Sodom - Decision Day

Chronique CD album (50:53)

chronique Sodom - Decision Day

Bonne nouvelle: on est fin 2016, et 35 ans après avoir commencé à cracher dans un micro, à un âge auquel certains n’aspirent plus qu’à passer des week-ends à tondre la pelouse et à digérer leur barbecue devant un grand prix de F1, Tom Angelripper a su conserver cette énergie mauvaise et ce chant chargé de fiel qu’on croirait émis par le bâtard issu d'un croisement corbeau / panda. M’enfin ça je vous le disais déjà à l’occasion de la sortie de l’EP Sacred Warpath: il y a donc scoop plus brûlant. Par contre, non: ce « nouveau » morceau sorti en 2014, sur lequel blizzard et ténèbres du grand Nord s’unissaient dans l’apparente célébration du Dieu Immortal, n’indiquait pas la voie empruntée par les Allemands sur leur 15e album. Car tel le blindé teuton lancé dans une course aveugle à travers le champ de bataille, Sodom continue à pratiquer ce Thrash guerrier, massif, virulent, sans dévier d’un poil sa trajectoire ni s'adonner aux batailles de boules de neige des farfadets du Black norvégien.

 

Mauvaise nouvelle par contre: la fameuse trajectoire évoquée en fin de paragraphe précédent ressemble de plus en plus  à un embourbement progressif, le niveau du réservoir du tank baissant aussi inexorablement que notre excitation à l'idée de goûter à ses nouveaux titres. Car autant ces dernières années les Overkill, Testament ou Death Angel ont réussi à proposer des opus convaincants contenant des titres carrément percutants, autant ça fait un bon bout de temps qu’on attend un vrai album coup-de-poing-dans-la-gueule de la part de l’oncle Tom. Et s’il n'a jamais essayé de nous enfumer avec une galette vraiment médiocre, si ses dernières sorties sont sympas et prouvent que le bonhomme n’est toujours pas à la ramasse, par contre ça fait un sacré bail qu’on n’a plus été mis sur le cul, ni que notre Top 5 du groupe n’a été chamboulé.

 

Vous avez compris le message: Decision Day est un autre de ces albums qui présente vraiment bien dans la vitrine, qui fait illusion le temps de quelques titres bien ficelés, mais qui s’avère aussi indispensable que le 3e visionnage d’affilée de Captain America vs le Surfeur d'Argent IV.

 

« Que reproches-tu donc à Sodom mon lapin? »

 

En dehors du fait de vivre à l’ombre de sa gloire passée, on lui reprochera le pilotage en mode automatique, avec son corollaire: l’absence apparente d’appétit, de ce sentiment d’urgence et de danger qui fait palpiter nos petits cœurs de metalheads. Ces derniers temps le bombardier ronronne sourdement, la mitrailleuse arrose sans grande conviction, le char a le fessier un peu lourd. Et plus que jamais le groupe ruine des morceaux parfois pourtant relativement vaillants avec des refrains tout raplaplas en forme de draps mortuaires. Tiens: « In Retribution » par exemple. Ok, il fait preuve d’une belle vivacité avec son riff aux faux airs de vieux ‘tallica… Sauf que tout ça s’en va mourir dans le fossé d’un refrain plutôt terne. Pas mieux pour « Who Is God » dont l’allure un rien punky se prend les pieds dans le même genre de tapis moisi. La même encore sur « Vaginal Born Evil » qui voit sa course folle douchée par un gros ralentissement pépère amenant un refrain dont on se serait bien passé. Et je pourrais continuer encore si je n'avais une certaine tendresse pour les Allemands (... ainsi que pour la pratique dont ils se font les porte-étendards!).

 

... Putain, « chorus » ça se traduit comment en Allemand? « Pédale de frein »? « Agonie »?

 

Et pour en rajouter une couche, « Strange Lost World » se traine comme un mastodonte en route pour le cimetière des éléphants (… seule la montée pré-refrain est relativement réussie), tout comme le gros de « Belligerence » et la triste fin des haricots « Refused To Die » – cette dernière s’avérant aussi excitante qu’un plat de flageolets froids dans une assiette en carton.

 

Bordel, ça manque de feu tout ça!

 

Bon allez, « In Retribution » est presque très bon, « Rolling Thunder » revigore, le refrain épico-mélancolique de « Decision Day » fait mouche, « Blood Lions » assure raisonnablement. M’enfin tout ça manque globalement de ce petit plus qui ferait vraiment la différence. Du coup les bons moments ont du mal à compenser les raisons de bougonner précédemment exposées. Et le vieux fan de se demander si, à force d’assurer ses arrières en proposant des albums sans véritable niaque ni surprise, le risque ça ne serait pas que ces parties de p’tits soldats finissent par nous barber purement et simplement… Ce serait ballot! C’est qu’on en a vécu des batailles homériques ensemble, mon Tommy! Alors tu fais un pacte avec le Diable, tu arrêtes la choucroute, tu te sors les doigts, tu te mets au curling, au Tai-Chi-Chuan ou à la pelote basque… Bordel tu fais ce qu’il faut, mais tu nous sors un skeud qui troue pour ton 16e album, OK?

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: 15e album pour Sodom, et si le soldat continue d’avoir des balles dans le chargeur et de l’acidité dans la voix, il a tendance à perdre en fraîcheur et en sex-appeal. C’est pas le tout d’avoir un gros calibre, Tom: il faut encore tirer fort et viser juste! Bref: Decision Day propose le même Thrash de champ de bataille que ces 10 dernières années, sans trahison, ni folie, ni excitation à l’horizon.

 

photo de Cglaume
le 30/12/2016

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