Marilyn Manson - Antichrist Superstar

Chronique CD album (71:52)

chronique Marilyn Manson - Antichrist Superstar

 

*You built me up with your wishing hell
I didn't have to sell you
You threw your money in the pissing well
You do just what they tell you - « Antichrist Superstar »

 

C'est simple, c'est malin, sur fond de pattern décalquée de « We Will Rock You » de Queen ; il n'en faut pas plus pour marquer les esprits et devenir incontournable ! Pourtant... On va en avoir bien plus mon brave... oui, bien plus !

 

Tout commence avec Portrait of American Family (1994) qui voit la rencontre inaboutie entre David Bowie et Alice Cooper sur un fond de décor industriel, le mines sont tristes, les sourires trop blancs et cocaïnés. Certes l'ouvrage est lettré et convie Marlon Brando du DernierTango à Paris dans « Cake and Sodomy » ; David Lynch et Twin Peaks pour « Wrapped in Plastic » ; Roald Dahl et sa chocolaterie pour « Dope Hat » ; Charles Manson bien sûr « My Monkey » et Scoobydoo «Misery Machine ». Cela se voudrait méchant mais c'est déjà trop poli et formaté pour éveiller l'auditeur en descente de grunge qui voudrait faire le dur en costume néo.

 

Devant la réaction timide de l'objet, Interscope – label spécialisé dans les accompagnements de films et autre b.o bien senties dans les nineties – rengaine son enthousiasme. Pourtant, Brian Warner, le leader du combo, a pris le temps de construire quelque chose et il en pris en main par l'hyperactif du moment, Trent Reznor, très désireux de s'adresser au grand public.

Pour l'histoire, Interscope avait déjà hésité à sortir la plaque à cause de « My Monkey » qui contient des extraits de textes de Charles Manson.
Guns'n'Roses venait de sortir The Spaghetti Incident et leur reprise du gourou avait valu moult tour de bras d'avocats et un flot incongru de cash à déverser pour « l'ayant-droit ».

Finalement, le label force la sortie de Smell like Children – la carte de visite pour nous européens – qui est à la base un remix de « Dope Hat » mais flanqué d'une paire de reprises qui font encore référence aujourd'hui.

 

Octobre 1996. Antichrist Superstar sort à grands efforts clippés par Floria Sigismondi. Les films superbes qui accompagnent « Beautiful People » et « Tourniquet » reflètent l'oeuvre assez terrifiante qui nous attends dans l'heure de musique proposée.

 

L'album est découpé en trois chapitres :

  • The Hierophant qui dans le tarot fait référence à l'éducation et la religion ou l'inverse (anarchie, rejet des normes établies). Les sons des 4 premiers titres sont parasités, hachés, pour préfigurer le mouvement. On flirte avec le Néo-Metal fleurissant de l'époque pour les rythmes et dans le son des guitares.

  • Inauguration of the Worm qui concrétise le temps de 7 titres, la mue de Brian Warner en Marilyn Manson. Il est nu et se meut comme un ver avant d'entrer dans le costume du personnage de rock star. Tout ça est matérialisé par une partie plus affirmée, plus dissonante dans les titres, plus sombre aussi. On entend déjà le regret dans le drôle et inévitable « Wormboy » et son rythme déglingué, à bout de souffle.

  • Disintegrator rising referme le disque, en 5 (+ 1 caché) titres. L'auteur est devenu ce qu'il voulait, il en est dégouté par ceux qui l'ont poussés à devenir l'être... les mêmes qui le conspuaient lorsqu'il n'était rien. Persécution quand tu nous tiens. C'est Nietzsche qui est illustré en grand format et l'Amérique avide de Grand et de jetable qui y est dépeinte. Le son semble plus rugueux, plus imposant. Le terminus « Man that you fear » clôt le débat sur fond de claviers mélancoliques.

    À posteriori, on dira de Manson qu'il reprend pour lui le – I Hate myself and I want to die – de Cobain, mais en sublime la pensée le temps d'un album jusqu'auboutiste. Bien sûr avec le temps, on retient les clips terribles, l'odeur du souffre sur tout le disque, et perpétuellement, ce bon garçon qui se donne des airs de méchant. À y regarder de plus près, le Manson de 1996 offre une belle sincérité et une réflexion – universelle- sur notre contingence d'humain, nos envies, nos pulsions, nos débordements d'âme.

 

Grand disque et belle écriture surtout pour un album qui pourrait compléter une trilogie du malsain, initiée par Psalm 69 en 1992 et cadrée par The Downard Spiral en 1994. Trent Reznor, puisque l'on en parle, est présent sur tout le disque, ses précieux collaborateurs aussi de Rob Finck et Danny Lohner à Sean Beavan en passant par Chris Vrenna. Les guitares, la production, la batterie caoutchouctée. Tout N.I.N est dans ce disque.
Il serait malhonnête d'omettre le fond puissant, développé par Warner et sa clique Twiggy Ramirez (cette basse quand même), Daisy Berkowitz, Ginger Fish et Madonna Wayne Gacy ... rha ces blazes !
Malin, Manson dira que Antichrist Superstar est le final (tu m'étonnes) d'une trilogie qui démarre à rebours avec Holy Wood ... suivi de Mechanical Animals (l'autre VRAI grand disque du bonhomme).

 

 

 

 

 

 

Edit : Bob Dylan est sacré prix nobel de littérature en 2016. Curieux de voir la tronche de Warner en 2030 à la remise du prix.

photo de Eric D-Toorop
le 16/10/2016

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