Ommatidia - Let's Face It

Chronique CD album (48:36)

chronique Ommatidia - Let's Face It

De l'incinération de The Old Dead Tree a résulté sur deux tas de cendres. D'un côté, Arkan par l'initiative du batteur Foued Moukid, renforcé par l'incursion récent du vocaliste Manuel Munoz, dont on vous a déjà bien assez parlé dans ces colonnes avec autant d'amour, de haine que de sentiments plus aigres-doux. On parle en revanche bien moins de l'autre entité fondée par le guitariste Nicolas Chevrollier, Ommatidia, qui a su prendre un peu plus son temps avant de véritablement montrer le bout de son nez auprès du grand public. Bien loin des sonorités arabisantes de ses confrères, le gratteux ne tombe pas pour autant dans le travers de nous pondre une resucée de son ancien groupe et préfère officier sous un jour plus gothique prenant comme modèle des Paradise Lost, Katatonia ou encore le côté plus atmosphérique de Moonspell. Malheureusement, si son premier méfait, In This Life, Or The Next, se pourvoie des services de Season Of Mist, le combo ne parvient pas forcément à récolter autant de bons mots que la formation de son ex-collègue. Et pour cause, même si ce premier méfait n'est pas non plus une mouche à merde, on pourra lui reprocher quelques candeurs gênantes : une tendance à s'éparpiller un peu et de voleter un peu trop derrière les fesses de Paradise Lost sans parvenir forcément à s'y émanciper. S'ensuit quatre années de gestation dans son petit cocon, sans aucun label dans les pattes, pour nous livrer son successeur, Let's Face It, sujet du jour, avant de s'en retourner suite à l'abandon de poste de deux de ses membres en état d'hibernation à durée indéterminée.

 

Une durée d'incubation un peu au-dessus de la moyenne actuelle qui a fait pas mal de bien à Ommatidia pour tout dire. Même si le combo enclenche pas mal la pédale douce sur Let's Face It, préférant privilégier la mélancolie mélodique quitte à lorgner du côté cold rock, il arrive grâce à ce biais de s'éloigner de l'influence mal digérée de Paradise Lost. Peu de growl, peu de moments électriques vénères, on peut le rapprocher davantage au groupe originel de son vocaliste Guillaume Richard, Dustbowl, version un chouïa plus couillue, plus achalandée en terme de toile de fond instrumentale et amputée de toute sonorités électroniques. Si la jaquette montre cette fameuse mouche cramée par la chaleur d'une ampoule, on pourra davantage usiter de l'image de l'insecte pris au piège dans une toile d'araignée afin de parler de ce second album. A comprendre que la toile rapporterait davantage à tout le boulot abattu afin de gagner en personnalité et passer un pallier supplémentaire dans la quête d'aboutissement. Et le « tragique » destin – avec de gros guillemets, on sait tous que personne n'en a rien à foutre de ces bestioles, pas même le plus chevronné des militants végans – de la mouche, le côté plutôt dark/mélancolique des thématiques et ambiance globale qui règnent.

 

Cette toile est d'ailleurs très bien tricotée. Et c'est d'ailleurs sur ce point qu'Ommatidia se montre le plus intéressant. Let's Face It a beau s'avérer plutôt homogène dans son ensemble, à l'exception de rares moments donnant envie d'appuyer sur la touche repeat (« Antigonism » et ses lignes mélodiques et vocales rappelant un peu quelques moments doucereux de Korn sans sous-accordage, « Sunspot » et son riff et refrain bien cools, la montées/descentes de puissance de « Coming Full Circle Part 3 », légèrement prog dans la construction), le paquet s'avère solide et bien ficelé. Un son excellent, tout en pureté cristalline, sublimant toutes les subtilités atmosphériques, intensités et de tricotage de gratte jouant sur le double-terrain du riffing puissant et des arpèges aériens semi-acoustiques. Ne jouant quasiment jamais sur la brutalité, aussi sombre peut être le fond et le propos de Let's Face It, on ne sentira jamais réellement de déchirement intense et dépressif s'en émaner, davantage une étrange forme d'alanguissement paisible, telle une masse sombre et éthérée te bouffant lentement sans t'empêcher toutefois de te lever le matin et vivre ta vie comme si de rien n'était sans que personne ne se doute d'un quelconque mal.

 

En revanche, l'aspect vocal vient quelque peu obscurcir le tableau. Pas forcément désagréable de timbre, il finira malheureusement sur ces presque cinquante minutes à montrer ses failles et ses limites : bien que sachant se montrer nuancé, il est bien trop peu renouvelé et présente très vite les mêmes schémas. Des tics sur tics qui donnent parfois une impression gênante et ponctuelle de linéarité – qu'on en décrocherait presque sur des durées plus ou moins ponctuelles – et empêche malheureusement à Let's Face It de se hisser à un niveau supérieur. Certes, ça le laisse dans l'enviable position du bon mais pas forcément exceptionnel ni même foncièrement original.

photo de Margoth
le 01/06/2018

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