Sebkha-chott - CRPTS ND TPSTRZ

Chronique CD album (46:18)

chronique Sebkha-chott - CRPTS ND TPSTRZ

Quelque temps après la sortie de The Ne[XXX]t Epilog – ce quelque temps-là devant, de mémoire, se compter en mois, aux alentours du nombre syndical séparant habituellement les sorties N et N+1 – Wladimir Ohrelianov II, le Grand Mogul assis sur le trône de Sebkha-Chott, s’en était revenu sur Terre pour annoncer l’arrivée imminente d’un Concerto pour Otto-Tamponeuses et Orchestre de chambre de passe. Même qu’il nous avait alors invité à verser notre obole à l’Association des Orphelins de la Gendarmerie Ohrelandaise afin de contribuer à l’accouchement de cette nouvelle exégèse de la pensée Chottienne. Et puis plus rien, silence radio, fermeture de la faille spatio-temporelle autrefois ouverte entre nos 2 mondes, tristesse beaucoup, amertume un peu: la tribu bigarrée qui avait déversé sur le monde 4 albums aussi insaisissables qu’indispensables avait manifestement disparu dans les confins inter-galaxatifs sans nous dire Ciao ni nous claquer la bise.

 

Rhaaa que c’était rageant! Sans compter qu’on aurait pu s’acheter un inédit de Zappa ou de Zorn avec l’argent perdu dans cette précommande prématurément périmée…

 

La fin des haricots-hrélandais semblait d’autant plus inéluctable que sur un canal parallèle nous étaient arrivés les signaux de vie d’une nouvelle entité, Plagiat, dont le « {t]rap in opposition », l’univers et le ton laissaient à penser que les deux formations partageaient les mêmes esprits malades.

 

« Wladimir, Wladimir, pourquoi m’as-tu abandonné? »

 

Sauf que l’évier du tyran sont impénétrables (un X au pluriel, non?). Et voilà-t-y pas le Krou Sebkha-Chott de retour en 2019 pour nous le proposer enfin, ce 5e opus plein d’autos tamponneuses, dont le titre signifie en fait, une fois les voyelles rapatriées en leur initiale position, Carpets and Tapestries – sans doute en référence aux « Tapisseries Fines » du sous-titre de Nigla[h]. Hosanna au plus haut de l’essieu! Sauf que… Arf, cet élan d’allégresse se voit prestement douché par une mauvaise nouvelle: non content d’être un nouveau chapitre dans l’Encyclopédie Ohrélandaise, CRPTS ND TPSTRZ en est également le dernier. Il clôt l’œuvre, fait office de mausolée musical, agite une dernière fois les jolis foulards et tous les madras, pour finalement balancer une dernière pelletée de Terre sur le cercueil de Wladimir Ohrelianov II. Adieu l’Emile, je t’aimais bien.

 

C’est donc avec un mélange d’excitation et de nostalgie précoce que l’on découvre ces 6 nouveaux titres, cette fois découpés en 30 paragraphes portant chacun le nom d’une maladie ou d’une situation inconfortable que l’on souhaite plus à ce saligaud d’adjudant-chef qu’à notre petite sœur. Stylistiquement on reste dans la droite lignée de The Ne[XXX]t Epilog, autrement dit dans un génial salmigondis avant-gardiste mélangeant mélopées de par là-bas (plus ou moins loin, vers l’Est), ondulations psychotropes, élucubrations dadaïstes, beats onctueux, caresses mécaniques, à la croisée de Magma, Sleepytime Gorilla Museum et Secret Chiefs 3, la chose évoquant aussi bien les univers de Mandryka, Druillet que F’murr – parce que oui, ce type de zic’, ça donne aussi des envies de comparaisons avec le monde de la BD. S’il fallait toutefois nuancer le parallèle avec l’opus d’avant, on ajouterait que cet acte final voit un léger recul de la composante Indus/Electro – disons ça à défaut d’autre chose – qui constituait la nouveauté de la cuvée 2012.

 

Et le lien avec l’acte IV ne se contente pas d’être dans l’oreille du chroniqueur. Car tout comme Sebkha-Chott avait déjà tiré un trait d'union entre The Ne[XXX]t Epilog et son prédécesseur en le citant explicitement au sein de la tracklist et en y revisitant « Sabra Y Shatila », cette fois encore les liens avec le petit précédent sont solidement matérialisés. Via ce retour de la variation maladive autour du thème d’Inspecteur Gadget qui tapisse ici le fond de « Décollement de la Plèvre », et qui figurait déjà à l’époque dès le début de « Your Soul ». Mais aussi via une nouvelle séance d’aérobitch menée par Yulä à la fin de « God Save The Queer », ainsi que via un passage nawak tout d’onomatopées rempli (« Ah non, pas nanarb! »), au début de ce même morceau, celui-ci clignant méchamment de l’œil vers l’interrogatoire nawako-musclé mené sur « Biphallo Soldier ».

 

Tous les gimmicks qui font que Sebkha-Chott est Sebkha-Chott sont donc là, discours méga[rigo]lo, mythologie bigarrée, laisser-aller Hip-hop (« One shot cumshot! »), trips baroques, trouvailles géniales (les vives psalmodies tribales, à 3:36 sur « Coliques Néphrétiques », entonnées avec une voix qui rappelle au lapin que je suis le chant clair sur le premier Fear Factory. La prière oniricorientale chamanique servant de décor aux élucubrations cartooneques du début de « God Save The Queer »…), plus quelques bouffonneries inattendues, comme la comptine médiévale « Bru In Jericho », ou la mélodie du « Petit Bonhomme en Mousse » qui vient s’immiscer sournoisement sur « Lymphome ». Et on retrouve cette fois encore avec plaisir le packaging en origami conçu sur l’album précédent. « Tous les gimmicks » par contre, cela inclut également ces échardes qui, à intervalles réguliers, viennent rendre le voyage inconfortable: stridences vicieuses, déhanchés rythmiques contre-nature, longueurs… Mais comme les fois précédentes, on adhère, malgré ces obstacles mis sur notre route. Sauf que sur les 2 derniers morceaux (pour quasiment une demi-heure!), ces expérimentations hostiles commencent à devenir relativement peu digestes. C’est bruitiste, éprouvant… Et ça finit par foutre les nerfs en pelote. Ce qui – outre le fait d’être un peu dommage au moment des au revoir – explique le pourquoi de cette note un peu inférieure aux précédentes.

 

C’est donc le nez morveux, l’œil rouge et la démarche titubante que l’on se joint à la procession funèbre CRPTS ND TPSTRZ, à la fois heureux d’avoir ce rab de Nawak metal expérimental définitivement à part, mais également triste de savoir que l’aventure s’arrête officiellement là. Sauf que sur Ohreland on n’a que faire des conventions – sociales, temporelles, logiques, scientifiques, musicales … On se rattache donc à cet espoir que, là-bas, le mot FIN n’a pas vraiment le même sens qu’ici.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: « Voilà, c’est fini ». Non, ce n’est pas du Jean-Louis Aubert, mais du Sebkha-Chott. Terminés Ohreland, le Mekanik Dubstep Forain et les parties de jambes en l’air avec Yüla Slipobitch... Snif! Cet acte V sera donc l’acte final – tomber de rideau! Mais après tout, positivons: ce dernier tour de piste nous permet de nous envoyer une dernière lampée de Metal nawako-avant-gardiste et de prolonger ainsi ce mélange improbable des univers de Magma, Sleepytime Gorilla Museum et Secret Chiefs 3 tel que le groupe le pratiquait déjà sur The Ne[XXX]t Epilog. Du coup la larmichette se voit contrebalancée par un radieux sourire à la Joker – histoire de rester dans l’esprit.

photo de Cglaume
le 01/10/2019

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