Mother's Finest - Goody 2 Shoes & The Filthy Beasts

Chronique CD album (48:10)

chronique Mother's Finest - Goody 2 Shoes & The Filthy Beasts

Mother's Finest est le tout premier groupe à avoir métissé le hard rock avec du funk et de la soul. Et ça ne date pas d'hier puisque le combo a dépassé aujourd'hui – et largement – la barre des quarante ans de carrière. Quand je les écoute, je ne peux pas m'empêcher de faire un parallèle avec l'acid jazz. Car finalement, ce style métissé qui brasse de tout sans ressembler à rien est exactement la même chose au rock que ce que l'acid jazz est au jazz : on l'a foutu là parce qu'on ne savait pas vraiment où le mettre, ce qui le rend bâtard et très chapellisé, cantonné à un public à l'oreille ouverte et relativement restreint. Parce que si hard rock sont indubitablement les guitares de Mother's Finest, ça va bien plus loin, difficile de n'en retenir que ça. Les plus fermés d'esprit ont déjà claqué la porte. Les plus racistes ont également déjà vociféré leur haine contre ce groupe black & white, configuration plutôt singulière à l'époque, d'autant plus dans une nation si séparatiste que le sont les Etats-Unis. Les autres ont accueilli à bras ouvert cette effusion concentrée de groove qui fait dandiner les petits culs. Et parmi ceux-là, nul doute qu'en grandissant et devenant eux-mêmes musiciens, ils ont pris exemple sur leurs aînés. Un groupe comme les Red Hot Chili Peppers par exemple ne pourra le nier. En cela, Mother's Finest, même s'il reste injustement méconnu et boudé malgré tout ce qu'il a apporté – en particulier dans les années 70 – a laissé un très fort héritage, peut-être bien plus important qu'on ne pourrait le croire.

 

Si j'avais parlé d'acid jazz dans l'introduction, ce n'est pas pour rien : je trouve en ce dernier-né des Mother's Finest, intitulé Goody 2 Shoes & The Filthy Beasts, quelques similarités avec l'opus le plus récent des Brand New Heavies, Forward, sorti en 2013. Bien entendu, les deux sujets opèrent dans des styles bien différents. Et pourtant, rien que le contexte n'est pas si éloignée : les deux combos s'octroient des statuts de pionniers dans leurs domaines respectifs. Les deux restent injustement confidentiels de par l'audace de leur métissage musical, à la fois impromptue et accessible. Et sans doute également le mixage entre chocolat noir et blanc au sein de la bande. C'est con mais l'émission Tracks d'Arte avait offert une petite tribune à Mother's Finest où sa frontwoman Joyce « Baby Jean » Kennedy sortait, telle une voix de la raison que « le racisme change tout le temps de visage, il ne disparaît jamais ». Constat réel et tristement injuste car chacun sait qu'un black n'est qu'un blanc badigeonné de charbon comme un autre... Mais ça, dans les années 70 et 80, les esprits primaires s'en foutaient royal.

 

Autre similarité notable : le fait que les deux groupes en question nous ponde un nouvel album après un long break d'un peu plus d'une décennie. Un solide argument pour tomber dans l'oubli pour les uns. Un véritable messie inespéré pour les autres. Même si pour le cas des Mother's Finest, c'était peut-être un peu plus prévisible dans le sens où ce sont les moyens financiers des fans qui ont permis au groupe de faire un nouvel opus et la tournée qui va avec. Des fans qui auront tout intérêt à être nostalgiques car les plus jeunes et étroits pourront se vanter de tout le caractère ringard qui peut ressortir de Goody 2 Shoes... . Une musique qui sort d'un autre temps, le tout proposé avec une production à peine modernisée. Même si la recette accuse du coup en terme de vieillesse discutable, il faut admettre pour autant qu'elle se reluit d'un certain charme... Désuet certes, mais charmant. Et là dessus, c'est également et exactement le même constat qu'on pourra en retirer du Forward des Brand New Heavies dans son style. Ajoutez à cela le fait que les deux disques montrent leur visage le plus accrocheur à partir de la mi-route, après un démarrage un peu timide et moins marquant et on aura plus ou moins fait le tour de tous les parallèles entre ces deux tranches musicales.

 

Même si ça me plairait pas mal de continuer dans ces pentes savonneuses du parallélisme, on va quand même se recentrer sur le sujet. Notez tout de même que vous vous êtes pris l'équivalent d'un Boursin en portion d'une chronique d'acid jazz. Oui, sur Core And Co. Fourbe je suis. Mais revenons à des guitares plus affûtées et plus à propos dans ces colonnes. Goody 2 Shoes..., c'est une base hard rock très 80's sur lequel on a imposé un groove bien funky. Le tout avec la voix de panthère de Baby Jean, aussi puissante que black & soul, entrecoupé des vocaux masculins plus bluesy de Glenn « Doc » Murder, autre co-fondateur du groupe avec sa complice de gorge. Honnêtement, sur le papier, le combo nous a peut-être déjà montré toute l'audace et son savoir-faire en la matière tout le long de sa longue carrière. Et ce n'est clairement pas avec ce nouveau-né qu'il réinvente la poudre. Dans la pratique, en revanche, si le côté désuet du charme ne rebute pas, il faut admettre que ça claque pas mal. Car sans rien révolutionner, Mother's Finest nous livre un album honnête et passionné. De la musique qu'il aime. Et qu'il a lui-même inventé de toute manière. Au final, Mother's Finest se la joue à la Motörhead dans son domaine respectif : il ressasse continuellement la même recette qu'il a créée et par conséquent maîtrise sur le bout des doigts. Et après une telle longévité dans le monde musical, il n'a sans doute plus grand-chose à prouver. Goody 2 Shoes... nous montre donc un groupe bien dans ses baskets, sans complexes aucun. Pas grand-chose à pointer du doigt dans le domaine pur de la composition, juste à s'en délecter et se laisser envahir par ce groove communicatif et contagieux. Qui nous plaît de retrouver aussi efficacement alors que les rides s'accumulent sur les visages des protagonistes.

 

Ce vilain groove qui te fait tortiller du cul dans ta maisonnée, le manche à balai et de l'aspirateur en main, pris d'une motivation et énergie nouvelle dans le mode Conchita que chaque être normalement constitué veut éviter comme la peste mais se doit de respecter un minimum s'il veut éviter de vivre dans une porcherie. Tout ça sous l’œil médusé des voisins qui ne comprennent décemment pas pourquoi une telle cérémonie. Après tout, c'est ringard comme truc, on est loin d'une Louane. Rien à battre puisque rien que des hymnes catchy tels « My Badd » ou encore « All Of My Life » lui envoient un sacré balai à s'enfoncer au creux des fesses à cette blondasse. Et ça, c'est un truc de vrais que seuls les vrais peuvent comprendre.

photo de Margoth
le 11/03/2016

3 COMMENTAIRES

cglaume

cglaume le 11/03/2016 à 12:48:16

Grosse impasse pour moi Mother's Finest... Arf, ça commence à en faire bcp !

Margoth

Margoth le 11/03/2016 à 23:39:48

Comment ça ? Impasse sur le fait que tu l'ai loupé/connaisses pas ? Ou que ça te sort tout simplement pour les oreilles ?

cglaume

cglaume le 11/03/2016 à 23:55:51

Que je l'aie loupé...

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