Decline Of The I - Wilhelm

Chronique CD album (46:18)

chronique Decline Of The I - Wilhelm

« Quand je fais l’amour avec vous, je ne pense qu’à la mort, à la terre, à la cendre*… »

 

Tels sont les mots qui traversent la 8e minute du titre "The Renouncer", qui clôture Wilhelm, le dernier album des Parisiens de Decline Of The I, sorti chez Agonia Records.

 

Des mots tout droit extraits de La Maman et la Putain de Jean Eustache, œuvre marquante des années 1970, longtemps invisible, toujours aussi sulfureuse et mélancolique. On s’hasarderait à penser que les images et les dialogues de ce film, que la musique et les paroles de ce groupe ont la même tendance à nourrir un certain inconfort, à laisser s’exprimer chez le spectateur et l’auditeur un certain mal-être, si ce n’est un profond pessimisme. Dès le premier album avec le morceau "Mother and Whore", ce film avaient déjà inspiré A.K. (Eros Necropsique, Merrimack, Vorkreist, Neo Inferno 262...), le maître d’œuvre de cette formation qui, depuis sa création en 2006 et sa première sortie en 2012, déploie un Post-Black Metal à haute valeur intellectuelle ajoutée. De nombreux dialogues avaient déjà été samplés, ici – premier titre de Rebellion – et là – dernier morceau d’Escape –, avec à chaque fois le souhait de se référer à un auteur-clef. Si la première trilogie s’appuyait sur les travaux de neurobiologiste français Henri Laborit, Wilhelm est la 2e pierre abrupte d’une trilogie entamée en 2021 avec Johannes et qui entend s’emparer cette fois-ci  des œuvres du poète, philosophe et théologien danois Søren Kierkegaard.

 

Dotés d’une prod’ moins granuleuse et plus accessible que la précédente trilogie, ces deux derniers long-formats de Decline Of The I reposent sur la même matrice, à savoir 5 titres d’une noire élégance, qui s’achève sur une dernière proposition particulièrement imposante.  A.K. – qui n’hésite pas dans la phase de composition à s’imposer des moments d’isolement volontaire – tient à proposer une ambiance toujours aussi lourde, celle d’un Post-Black Metal habité, abrasif et teinté d’avant-garde. En effet, cette plaque – véritable portfolio musical d’émotions contrastées – est à maintes reprises entrecoupée de pauses, d’insertions et de samples, désormais caractéristiques de la musique de Decline of The I :

  • Des mots placés par Marc « Vestal » Obregon, son compair de Merrimack, sur "L'Alliance Des Rats" et "The Renouncer" ;
  • Des chants clairs, au féminin et au masculin ;
  • Des sons électros incorporés à petites doses dans "Entwined Conondrum" (2e mn) et "Diapsalmata" (8e) ;
  • Des dialogues glaçants, avec le plus glaçant d’entre tous au début de "Diapsalmata" qui reprend une interview de Marie-Jo Simenon, fille de Georges Simenon, peu de temps avant de mourir. « C’est son angoisse qui a gagné. Elle s’est suicidée derrière. C’est toujours impactant* », conclut A.K. !

 

Il faut également souligner des arrangements classiques (violons, chœurs, cuivres) plus nombreux que de coutume, bien sentis et savamment mixés. Cela crée un résultat final plus harmonieux qui dissonant, mais toujours aussi qualitatif. Decline Of The I parvient en fait toujours à surprendre son auditeur, bien qu’habitué à cette beauté formelle et labyrinthique, à cet attachement à la mélodie, à cet esthétisme noirci par des pensées angoissées (flippante la fin de "Éros N"…).

 

Mais, attention, cet album ne perd pas le Metal de vue et sait accoucher de gros riffs quand il le faut, comme le montrent les deux dernières minutes très RLHT de "Entwined Conondrum" (notons d’ailleurs la participation de Thomas sur le 1er morceau), le passage Doom sur "Diapsalmata" (quel grawl lugubre à la 7e mn !) ou encore la 2e minute très béhémothienne de "Éros N".

 

Tortueux et torturé, Wilhelm est un très bel album. Peut-être même un grand album, magistralement clôturé par "The Renouncer" et porté par un groupe par ailleurs trop peu présent sur les affiches des concerts et festivals de l’hexagone…

 

 

 

* D’utiles informations ont été tirées de l’interview d’A.K. par Winter du webzine Les Éternels

 

 

photo de Seisachtheion
le 16/05/2025

0 COMMENTAIRE

AJOUTER UN COMMENTAIRE

anonyme


évènements

  • ULTHA au Glazart à Paris le 27 juin 2025
  • Seisach' 6 les 17 et 18 octobre 2025
  • POINT MORT release party au Glazart le 22 mai 2025