Miam Monster Miam & les Loved Drones - Femme Plastique

Chronique CD album (44:04)

chronique Miam Monster Miam & les Loved Drones - Femme Plastique

Disque qui devrait faire débat, d’abord au sein de la rédaction de chez COREandCO – Qu’est-ce que tu ramènes là ? – ; beaucoup plus largement au sein de la confédération de l’européenne pop attitude. Oui, Femme Plastique est un disque pop. Un album qui, gageons-le, ne fera pas plaisir aux aficionados de sucreries jetables. Premier élément marquant, il n’y a aucune trace d’immédiateté dans ce disque. Aucune construction facile, prête à ingérer et à jeter. Si le but était de faire un album standardisé – pour tout le monde – c’est raté. Le single annonciateur « J’aurais ta peau », une collaboration avec Michel Moers de Telex, est le titre le moins réussi de toute la plaque, musicalement celui qui use le plus des poncifs propres au genre au point d’apparaître comme une parodie. Maso ? L’artiste a choisi durant tout l’été 2010 de le diffuser (sur sa page facebook, toujours très animée) sous 69 versions différentes. Dur au mal le bonhomme !

 

Deuxième élément, Femme Plastique n’est pas un album alambiqué, foisonnant dans des tuyaux gouteux en attente d’une réaction chimique parfaite. Oui, il entre dans le genre – trop ou pas assez pour certains. Exemple-type du disque casse-gueule, parfois bancal.  Il y entre par la grande porte et déboule sur le tapis rouge, l’autel des trouvailles en ligne de mire. Parce qu’il faut dire que dans le rôle du maître de cérémonie, un peu fou, passionné et débordant entouré de son équipe « killer » d’experts de la chose pop garage, Miam Monster Miam et ses Loved Drones se pose un peu là. Troisième enseignement, ça joue et ça joue juste et bien, un rictus de plaisir fumant et les yeux rougis de plaisir.  C’est vrai que nous n’avons pas à faire aux premiers venus. Femme Plastique est le 11e album de Benjamin Schoos sous son alter-égo (depuis 1992), artiste vitaminé, multi-instrumentiste, faiseur de disques, collagiste, illustrateur, et homme de radio. A son palmarès notamment, 14 plaques de plus en qualité de musicien-producteur, le tout depuis 1997.  Dans les dernières sorties la compilation PAN ! (chroniquée ici), devait nous mettre la puce à l’oreille.

Faisant suite à L’homme-libellule, parfaite déclinaison gainsbourienne aromatisé à l’AIR frais, cette sortie 2010 marque l’entrée de MMM dans le groove blanc des années 80 pour une bonne moitié du disque (et sa production) et, on ne se refait pas, des dérapages bien sentis sur la vague yéyé. Les 2 reprises illustrent parfaitement le propos. MMM est allé chercher des titres oubliés, un peu cultes, mais bien représentatifs. « Der Computer Nr 3 » - 1968, France Gall en pleine période post Eurovision- et « J’écoute une K7 de la vedette » - 1992, La Variété, groupe composé de gens de radios qui rendent hommage à la période new-wave qui s’achève – , on retrouve d’ailleurs Marc Morgan chez les Drones.

 

« A.rtificial R.adar T.urbulence »  qui ouvre la plaque apparaît comme un générique d’une série des années 80 (bien tiens), un surf cuivré du meilleur effet, ouverture parfaite pour le titre éponyme où l’on retrouve toutes les marottes du boss, fuzz, lèvres, seins, plastique, guitares « garage » le tout sous acides. Bon titre, entraînant qui pose le débat, dieu que nous sommes loin de cette variété qui nous vend les bienfaits des centres commerciaux sous des déluges de violons. « Le roi des paranos » nous renvoie étonnement, dans un registre plus rock,  vers l’ambiance de Marche à l’ombre (Renaud- 1980) en forme de vérité bien sentie. « Blues Automatik » avec la participation de Daniel Offerman (bassiste chez Girls In Hawaii, chanteur d'Hallo Kosmo) au chant, est un titre explosif qui marie brillamment Joan Jett et Kraftwerk sur fond de rap en allemand et harmonica bluesy chauffé à blanc. Un millésime et original en plus !  « J’aime la liberté » est dans sa conception la pop-song parfaite pour un des textes des plus sombres. Preuve que le chant en français et les mélodies catchy peuvent faire bon ménage.  « Je vois dans le noir », titre initialement proposé à Alain Chamfort repose sur une base-piano composée par le défunt Marc Moulin – autre personnalité protéiforme belge-. On y retient effectivement la patte mélodique, l’ambiance cabaret. Ah, il faut être belge, pour apprécier pleinement le turbulent « Charleroi 2035 », blues crépusculaire, onaniste et lysergique, qui dépeint sans concession les travers d’une ville décriée, bande-son géopolitique très représentative (à voir ici). Electro-bricolo 80’s sur fond de guitare saturée pour introduire « Le pseudonyme », tiens on retourne à Marche à l’ombre. Autre marotte de MMM, « Drôle d’époque pour les ventriloques » où Chucky revêt la fourrure synthétique de Tatayet! Enfin le terminus « Erotoman » où, dans un déluge typiquement floydien, MMM et ses Loved Drones humanisent l’univers des films érotiques des 70’s pour leur rendre hommage. Titre classieux et dirigé de main de maître par, on devine, un fin connaisseur.

 

Disque choral, on y retrouve Jacques Duvall, Marc Morgan, le vrombissant bassiste Pascal Scalp, l’égérie Marie-France, ou encore l’énigmatique Man from Uranus. Disque de potes, avant tout. Album véritablement à contre-courant des productions du genre. Sans temps mort, solide, construit sur des titres emballants ou parfois trop fades, un rien négligés. Disque intéressant, dans tous les cas, ne serait-ce par la vision iconoclaste qu’il donne du TC MATIC d’Arno 30 ans plus tard. 

 

 

 

Note : "Charleroi 2015" est rebaptisé "Charleroi 2035" après la réalisation du clip.

photo de Eric D-Toorop
le 11/12/2010

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