Sun - Krystal Metal

Chronique CD album (34:24)

chronique Sun - Krystal Metal

Nom de nom, ça fait plaisir !

 

Un peu comme quand le petit voisin qui graphe comme un dieu depuis ses 12 ans a enfin réussi à rentrer aux Beaux-Arts. Ou quand la demi-sœur opprimée vivant comme une souillon a fait la nique aux pimbêches en devenant la reine du bal. Parce qu’on le savait, crénom, que Karoline Rose a un putain de talent ! Et si, égoïstement, on était content de la garder « pour nous tout seul » en allant l’applaudir lors de concerts gratuits (au Nopi en avril 2023, au Hasard Ludique en octobre de la même année) ou sur des scènes cachées dans les entrailles d’écoles primaires (à La Camilienne, en 2023 toujours), ça finissait par devenir frustrant de ne pas voir arriver ce happy end logique qui n’aurait pas manqué de servir de générique de fin si la vie de Sun avait été un blockbuster américain.

 

Mais là, ça y est, oui oui, si si : on touche au but. Car la miss

  • s’est produite sur le parvis du Stade de France pour chauffer les fans de Metallica (le 19/05/2023)
  • a arpenté les plus grandes salles de l'Hexagone en ouvrant pour Shaka Ponk (en 2024)
  • a causé chiffon avec Nagui dans Taratata (le 20/12/2024)
  • a ouvert pour les Nova Twins (le 9 mai dernier)
  • va démarrer (a démarré ? Ça dépend de quand vous lirez ça) la journée de vendredi sur la Main Stage du Hellfest 2025

Et plus fort encore : après deux EP pleins de personnalité qui butaient comme un Ballon d’Or sous cocaïne, Sun sort enfin son premier album. Et s’il fallait continuer de filer la métaphore footballistique pour plaire aux rares abonnés à l’Equipe qui se serait égarés en ces pages, eh bien on n’aimerait pas être le gardien de but chargé de tenter un arrêt face à Krystal Metal, car ce dernier est taillé pour faire du tartare de phalanges et transformer le goal lambda en manchot même pas empereur !

 

She did it, sisters & brothers !

(ouaip, on inverse : le girl power fait partie intégrante du message solaire)

 

Bon allez, vite fait. Parce que vous savez déjà tout ce qui suit. Surtout si vous traînez souvent en ces pages. Voilà le tableau : Sun joue de la Brutal Pop. Autrement dit un mélange 60/40 (parfois 50/50, parfois 70/30) de Pop et de Metal. Avec, donc, de gros riffs qui rugissent, du growl’n’shriek qui fait peur aux abonnés au Pelerin Magazine, et de la batterie qui – pas tout le temps, mais quand même – déboule comme un Gengis Khan bullshitophobe sur le plateau de CNews. Mais aussi des accroches taillées pour hameçonner les oreilles profanes. Des morceaux en forme de tubes imparables. Ainsi que de joyeuses incartades hors-sujet-mais-presque – comme une rythmique Reggaeton sur « Painful Attraction », ou des basses d’inspiration Dub sur la 2e occurrence des couplets de « Warrior Riot Grrrl ».

Un mélange à la fois TRES personnel, et complètement imparable.

Rien à voir avec les lamentables essais Pop Metal de groupes qu’on ne citera pas, qui draguent à très large spectre, et sont aussi crédibles qu’un rabbin charcutier. Cerise sur le soleil, Karoline a développé un univers visuel chiadé et très typé – on aime ou pas, mais cela contribue indéniablement à forger l'identité de ce Wonderland décibellique dont elle est à la fois la Reine de cœur et l'Alice.

 

Les neuf compos nouvelles sont telles des architectes d’intérieur transformant la grosse demi-heure d’écoute requise en un bâtiment musical aussi solide que magnifique, plaisant dès le premier regard, mais plus sophistiqué qu’il n’y parait, plein de recoins aussi charmants que confortables – sans oublier d’épais coussins pour les câlins ! L’édifice mêle des décos typées Philippe Stark et Giger à d’imposantes poutres de bois et d’épaisses tentures brodées. C’est inattendu, contrasté, et pourtant tout y est à sa place… À tel point qu’on envisagerait sans mal y poser durablement ses valises !

 

En guise d’entrée, « Free Your Soul » combine urgence, riff de cristal et force de persuasion.

« Warrior Riot Grrrl » s’inscrit dans un vaste mouvement de va et vient traversé par un groove revanchard et salvateur.

« My Funeral » appuie lourdement sur la nuque en égrenant un message martelé à l’aide d’une scansion toute robotique.

« Blood » rumine ses histoires de famille le long d’un crescendo aboutissant sur une floraison rageuse.

Et pour ceux qui préfèrent garder le meilleur pour la fin, on conclura ce rapide aperçu par deux pépites pépitissimes : « Painful Attraction », bâti sur un délicieux oxymore impliquant déhanchements tropicaux et ascensions divines, et « Khaos Star », hymne imparable parmi les hymnes imparables, dont la dynamique conviendrait sans problème à un chant Rap, mais qui préfère s’élever régulièrement vers des cieux aussi grandioses que tourmentés.

 

Alors oui, un vil accès de mesquinerie m’a poussé à bloquer la note de l'album sous le plafond de verre (de cristal ?) du 9/10. Car – ce n’est qu’un avis – la fin de l'aventure (comprendre la paire « Sirius Love » / « Come Clean ») s’avère légèrement moins solide. D’ailleurs, c’est bête, mais si  « Khaos Star » avait été placé juste après « Come Clean », sans doute aurais-je attribué le fameux 9. Voire quelques décimales supplémentaires. Dieu que l’esprit humain – cglaumien ? – est bizarrement fait…

 

Mais ne nous égarons pas : le seul message valant la peine d'être retenu ici, c’est que 2025 vient de se prendre un nouveau shoot discographique pas loin du centre de la cible. Et cela fait d’autant plus plaisir que 1) l’artiste en question cocoricote dans l’Hexagone (ainsi qu’au sein du pré germain voisin, Karoline ayant la double nationalité) 2) Krystal Metal est de ces rares albums qui sonnent comme un vieux compagnon de route au bout de même pas deux écoutes 3) ce manifeste a tout de la pose d’une première pierre d’un genre nouveau.

 

C’est pourquoi, là, tout de suite, je n’ai qu’une hâte : sortir les Ray-Ban et la crème Bioderma indice 50+ « qui hydrate et protège jusqu’à 8 heures d’affilée » pour m’installer contre les barrières clissonnaises, face à la Main Stage 2, en attendant que la montre indique enfin 10:30…

 

 

PS : c’est p’t-être de l’autoprod’, mais le son est plus maousse que Mickey, et c’est Magnus Lindberg qui assure le mastering.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte : elle l’a fait ! Après deux EP qui criaient très fort « Écoutez-nous : on a investi une terre vierge entre Pop et Metal, et ça bute ! », Sun livre enfin un premier album s’avérant largement à la hauteur des espoirs placés en elle ! À mi-chemin entre accroches radio qui fédèrent large et rugosités métalliques qui charclent sévère, Krystal Metal se paie le luxe de déjouer les pronostics des persifleurs en évitant les écueils d’un tel positionnement "entre deux" et en séduisant les publics des deux chapelles. Alors plutôt que d’arborer cette moue réticente, envoyez-vous « Painful Attraction » et « Khaos Star », puis venez nous rejoindre dans le camp des conquis !

 

 

photo de Cglaume
le 23/05/2025

4 COMMENTAIRES

Xuaterc

Xuaterc le 23/05/2025 à 08:01:13

 on était content de la garder « pour nous tout seul »
Moi aussi je le savais

pidji

pidji le 23/05/2025 à 08:33:42

Je n'avais pas du tout accroché à ses précédentes sorties.
Mais cet album est sympa finalement !

Jer

Jer le 23/05/2025 à 10:06:12

J’ai flashé direct et j’ai acheté ses deux EP direct. C’est incroyable d’avoir tout comme ça. Sun est une sacrée bosseuse et elle veut saigner de l’oreille alors y’a pas de hasard car ça paye, ça tranche, c’est saignant et tout frais 😊

Thedukilla

Thedukilla le 23/05/2025 à 11:06:30

Ravi de la voir accéder enfin à une reconnaissance amplement méritée ! « John & I » n’est jamais sorti de ma rota depuis deux ans, mais je vois ici une paire de morceaux qui pourraient lui faire de l’ombre (« Khaos Star » 🥰).

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