Dax Riggs - 7 Songs For Spiders

Chronique CD album (28:17)

chronique Dax Riggs - 7 Songs For Spiders

 

15 ans après son dernier album solo. 28 ans après la mort d’Audie Pitre et la fin d’Acid Bath. Dax Riggs fait partie de ces gars qui réclament de la patience. Beaucoup de patience. Chaque année passée remettant quinze balles dans le pot « espoir grandissant / attentes déçues », on commençait à arriver sur ce que les démons en costume appellent « un capital-risque élevé ».

 

D’autant plus avec un album sortant quelques mois à peine après l’annonce d’une série de concerts de reformation à partir d’avril 2025. Dans le genre timing qui sentait le coup de com’, ça se pose là. J’en étais déjà à dépoussiérer Paegan Terrorism Tactics en anticipation, histoire de me remettre de l’immanquable déception à venir. Et puis je suis tombé sur « Pagan Moon ». Et la messe (noire) était dite.

 

Alors évidemment, on est loin de la folie vicieuse d’Acid Bath et de son sludge des marais. Le rythme ne décollera que peu sur les 28 minutes que dure 7 Songs for Spiders, et faudra repasser pour les cris écorchés et autres gimmicks de jeunesse du bonhomme. Mais on s’en fout. L’important est ailleurs. Dans la voix. À plus de 50 ans, c’est terrifiant d’entendre la même voix qu’à 20. Sûrement le taux d’humidité en Louisiane. Ou une hygiène de vie exemplaire. Ou les sacrifices de vierge.

 

En tout cas ça marche : dès « Deceiver », le monsieur distribue les bonbons et je le suis dans son van noir sans poser de questions. On part sur une demi-heure de déambulation entre maisons décrépies, églises évangéliques vermoulues et marais bouillonnants. Le guide est moins exalté que lors de ses premiers tours, c’est évident : la découverte a laissé place aux souvenirs, la rage au ressentiment, les envies de tout foutre en l’air aux regrets de ne pas l’avoir fait. La Louisiane n’est plus une terre de danger et de révolte pour lui. C’est un mémorial, au pote mort presque 30 ans plus tôt et aux rêves tombés par la suite.

 

Le voyage est confortable, on cruise, la clim’ a fond pour contrebalancer la chaleur des grattes, toujours aussi grassement enveloppantes, même apaisées. La basse et la batterie accompagnent discrètement, comme le cliquetis régulier d’une pièce qui finira par lâcher au prochain passage de voie ferrée. Les synthés sont légers, à peine discernables aux premières écoutes, échos d’une radio dont le bouton des fréquences a servi de culasse à bang il y a bien longtemps, et depuis bloquée sur « Electro-Atmo FM ».

 

On roule comme ça un moment, en faisant semblant de ne pas voir les carcasses sur le bas-côté. Les suspensions font le taf : pour autant que je sache le bitume pourrait aussi bien être du velours. Après une entrée en matière pleine d’enthousiasme (la fin de « Deceiver »), le gars a allumé une sèche à l’odeur étrange, et j’ai bien senti que le fond de la voix ne s’étranglait pas que de fumée (« Sunshine Felt the Darkness Smile »). Putain, à un moment il a bien failli me refiler la chiale à moi aussi (« Blues for You Know Who »), alors que j’ai même pas de sentiment, je suis qu’un genre de construction allégorique. Flippant. Le reste de la route s’est fait dans une tension étrange (« Pagan Moon »), sûrement partagé entre le fait d’en avoir trop montré, et pas assez dit. Jusqu’à ce qu’on passe à côté du cimetière. Ce qui lui donne un sacré regain d’énergie (« Graveyard Soul »). La mort c’est son truc à Dax, son obsession. Il me confie que d’habitude c’est elle sur le siège passager, depuis toujours.

 

Je me retrouve sur le trottoir, un peu chancelant. Je me rappelle pas être descendu. Je m’apprête à retrouver le monde, avec son cortège de joies, de peines, et d’activités salariées. Un van noir se gare sur le côté. Le gars me dit quelque chose, et il a des bonbons.

 

Fuck.

photo de Thedukilla
le 24/05/2025

1 COMMENTAIRE

cglaume

cglaume le 24/05/2025 à 08:38:44

C'est que vous écrivez drôlement bien Monsieur ! 👍🤘

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