E{c}centric Pendulum - Winding the Optics

Chronique CD album (44:33)

chronique E{c}centric Pendulum - Winding the Optics

J’avoue que malgré mon expérience de vieux routier du metal aux tempes grisonnantes (passage à lire avec un accent marseillais prononcé, histoire de bien mareu-qué les zègueu-zagé-rassiong), je n’avais jamais vraiment su où placer l’Inde sur la mappemonde du metal AAA (© StandHard & Poor's). Et là, paf!, d'un coup d'un seul 2011 voit débarquer sur mes écrans radar Amogh Symphony, Scribe ainsi que – pour en revenir à la chronique du jour – E{c}centric Pendulum. La nation de Gandhi aura mis du temps à s’éloigner de la voie de la non-violence, mais pour quel résultat mazette! Si vous ne connaissez pas encore ces groupes, préparez-vous à vous prendre de méchantes châtaignes (d'autant qu'en cette période fleurant bon le sapin et la guirlande, il est de circonstance d'évoquer l'Inde aux marrons).

 

E{c}centric Pendulum est donc un jeune groupe de Bangalore – la Silicon Valley indienne – n’ayant que 2 ans, une démo et ce Winding The Optics à son actif. Malgré cela on est loin d’avoir affaire à des jeunots compensant un pucelage tenace par le massacre systématique de la guitare offerte par Tata Simone lors de l'obtention du bac, ce premier album pouvant d’ores et déjà être ajouté à la longue liste des pépites du metal-moderne-qui-doit-beaucoup-à-Mr-Thordendal. M’enfin nos compères sont loin d'avoir formé un simple groupe de Meshugcore de plus, ceux-ci révérant manifestement tout autant le thrash progressif et sombre de Nevermore que le trampoline rythmique et les discontinuités guitaristiques djenteuses de la scène ci-avant évoquée. E{c}centric Pendulum procède donc à une fusion de ces 2 univers musicaux, et le résultat s’avère d’une richesse folle et d’une pertinence rare. Les atmosphères complexes de l’un se trouvent dynamisées par la puissance mécanique de l’autre, et inversement la froideur calculatrice du second se trouve fluidifiée, emmélodifiée et humanisée par le premier, ces deux mondes se rejoignant dans une vision grandiose et exigeante du metal millésime IIIe millénaire. On pense à Textures, voire à Klone sur certaines aérations atmosphériques révélant un ciel vaste mais sombre. On pense à Nevermore – donc – ainsi qu’à son ambitieux et versatile petit frère The Black Stymphalian sur les multiples attaques thrash qui émaillent ces 7 titres. On pense encore aux audaces instrumentales du djent mécanorganique d’Animals As Leaders, en particulier sur le long « Anonymous Existence ». Bref, on se trouve ici en charmante compagnie!

 

S'il fallait pointer du doigt un élément perfectible dans la mécanique du Pendule Excentrique, on se retournerait probablement du côté de la gorge éraillée et grésillante de Nikhil, saturant quelque-part entre les univers thrash et hardcore, tout en se parant d'une touche légèrement synthétique pouvant rappeler Symbyosis... Celui-ci est néanmoins capable d'arrêter d'aboyer pour passer à un registre plus heavy-dark, comme c'est le cas par exemple sur « The Axioms Of Aphotic Expressions » où la filiation avec le groupe de Warrel Dane devient pour le coup particulièrement flagrante.

 

Toutes les références citées jusqu'ici pourraient laisser penser que Winding The Optics propose une musique cérébrale réservée aux premiers de la classe... Sauf qu'E{c}centric Pendulum n'oublie pas que c'est à l'animal qui est en nous qu'il faut parler pour emporter une adhésion durable. Le groupe se fait donc fort de stimuler vigoureusement notre moelle épinière ainsi que notre système endocrinien lors de passages viscéralement jouissifs. Ainsi, sur l'excellent « The Axioms Of Aphotic Expressions », le groupe balance de la mosh part polyrythmique affolante de groove. En ouverture de « Become Me », il nous cueille sur une bourrasque de thrash mélodique hyper inspiré. À 2:23 sur « My Eucalyptine Depth », il déchaîne un tir d'artillerie saccadé complètement ravageur. Et sur « Anonymous Existence » il multiplie les tours de force: après un premier balayage de l’assistance assuré via un riffing thrash imposant (1:10), le groupe traque les tympans récalcitrants à coups de grosses grattes-ricochets terminant leur course dans le caoutchouc (2:33), puis finit de vitrifier l’espace sonore à l’aide de toute une panoplie de pointillés djenthrash excellents (5:05), ne laissant aux auditeurs – pour se remettre de cette séance virile de dépoussiérage de feuilles – que 2 petites minutes d’errance dans un brouillard spatial mélancolique rappelant certaines plages instrumentales du Human de Death.

 

Allez, arrêtons là les palabres: vous avez compris depuis longtemps que je n’ai que de bonnes choses à dire sur cet album. Intelligence, mélodies, finesse, puissance, tout est là, enchâssé dans un écrin moderne de toute beauté. Les seules embûches que le groupe pourrait éventuellement avoir à craindre avec un tel album résulteraient potentiellement de sa localisation géographique assez inhabituelle ainsi que de l'affluence monstre que connait actuellement la scène modern-djent-syncope-core. Mais vous qui êtes à présent avertis et qui chérissez les références précédemment évoquées, ne ratez surtout pas le coche!

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: une fusion des univers de Nevermore et de la scène Meshuggolâtre qui retient le meilleur des deux mondes et qui botte le cul autant qu’il impressionne le cortex.

photo de Cglaume
le 27/12/2011

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