Greengoat - Aloft

Chronique CD album

chronique Greengoat - Aloft

S’il y a bien un truc dont il faut se méfier dans le monde de la production artistique, ce sont les déclarations d’intention grandiloquentes. Souvent c’est de l’arnaque. Parfois c’est sincère. Dans tous les cas c’est déceptif. Je me souviens d’un cartel lors d’une expo à Saint-Sauveur qui parlait de « sublimation de l’interface observant-observé dans une composition post-structuraliste ». En fait c’était un gros bagel scintillant. Alors en soi j’ai rien contre les trucs frits, bien au contraire. Mais si l’artiste (ou plus certainement le stagiaire/chargé de prod en charge des cartels) avait simplement noté « Stargate option Glucides », j’aurais sûrement eu la dent beaucoup moins dure vis-à-vis du truc.

 

Le rapport avec ce qui nous occupe ? Je vous mets une petite capture qui parle d’elle-même.

 

 

greengoat

 

 

Le programme est chargé les gars, et j’avoue que la présence d’une annonce Alibaba pour des gants de palpation obstétrique pour vache m’a pas aidé à prendre le truc au sérieux.

 

Si je commence par tartiner là-dessus, c’est pour que vous compreniez bien la (toute relative) dureté de la note. Parce que ce que proposent Ivan (voix, guitares, mix « sculpting atmospheres and pushing sonic boundaries ») et Ruth (batterie, paroles, visuels, « transforming sound into imagery and narrative ») est tout à fait honnête : on est face à un album de rock légèrement fuzzé, avec du riff sympathique, une production maison qui donne un aspect garage pas dégueu (assez éloignée de celle de leur premier album A.I. , paru en 2024, qui sonnait plutôt proche du stoner-doom « classique »), plein de sincérité.

 

On y trouve plein de bonnes choses : le démarrage de « Betty » (pas très loin de ce que proposent les excellents Fatima), les riffs qui lorgnent tantôt du côté du Heavy (« Barney »), tantôt du côté du Thrash (« Charles »), la voix particulière d’Ivan qui, lorsqu’il est sur le fil du rasoir, propose quelque chose d’assez intéressant.

 

Seulement, tout n’est pas parfait : le premier tiers de l’album est un peu poussif, lorgnant du côté prog-psyché (« Jim », « Ariel ») sans jamais atteindre réellement le niveau d’un Rezn, par exemple, la faute incombant notamment à un jeu de batterie bien trop léger (peu aidé d’un mix un peu sec pour le coup). Le changement de couple moteur sur la face B redonne de l’élan, mais c’est cette fois la voix, bien trop inégale d’un titre à l’autre, notamment sur les élans clairs. Toujours sur la corde, Ivan propose de belles choses, seulement parfois c’est touchant dans son imperfection (« Jim », « Travis »), parfois c’est juste à côté (« Ariel »).

 

Pour être honnête, j’avais fait tout un début de chronique sur la difficulté de faire un premier album…avant de me rendre compte que c’était le second. Mais je pense que c’était le bon angle pour expliquer tout ce qui va et ne va pas dans cet album. Tout ici sent le premier album : les idées qui se bousculent, l’envie de montrer ce qu’on sait faire, la voix qui se cherche, les angles intéressants, la différence de perfectionnement entre les morceaux (entre l’ébauche « Betty » et ce que propose « Charles », c’est criant), les « béquilles » (on te voit la reverb’ sur la voix). Et j’aurais pardonné plein de ces choses à un premier album. Ou à un second album amené avec humilité.

 

Excepté qu’on m’a promis une musique expérimentale transmédia mélangeant metal, art digital et narration. Oui, parce que j’ai oublié de vous dire : c’est un concept-album qui explore le phénomène de l’abduction extraterrestre (visiblement du point de vue de différents abductés, d’où les titres-prénoms ? Je suppute). Ah et le single Ariel a été mis en vidéo dans le but d’honorer Salvador Dali, et tout particulièrement son œuvre Rosa Meditativa. Ça fait beaucoup. J’ai l’intime conviction que c’est sincère, mais ça fait beaucoup. D’où ma dent dure envers un album en réalité très chouette.

 

J’ai failli démarrer cette chronique par une citation de Dali : « La critique est une chose sublime. Elle est digne seulement des génies ». Ça en aurait fait une moins bonne critique.  Faire les choses sérieusement ça ne veut pas toujours dire se prendre au sérieux.

photo de Thedukilla
le 05/05/2025

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