Sleep In Heads - On The Air

Chronique CD album (40:01)

chronique Sleep In Heads - On The Air

Au vu des nombreuses actualités montrant que l'Ukraine est un pays hyper régressif (répressif?) en terme social et politique, il aurait été audacieux de penser qu'un groupe dit « progressif et atmosphérique » comme le prétend Sleep In Heads s'annonce comme un fier suiveur de la modernité d'un Devin Townsend. Bien au contraire, il faudra plutôt regarder dans le rétroviseur, à deux décennies de distance, afin de se mettre un peu dans le grand bain présenté sur son premier album, On The Air. Une galette qui se montre très surprenante à bien des égards d'ailleurs. Notamment par son petit effet de madeleine de Proust, en replongeant dans de vieilles approches plus spécialement représentées maintenant, qu'on a presque autant oubliées qu'elles nous avaient marqués à l'époque. Jusqu'à se rendre compte que ça nous avait finalement manqué, malgré le fait qu'on ne le ressentait pas vraiment jusqu'à l'avoir entre les oreilles.

 

Dès « Pacifying », c'est le revival de la seconde moitié des années 90, comme si The Gathering avec Anneke Van Giersbergen renaissait de ses cendres en mode roots. Tout en atmosphères délicates non-dénuées de la technicité du progressif, entre piano et nappes plus synthétiques, jusqu'à la voix dans son registre le plus doucereux de sa vocaliste Sonya Yaroyava possédant des faux airs de celle de Anneke, on retrouve avec stupeur l'essence envoûtante du combo batave originel dans sa première partie de carrière avec sa frontwoman emblématique. Seule différence notoire cependant avec le modèle : on ne retrouve pas toute cette ampleur en terme de fibre émotionnelle dans la voix. Ce qu'on n'en voudra pas forcément à Sleep In Heads car est-ce possible réellement de concurrencer l'actuelle chanteuse de Vuur sur ce terrain ?

 

D'un côté, peut-être que les Ukrainiens s'en sont rendus compte car passé ce préambule, on voit carrément l'ombre d'un autre combo planer sur ce tout premier album. Influence étonnamment non citée dans le dossier de presse mais pourtant évidente comme si on lui avait collé un post-it. En effet, la saveur Lacuna Coil, puisée tout particulièrement dans sa première partie de carrière, se fait sentir dès « Vagrant ». Par la voix tout d'abord qui vire à un timbre similaire à celui de Cristina Scabbia dès lors qu'elle monte en puissance. Mais également pour cette aisance à adoucir l'aspect progressif et atmosphérique de sa musique pouvant par ailleurs rappeler à certains moments là encore passéistes de Porcupine Tree ou Dream Theater avec des mélodies délicieusement sucrées. Ce qui donne un On The Air qui dégage une impression tenace de dimension parallèle où The Gathering aurait tenté de faire un disque de Lacuna Coil.

 

Alors, certes, la phrase précédente paraît peut-être grossière, à l'image de ces influences vomies alors que la digestion n'a été que très partiellement entamée. Et pourtant, dans ce cruel manque de personnalité, on s'attache à On The Air. Énormément, d'autant plus si les groupes suscités vous ont marqués à l'époque et font partie intégrante de votre parcours d'audiophile. Parce que tout est bien ficelé et solide. Et la sauce prend parfois divinement, à l'image du single « Blue Fear » qui représente sans doute le meilleur morceau de l'album. Lignes de batterie empreintes d'un Portnoy modèle jeunot dans son aventure Dream Theaterienne, une tessiture folk dans ses atmosphères, la délicatesse apaisante typique de The Gathering sur lequel on collerait du refrain et autre variante d'outro qui coulent tout seul typique d'un Shallow Life de Lacuna Coil. Ou encore un « Time Like The Sand » et son ton vaguement oriental dont les lignes vocales rappellent celles de la Milanaise sur « What I See » de Karmacode, tout en progression feutrée et enivrante avec reprise en puissance que n'aurait pas reniée un The Gathering version gentiment blasté.

 

Bref, On The Air s'avère être une découverte surprenante. Et surtout charmante à défaut d'être parfaite. Car Sleep In Heads doit encore évoluer afin de mieux digérer ses influences et faire preuve de personnalité. Et si les Ukrainiens pouvaient en bonus enrichir leur panel de teintes atmosphériques, on obtiendrait alors un cocktail emprunt d'une agréable nostalgie vraiment marquant. En tout cas, un premier essai sympathique et attachant montrant un beau potentiel qui mérite d'être pleinement exploité.

photo de Margoth
le 03/07/2018

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