Serdce - Timelessness

Chronique CD album (1:05:56)

chronique Serdce - Timelessness

Avec Timelessness, Serdce applique la formule dite du « ‘y en aura pour tout le monde »... Enfin, quand je dis "pour tout le monde": pour tous les fans de TechnoDeath progressif, ce qui réduit quand même drôlement le panel ciblé. Ce type d'approche à large spectre – pour peu qu'elle évite les dérives putassières – a en général toutes les chances d’être gagnante. Surtout que pour atteindre leur objectif, les Biélorusses marient la Hippie Zen attitude de Cynic, les touches spatiales de Nocturnus (sur le dernier tiers de l’album), et toute la panoplie Sadistienne – de la basse rebondie au chant acrimonieux, en passant par les accents World et le synthé très présent. Et vu que, une fois casé tout ça au milieu des 0 et des 1 patiemment gravés sur leur rondelle laser, il ne restait plus des masses de place dans l’espace musical, le groupe a tenu à coller le sablier géant du Piece of Time d’Atheist au dos de son CD, comme ça personne – ou presque – n’est oublié.

 

Sauf que c’est bien gentil les enfants, mais malgré l’énorme niveau des zicos, malgré de nombreux plans propres à faire naître des tendinites chez tous les aspirants Paul Masvidal de la planète, malgré les variations nombreuses et les aérations fréquentes, malgré les orchestrations fastueuses et quelques interventions de saxo, tout cela reste globalement un peu vain. Car le caressant « Magic Rain » exclu (... on va se cantonner à une sélection drastique et partiale), après l’écoute de ce 4e album il ne reste à l’auditeur que des impressions fugaces, certes agréables, mais rien de vraiment solide, qui réclamerait un retour de la chose sur la platine. Pour bien comprendre la nature de Timelessness, il faut s’imaginer une pizza « 3 étoiles Michelin » qui combinerait saumon fumé, mangue, coriandre, vinaigre balsamique, foie gras, marrons glacés et rognons confits dans le porto. Autant le support « pizza » est convivial et la perspective d’une telle expérience – bien qu’osée – a de quoi séduire les gourmets aventureux, autant le résultat risque de peser sacrément lourd sur l’estomac, de ne laisser aucune sensation de cohérence sur les papilles, ni d’impression durable sur les neurones.

 

Là réside l’explication de la note terriblement tiède attribuée à cette pourtant méritante galette. Ce n’est clairement pas la dextérité des 4 musiciens qui est ici sanctionnée, ni même la qualité du son ou l'éventuelle pauvreté des arrangements. C’est juste que de tant de talent et de moyens on attend plus de consistance, plus de cohérence, plus de plaisir des sens. Au lieu de cela, c'est trop souvent une lassitude blasée qui resurgit à l'écoute des morceaux, une fois dépassée la barre des 6 minutes. Et outre un manque de lisibilité certain – qui atteint un pic sur le revêche et peu digeste « Quasar » –, on se retrouve encore avec sur les bras un « Loss of Feelings or Feeling of Loss » où solos larmoyants, fragile piano de cristal et chant suppliant conspirent pour nous engélifier sournoisement le système nerveux.

 

Alors bien sûr, les fans die hard de Cynic et Sadist vont fondre comme saindoux à thermostat 9 à l’écoute de cette grosse heure de sophistication métallique. Et à l’opposée ceux-ci vont se voir secoués de violents spasmes d’incompréhension, de colère et/ou de dédain à la lecture de ces quelques lignes blasphématoires. Mais malgré quelques poignées de dizaines d’écoutes, pas moyen: l’incontestable compétence du groupe et les magnifiques éclats de pertinence musicale disséminés ci et là au sein de ces looooongs morceaux n’arrivent pas à compenser la lassitude que provoquent ces excès d’esbroufe technique et ces langueurs tarabiscotées typiques du Prog qui s'auto-lèche le nombril.

 

Bref, avec Timelessness on est plus dans l’arrière-goût laissé par les derniers Sadist et Cynic que dans l’euphorie provoquée par les Tribe et autre Unquestionable Presence. Du coup à vous de jauger votre niveau de Prog’n’Tech-Death-freakerie afin de déterminer si l’aventure en vaut le coup… Perso' on va se resservir un peu de bicarbonate de soude et passer à la suite…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: Timelessness pourrait avoir été écrit par Sadist, avec un petit coup de pouce de Cynic et de Nocturnus. Car cette basse dodue, ce synthé omniprésent, ce chant acrimonieux, ces longs volutes éthérés parcourus de faisceaux laser tranchants, ces échos tribaux, ces vibrations spatiales, ces planeries New Age, ces effusions techniques semblent directement prélevés sur le discographie des Grands Anciens du genre. Sauf que cet abondant afflux d’informations et de sophistication accouche d'un foisonnant et fatiguant chaos plus que d'un chef d’œuvre incontestable. Dommage.

photo de Cglaume
le 09/12/2016

1 COMMENTAIRE

Zinzin

Zinzin le 22/12/2016 à 09:54:12

Quand la plupart des groupes de métal n'apportent plus rien au genre et pensent que rejouer des accords et constructions multiples fois utiliser, Serdce prend des risques. Même si certaines de leur influences peuvent se comparer à Cynic ou Atheist, le jeu des biélorusses est beaucoup plus riche et varié, allant s'inspirer de compositions classiques. Les différentes influences et les prises de risques en font un album d'une rare qualité dans un style musical en manque de créativité ! Alors pour moi c'est un 10/10 largement mérité.

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