Pryapisme - Rococo Holocaust

Chronique CD album (48:52)

chronique Pryapisme - Rococo Holocaust

Non, cette chronique n'est pas le début d'un fructueux partenariat publicitaire entre Core&Co et Sheba. Cette recherche esthétique décalée, ces clairs-obscurs félins, ce sombre velours serti de rose bonbon (là il faudra me faire confiance, parce que forcément il est assez dur de voir la tranche du digibook depuis la cover vue de face …), cette promesse de caresses ronronnantes n'excluant pas un bon vieux coup de griffes mal placé, c'est tout un programme relativement représentatif de ce que Pryapisme vous réserve sur « Rococo Holocaust ». D'ailleurs le titre de l'album, bien que formulant les choses différemment, vous donne un aperçu tout aussi juste de ce qui vous attend: bienvenue les aminches au spectacle de l’annihilation des conventions grotesques du metal traditionnel. Tout cela sans que le slogan du traiteur pour chats évoqué en début de chronique ne perde en pertinence, car vous avouerez que Pryapisme, pour dire je t'aime, c'est pas mal non plus. 

 

Vous l'aurez deviné – ou tout au moins c'est en passe d'arriver incessamment sous peu: Pryapisme fait dans le kaléidoscope musical et l'humour pince sans rire. Mais afin de ne pas vous laisser sombrer dans les eaux troubles de l'incertitude, allumons les phares de quelques références bien parlantes qui vous indiqueront grosso modo le chemin suivi par ce jeune (mais existant depuis 10 ans quand même …) groupe auvergnat. Ces chantres de l'abolition des étiquettes naviguent donc entre les côtes instrumentales du dernier Estradasphere (« Palace of Mirrors »), et le littoral expérimental d'Anthurus d'Archer, en empruntant toutefois une route un peu plus accessible et plus metal que les deux formations citées ci-dessus. Plus sobre que les théâtraux Sebkah-Chott, mais moins orienté chanson que Vladimir Bozar 'n' Ze Sheraf OrkestärPryapisme semble également inspiré par Mr Bungle (incontournable dans le créneau), période « Disco Volante » plutôt que « California ». Ce fastidieux gymkhana descriptif à présent terminé, que retenir de la musique de Pryapisme? Elle est, en quelques mots: instrumentale, expérimentale, mais toujours ancrée dans le metal. Deux garanties pour cette dernière affirmation: un morceau sur deux contient – même sporadiquement – du blast (oui bon: on a les métriques qu'on peut hein …), et le groupe a participé en 2008 a un tribute album rendant hommage à Ulver. Donc certes, si vous ne jurez que par le décibel grumeleux, Pryapisme pourrait bien vous restez en travers de la gorge (en même temps on ne joue pas à l'avaleur de sabre avec un groupe ayant un tel pseudo), mais si la garantie d'un fil rouge métallique est susceptible de vous décider à tenter cette aventure en territoire non conventionnel, alors go!, allez-y les yeux fermés et les esgourdes grandes ouvertes.

 

Et de quelles armes le groupe use-t-il donc vous demandez-vous peut-être? Eh bien, en plus de la panoplie classique du groupe de rock élevé au jus de houblon, les rigides du membre intègrent parmi les acteurs de premier plan de leur spectacle musical un synthé/piano/orgue/clavecin – 'fin bref, vous savez ce truc qui ressemble à un échiquier tout en longueur – ainsi qu'un violoncelle, plus discret mais-quand-même. Après, sans non plus singer Sleepytime Gorilla Museum, le groupe fait feu musical de tout bois et se laisse aller à tâter de la clarinette basse, du xylophone, de l'accordéon … Et puis des machines aussi. C'est en effet assez régulièrement qu'une sorte d'électro soft vient s'ébattre au beau milieu de la musique du groupe, distordant certaines lignes classiques (la contrebasse fantomatique de "Suppozitorium"), voire en rajoutant une couche dans la violence, à tel point que vers 1:18 sur "Darkness Lobotomy Insurrection", on pourrait subrepticement croire que Whourkr s'est invité dans la danse. Quand la musique n'évolue pas dans le velours jazzy, le death/black véloce, le velouté classique ou un mélange des trois relevé de savants bidibips, on se retrouve entrainé dans de la disco kitschos, du générique de dessin animé, une fête foraine, du reggae, du calypso, de la BO de film muet, du mathcore, de la guitare made in Carlos Santana, une ménagerie grotesque … et on va s'arrêter là parce qu'il faudrait vous décrire les morceaux minute par minute pour être exhaustif. J'évoquerai quand même quelques-uns des passages qui me font le plus triper (même si le top 5 change sans cesse): à écouter donc, le superbe mélange de beats techno et d'une lead black mélodique à 4:10 sur "En Ce Qui Concerne...",  ainsi que ce duo piano rock / gratte distordue à 2:24 sur "Copaing, Le Fuligule Miloin". Le black thrashy mais mélodique de "Darkness Lobotomy Insurrection" accompagné par Charlie Oleg, et légèrement revisité à la sauce Igorrr, aura de quoi ravir les oreilles des plus furieux, mais sans doute pas autant que le carnage blast-musette à 4:34 sur "Quenelle Quenelle Fourrure", qui est à mon sens la manifestation la plus parlante de cette holocauste rococo annoncée. Je terminerai enfin sur la dernière minute et demie du "Doryphone De Kafka", archétype du passage « bigger than life » comme disent les yankees, mêlant piano émo, mouettes et une magnifique guitare lead sur fond de couple basse/piano mutin.

 

Allez, on mentionnera tout de même deux petits défauts qui expliqueront que mon enthousiasme soit resté bloqué sur la barre des 8/10. Tout d'abord, l'album finit sur une "Truffade" qui est de loin le plus « rebrousse-poil », le plus lancinant, bref le moins flamboyant des morceaux de l'album, et la pirouette féline finale de "Coherence Croquette" ne permet pas franchement de rattraper le coup. On aurait préféré finir sur une bonne vieille Jack' Fess' libératrice comme diraient les amateurs de bukkake... L'autre point – qui dérangera sans doute moins les amateurs hardcore de nawak metal –, c'est que bien que « Rococo Holocaust » coule tout seul, fluide et subtile, sans nous laisser sur le bord de la route (enfin, il vous faudra quelques écoutes pour en arriver là quand même …), il n'est pas de ces albums qu'on se remet par amour pour tel ou tel titre, ni de ceux dont on sifflote un morceau sous la douche. Bref, il est moins facile, moins « pop » qu'un « Universal Sprache », un « California » ou un « 342 ».

 

Mais malgré ces quelques réserves, il ne fait aucun doute que l'album finira en bonne position dans mon top 3 des bonnes surprises de l'année. Dans la lancée des Carnival In Coal et de toute la relativement jeune scène de ces groupes frapadingues qui conjuguent metal avec "pas banal", Pryapisme en rajoute une couche de qualité supérieure, continuant dans la dynamique actuelle qui fait de la France l'une des nouvelles Mecques mondiales du metal barré. On ne peut que s'en réjouir et espérer que le public suive …!  

photo de Cglaume
le 13/10/2010

6 COMMENTAIRES

ukhan kizmiaz

ukhan kizmiaz le 13/10/2010 à 09:41:11

Quelle Chronique ! ça donne envie. ;-)

cglaume

cglaume le 13/10/2010 à 10:47:18

Et c'est rien comparé à la musique ! :)

mat(taw)

mat(taw) le 13/10/2010 à 10:53:35

pochette aussi classe que le nom du groupe. c'est raccord.

vkng jzz

vkng jzz le 13/10/2010 à 11:18:27

mais pu-tain quoi oO

Pedral

Pedral le 13/10/2010 à 15:59:09

Ca déboite sa grand-mère! Ca fait un moment que j'ai la chance de l'avoir et j'espère qu'on finira par faire une date ensemble! Je crois qu'ils sont bien couillons ces gars là!
Désolé, je ne mets pas de note mais je dis juste" acheter le!!!!!!!" Ca fracule!

General Hydargos

General Hydargos le 08/11/2010 à 21:13:21

Mais putain qu'il est bien bordel cet album, je me prends une claque à chaque fois qu'il se propage dans mes oreilles. Bravo, c'est tout. Et 10/10 pour le boulot.

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