City Weezle - Taboo

Chronique CD album (68:10)

chronique City Weezle - Taboo

La Klonosphere, vous connaissez? Mais si voyons, c'est ce creuset de groupes (Klone, Trepalium, Hacride, Anthurus d’Archer ) et de potes qui se dépannent et s’entraident les uns les autres, qui organisent des concerts et prennent eux-mêmes en main leur promo, et qui ont pour caractéristique un talent aussi insolent que systématique. Et pourquoi donc ce laïus qui sent fort le hors sujet en début de chronique du nouvel et premier album de City Weezle? Tout simplement parce que la Fouine Urbaine est le dernier né de ce que je serais tenté d’appeler la Vladigorrrosphère (ouais, t'as raison, tente), réseau de formations aussi improbables que géniales (Vladimir Bozar, Whourkr, Pryapisme, Igorrr) où ça partouze et featurise chez les uns et les autres dans la joie, la bonne humeur, l’avant-gardisme et la constante remise en question des limites du metal tel qu'on l’entend habituellement. Ne manque en fait à cette confrérie musicale qu’un statut officiel, et elle pourrait légitimement disputer à la Klonosphere le titre de principale corne d'abondance (et de jouvence) du metal hexagonal...

 

Et s’il fallait choisir l’album qui synthétise et incarne le mieux cet esprit à la fois aventureux, délirant et virtuose et ce foisonnement créatif qui caractérisent les groupes susnommés, Taboo serait en 1ere ligne. D’autant que Pedral et Cedric des Vlad’s, ainsi que Yann et Gautier de Whourkr viennent fourrer ici leur grain de sel sur tout un tas de titres, que les manettes de la prod' ont été laissées à ce même Gautier, et que « Taboo » – le morceau – nous propose une parenthèse jukebox où sont compilés de mini-samples extraits des œuvres des copains. Sauf qu’il ne faudrait pas résumer Taboo à un best of de la Vladigorrrosphère. Non, City Weezle a choisi une voie toute personnelle, pleine de ramifications multiples certes, mais une voie clairement définie: celle d’un metal fusion à la fois complètement fêlé et sombrement funky, à la croisée de Toumaï, Psykup, System of a Down, du 1er Mr Bungle et du Universal Sprache de Vladimir Bozar. Eux vous diront qu'ils sont les dignes rejetons de Faith No More, Primus, les Melvins et Zappa, m’enfin ne chipotons pas, tout cela converge.

 

Taboo est donc une formidable arabesque musicale qui mélange metal, funk, ska et punk – ça c'est pour les styles prédominants – et dont la constante est de groover méchamment du popotin tel un Infectious Grooves coincé en mode « rictus mauvais ». Alors certes, le rapprochement avec Mr Bungle est inévitable tant ce patchwork est kaléidoscopique, et tant la voix de Simon peut rappeler parfois les exactions Pattoniennes – son spectre allant du Woody Woodpecker hystérique au crooner burlesque –, mais le groupe ne s’y cantonne pas. En effet, armés de cuivres et d’une tension constante qui semble attester que la cocotte-minute est sans cesse à deux doigts d'exploser, nos quatre compères expérimentent, distordent et assombrissent leur propos, à la manière de Sleepytime Gorilla Museum, Anthurus d’Archer ou encore Sebkha-Chott sur son dernier vrai album. Et quand il leur reste de l’espace, ils voyagent et nous envoient des cartes postales d’Irlande (sur l'un des plus gros tubes de l’album, « The Leprechaun », et son final très Skycladien), des pays slaves (à la fin de « Nimformation »), d’un peu tous les pays latinos (sur l’exceptionnel « El Matador », entre Diablo Swing Orchestra et Secret Chiefs 3) ou encore du manoir hanté du coin de la rue (« The Creeps »). On a même le droit à une envolée classique avec force chœurs et cordes romantiques qui s'épanouit progressivement jusqu’à ce que survienne une grosse giclée de rock brûlant, procédé qui pourra rappeler le Queen des grands jours. Sans parler des pointes régulières de gros metal poilu – death pour être précis... Oui, c'est bien ça: City Weezle blinde notre assiette à ras bord de victuailles alléchantes dans lesquelles il a allègrement mélangé sucré et salé, épicé et aigre doux. Miam!

 

Ceux qui avaient eu l’opportunité d’écouter la démo The Leprechaun auront la bonne surprise de retrouver ici les 5 titres qui y figuraient, mais sacrément enluminés. Car en plus de bénéficier à présent d’un son à la hauteur de la prestation musicale, « Taboo » se voit agrémenté d’un passage absolument génial de breakcore délirant (Igorrr inside), « Nimformation » bénéficie des élucubrations hystériques de Yann et d’un excellent final slavisant, tandis que « The Leprechaun » grimpe encore d’un cran dans la tube-osité grâce à l’apport d’un passage de musique celtique typique du genre qui transfigure carrément la fin du morceau. Et ce ne sont pas les nouvelles compos qui risquent de faire baisser la moyenne, car au large éventail des "hits" du groupe s'ajoutent dorénavant l’excellent « El Matador » (dont j'ai chanté les louanges un peu plus haut), un « Maryjane » aussi funky que stupéfiant (dans tous les sens du terme) dont le refrain vous restera durablement collé en tête (Ma-ry-jaaaaaaaaa-ne, she got the pink eye, she got the pink eye…) ainsi que la généreuse mosaïque parmentière de « Hot Potato ».

 

Pour être consciencieux, il faudrait quand même évoquer un aspect un peu moins enthousiasmant de Taboo – aspect qui explique par ailleurs le blocage de la note à 8,5. Sur le banc des accusés, la facette plus sombre et chaotique du groupe, dont l'expression ne fait pas mouche à tous les coups, et qui peine à tenir la comparaison avec les titres plus enlevés – à l'impact incomparablement plus fort. Ainsi « Fair Game » et « Abuse » – bien que comportant de très bonnes choses – sont moins francs du collier et vecteurs de malaise... D'où une légère baisse de régime dans la tracklist, et au final un effet comparable à celui de « Cousin Randy » sur l'excellent Groove Family Cyco d’Infectious Grooves. Pas aussi funky que le reste quoi.

 

Aïe, quel pavé mes aïeux! La longueur de cette chro risquant d'avoir dilué mon propos, on va revenir à plus de sobriété: Taboo, c’est le meilleur du metal fusion qui swingue, allié au génie expérimental des Zappa, Bungle & co. C’est pétillant, étonnant, entrainant et déstabilisant. C’est génial quoi. En tous cas, vu que le niveau d'excellence de ses membres continue à se maintenir à des hauteurs proprement alpines, je peux vous dire que j'ai hâte que la Vladigorrrosphère nous balance sa prochaine cargaison de pépites! D'ailleurs je crois bien voir dans mon rétro venir les prochaines livraisons de Öxxö Xööx et –i Snor... Wait and see.

photo de Cglaume
le 11/04/2011

4 COMMENTAIRES

John ut

John ut le 11/04/2011 à 14:52:45

Je dis bravo!!!A écouter, à manger!!!
Je vote pour la Vladigorspère mais par contre, Igor, je trouve ça mieux avec un seul R.

Antoine Loutre

Antoine Loutre le 11/04/2011 à 14:54:04

Si Anelka revient en équipe de France, je suis deg

Jean Tod

Jean Tod le 11/04/2011 à 15:01:22

Je vois très bien qui est Simon Fleury et je trouve scandaleux qu'à notre époque, des gens comme lui, qui vivent en France, puissent encore avoir un accent anglosaxon aussi dégueulasse et prononcé quand il s'exprime dans la langue de Léon Zitrone. Aucun respect, pour ce beau pays qui l'accueille.

Ps: Est-ce que quelqu'un aurait le contact de Micheline Daxe?

cglaume

cglaume le 11/04/2011 à 15:37:37

La SNCF nous fait savoir que les michelines sont de moins en moins en activité sur ses lignes, même pour aller à Dax.

A noter que Simon, mon cher Rabbi Jacob, ne se prononce pas Simon - n'est pas Henri Guibet qui veut - mais Saï-monne, comme pour le copain de Garfunkel ...

Ou l'inverse, je sais plus

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