Sebkha-chott - The Ne[XXX]t Epilog

Chronique CD album (76:21)

chronique Sebkha-chott - The Ne[XXX]t Epilog

Peu de personnes sont au courant, et pourtant: il existe une réalité parallèle à la nôtre. Pas l’une de ces élucubrations SF-isantes pour fans d’anticipation peu exigeants, non: un vrai univers parallèle, abritant une population bigarrée vivotant sous le joug d’un despote décadent, mégalo et cartoonesque. Ce monde, c’est Ohreland. Ce tyran, c’est Wladimir Ohrelianov II. Very Dick. Et il se trouve qu’un passage s’est ouvert entre notre chez nous et leur chez eux, quelque-part au Mans, entre la cathédrale, le quartier des Sablons et la maison de Madame Paulette. Eh oui, on nage en plein "Stargate en Sarthe", je n'vous l'fais pas dire...

 

Il faut savoir que ce monde a peu de chose à voir avec le nôtre, notamment en matière d’expression musicale. Il faut d’ailleurs toute l’endurance du vieux routard ayant traîné ses oreilles de par les contrées les plus soniquement fantasques de la planète pour pouvoir se frotter à ces exubérantes élucubrations sans partir vaincu d’avance… C’est que cette 4e tentative (ne comptons De l’Existence… et De la Persistence… que comme un seul et même album) de communiquer avec notre espèce s’éloigne plus que jamais des standards esthétiques usuels. Aussi proche du théâtre dadaïste ou du slam poético-cubiste que de la musique à proprement parler, The Ne[XXX]t Epilog empaquette ses divagations sonores dans un mélange de metal indus noisy, d’électro dubement sombre et de fusion au saxo désaxé, le tout avançant au rythme des divagations autocratiques de son dandy de despote éclairé. Vous quémandez quelques références auxquelles vous raccrocher? Soit, mais l'entreprise va forcément être un peu artificielle… Disons que si vous imaginez un savant fou qui tenterait des croisements entre les projets les plus branques de Trey Spruance, les décalages acrobatiques de Sleepytime Gorilla Museum, les expérimentations d’Anthurus d’Archer et le spatio-funk kitch de Chrome Hoof, auxquels il injecterait quelques shoots de bidibip furieux à la Phantomsmasher, ça pourra vous donner une idée. M’enfin relative l’idée…

 

Bon là normalement, si vous avez bien lu et que vous connaissez déjà un peu la bête, vous êtes choqués… Si si, forcément vous êtes choqués par la mention de cette touche indus/noise/électro qui n’apparaissait pas auparavant dans la définition officielle du Mekanik Metal Disco pratiqué par le groupe. C’est que l’aristocratie ohrélandaise a connu quelques chamboulements depuis De la Persistance de la Mythologie Chottienne en ??? Vélos. Sebkha-Chott a fait line-up ras du passé, et par la même occasion peau neuve. Certes les excès grotesques, les spasmes trépidants et les mélanges déstabilisants d’autrefois sont toujours de mise, certes l’esprit comico-kafkaïen, le militantisme poétique, les délires insolites sont toujours de la partie... Mais en surface, le ton a quelque peu changé: moins nawak metal rock band, plus mécanico-avant-gardo-noise band. Mais toujours nawak, hein, rassurez-vous. Les ambiances créées sont tour à tour inquiétantes, hystériques, sombres, farfelues, épileptiques, et de ce foisonnement permanent jaillit à intervalles réguliers – on se demande bien comment – des éclairs de génie, des trouvailles improbables, des parties ingénieuses. Ce qui fait que malgré la grosse couche de poil à gratter irritant que le groupe se plait à balancer au petit bonheur sur ses compos – histoire qu’elles ne soient pas trop faciles d’accès (refaire un album aussi génialement abordable et accrocheur que Nagah Mahdi? Plutôt se faire greffer une clavicule d’ornithorynque!) –, inexplicablement, on adhère, on y revient, ceci jusqu’à l’addiction.  
 
Pourtant le groupe triche, si si, j’ose le dire – qu’ils lancent donc Souvy à mes trousses tiens, même pas peur: les Sebkha-Chott revisitent en effet une bonne partie de Nigla[h] sur ce nouvel album. Et ils ne s'en cachent même pas les affreux! On retrouve ainsi le saxoriental de « Sabra y Shatila », ainsi que toute une sélection des mélodies et des divagations qui nous avaient déjà interpelées à l’époque du 3e album. Pourquoi donc? Leur côté écolos-recycleurs irréductibles? Nous questionnerons le despotissime monarque à ce sujet dans une interview à venir sous peu – bien qu’il y ait peu de chance que celui-ci daigne répondre directement à cette question de pauvre limaçon humain… N’empêche, si des traces de Nigla[h] traînent de ci de là, c’est transposées au sein d’un univers neuf, et entourées de nouveaux hymnes à la joie. Parmi les morceaux choisis de cette nouvelle brèche ouverte entre nos deux univers, on s’arrêtera plus particulièrement sur les merveilleuses fulgurances de cette guitare méditerranéenne qui brille de mille feux sur fond de borborygmes tribaux, à 0:57 sur « Tocatta Tacite ». Peu après, difficile de ne pas entonner, en chœur avec le tyran, d’énergiques « Slipo-BITCH! » à la gloire de Yüla (à 2:31 sur « Sarabande pour Abraham »). Sur « Premier Graou », on rentre dans une transe de « Tyrannic groovy électro » chaloupée et grésillante, autrement dit une démonstration de dubstep ohrelandais. Arrivés à mi-course, « Aerobicth – Presto Cerrone » nous permet enfin de nous dégourdir le(s) membre(s) lors d’une improbable séance de gym tu-niques. On ne va pas faire le tour exhaustif de l’opus, ce serait un coup à y passer la nuit (et il est déjà tard…), mais sachez que les expériences insolites continuent bon train, le summum étant atteint sur l’interrogatoire musclé mais vain pratiqué sur « Biphallo Soldier – Jocelyne Cantabile ».  
 
Là, normalement, il faudrait conclure. Mais conclure, ce serait finir, et donc accepter qu’il y ait un début et une fin à cette chronique. Or le concept de The Ne[XXX]t Epilog est basé sur le fait que « les Temps n'existe, et que la chronologie peut être retournée ». Ouaip, texto. Alors conformons-nous au précepte ohrélandais, rendons gloire à Wladimir Ohrelianov II, Yüla et tous leurs seins, et communions dans la joie et la sauce béchamel au rythme de cette grand-messe de nawak musical œcuménique.  
 
…. Est-ce que ça va suffiiiiiiiiiiiiiir????    
 
 
PS: le packaging de cet album est à la fois le plus cheap, le plus fouillé et le plus ingénieux qu’il m’ait été donné de voir. C'est foutu: je suis définitivement fan de ces tarés!            
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
La chronique, version courte: The Ne[XXX]t Epilog, c’est de l’avant-garde nawak metal dans le sens le plus littéral du terme (cette phrase, vous en faites ce que vous voulez, c’est cadeau), ce 4e opus offrant à Sebkah-Chott l'occasion de tâter en plus de la mécanique indus/noisy.  
photo de Cglaume
le 15/10/2012

1 COMMENTAIRE

cglaume

cglaume le 15/10/2012 à 12:23:59

Oubli de taille dans cette chronique: Sebkha-Chott ne crée pas des oeuvres figées. Pour en savoir plus sur l'aspect évolutif/coopératif de l'album: http://www.spiderjessica.org/sebkha-chott/

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