent des disques des Red Hot) voulais-je écrire, putain de signe pourcentage qui passe pas dans le scommentaires!
(et pis j'ai bu deux 50cl de Goudale alors chuis bourré, fais pas bon de vieillir)

cglaume

cglaume le 14/12/2023 à 22:43:16

Tu devrais y jeter une oreille Gepetto : tu y trouverais plein de bonnes choses, j’en mets ma main au feu

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