Deviant Syndrome - Inflicted Deviations

Chronique CD album (43:05)

chronique Deviant Syndrome - Inflicted Deviations

Jusqu’à présent, les productions extrêmes en provenance de Poutineland s’étaient surtout résumées à 1 gros nuage plein de joyeux atomes farceurs qui – heureusement – était resté coincé de l’autre côté de la barrière de péage, côté Ruhr. Les douaniers français étaient putain de balaises quand même à l’époque! Bien sûr, de ce côté-ci de l’Europe on avait quand même entendu parler du Babouchka metal folklorique d’Arkona, du death à growl féminin de Merlin, des loufoqueries pastichesques de Boney NeM ainsi que – malheureusement – des groupes de blackzillons faisant rimer perestroïka et white powa. Mais dans le domaine du melodeath souple de la cuisse, on était loin de se douter que la Russie recelait d’aussi experts artisans.

 

Car Deviant Syndrome semble bien avoir été élevé pas trop loin de l’une de ces ambassades de Suède nichées au creux de la patrie de Pouchkine. C’est que le groupe maîtrise en effet sur le bout des cordes les us et coutumes des débuts de la scène de Göteborg, à une époque où de jeunes fans de Iron Maiden avaient subitement été exposés aux bourrasques caressantes soufflées par Edge of Sanity ainsi qu’au blizzard sucré des Dissection et autres joyeux farfadets des neiges. Vous voyez les premiers Dark Tranquillity? Oui? Vous y êtes alors. Insistez un peu plus sur les cavalcades blastées et mélodiquement glacées, rajoutez du verre pilé dans le fond de la gorge pour être plus proche du shriek black que du growl death, saupoudrez de nappes de clavier pour tapisser le fond de la pièce, et je peux arrêter ici cette chronique (oui mais non en fait...).

 

Sur Inflicted Deviations, Deviant Syndrome nous propose donc du très classique – mais également très bon – melodeath moulé à la louche, porté par une paire de guitaristes tout simplement exceptionnels. Ces 9 morceaux constituent d’ailleurs ni plus ni moins que LEUR terrain de jeu, au sein duquel ils ont tout de même convié un batteur, un claviériste et un bassiste, histoire de faire plus "groupe". Et nom d’un p’tit In Flames, qu'est-ce que ça tricote expertement! Des pluies de soli doublés tout en tapping, des canevas mélodiques judicieusement décalés, des escapades bien rock’n’roll, des sprints de malades, du pilonnage en règle, du trémolo poignant: ces gars sont des tueurs, pas un poil ne dépasse, et quand excès il y a, c'est que la structure même des compos le requiert. Certes, Inflicted Deviations est blindé de clichés (une intro parfaitement inutile, des enchaînements qui sentent parfois le déjà entendu, des nappes de synthé un peu kitch…), mais bordel que cet album est accrocheur et gavé de tout ce qui fait qu’on aime cette musique! D’autant que les russes nous offrent régulièrement des incartades plus franchement thrash – comme sur « Consequence » par exemple – ce qui rafraîchit et dynamise leur formule, nous rappelant pour l’occasion les thrash/deatheux de Decadence. Et des fois qu'on n'ait pas bien réalisé le niveau de maîtrise des deux snipers de la 6 cordes, ceux-ci nous gratifient sur « Liberation » d’une orgie instrumentale de quasiment 9 minutes… Impressionnant!

 

On regrettera quand même que le synthé ne se cantonne pas simplement à habiller les compos d’un fond mélodique typé black sympho, mais qu’il vienne parfois nous agacer l’oreille d’un peu trop près. Par ailleurs, tout occupé qu’il est à respecter toutes les figures imposées gothembourgeoises, le groupe se fait un malin plaisir d’ajouter à sa tracklist un pur morceau de death guimauve couleur goth-bonbon que le métalleux diabétique trouvera forcément un peu trop chargé en cholestérol mélancolique. Dernière réclamation de pure forme: malgré la réelle virtuosité du groupe, sur la 2e moitié de l’album, le classicisme de la formule ne contente plus que les die hard fans du genre, et l’enthousiasme s’attiédit quelque peu sur « A Day To Fall » et « Drowned In The Frozen Sun », bien que nos fin bretteurs essaient de changer un peu la donne en nous offrant une parenthèse plus metalcore (carrément moshy même, à 0:44) au début de « Liberation ».

 

Bref, Inflicted Deviations constituera une parenthèse anachronique paradisiaque pour les inconsolables des débuts de la scène de Göteborg, que l’"abatardisation" US-core de ces dernières années a laissés sur leur faim. Les amateurs de duels de guitares twin épiques y verront eux aussi une abondante source de petit lait à boire. Et plus généralement, les fans de metal extrême mélodique trouveront forcément ici de quoi se réjouir. Il faudra juste ne pas s’attendre à ce que Deviant Syndrome propose des idées follement novatrices susceptibles de donner un nouveau souffle au genre, mais accepter qu'ils se cantonnent à une application magistrale de règles ancestrales ("ancestrales" oui: c’est qu’on se fait vieux ma bonne dame!)

 

PS: on me signale la présence des guest stars Andrew Smirnov (Master, Everlost) sur « The Wicked » et Aleksi Sihvonen (Norther, Imperanon) sur « Consequence ».

 

 

 

 

La chronique, version courte:  Dark Tranquillin Flames sort là l’album « Back To The Roots » que beaucoup espéraient depuis longtemps sans jamais oser le demander…

photo de Cglaume
le 21/11/2011

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