Dirty Shirt - Get Your Dose Now!

Chronique CD album (30:24 + 18:16)

chronique Dirty Shirt - Get Your Dose Now!

11/10. C’est la note hyperbolique attribuée en ces colonnes à Letchology, le précédent album de Dirty Shirt. Il faut dire que celui-ci était encore meilleur que Dirtylicious, qui avait lui-même reçu un 10/10 bien mérité. Parce que sur CoreAndCo on est comme ça : on pousse la logique jusqu’au bout des choses. Alors allait-il falloir dégainer la petite tablette « 12/10 », que même un Jacques Martin excessif n’aurait pas osé placer à côté des chères têtes blondes participant à l’Ecole des Fans ? Ou les Roumains allaient-ils finir par se heurter au plafond de verre de la créativité de leur muse ? Avec eux, tout étant possible, le ciel aurait pu être la seule limite. Heureusement pour la concurrence qui commençait à être dégoutée par cette débauche insolente de talent, Get your Dose Now ! – le 6e et nouvel album du groupe – « n’est que très bon ». Oui, ce constat est aussi stupidement injuste que celui de parents déçus par une brillante progéniture n’ayant obtenu que la mention « Très bien » au bac alors qu’ils attendaient d’elle les « Félicitations du Jury ». Mais que voulez-vous : le monde est ingrat envers certains, auxquels on ne laisse d’autre choix que l’excellence. En même temps ce n’est pas la première fois que l’on verrait des actionnaires se fâcher tout rouge parce que la croissance de leur société ne serait pas à 2 chiffres, mais seulement de 9,5%...

 

Vous aurez compris que cette introduction surréaliste est l’œuvre d’un fan pourri-gâté ayant toujours vu ses attentes comblées par le groupe : tentons donc à présent de remettre les pieds sur terre, et d’adopter une approche moins biaisée de ce premier album post-pandémique (...vous aurez au passage remarqué l’habileté du titre-injonction qui s’adresse tout autant au fan-junkie qu’au citoyen sommé de se protéger). On gardera nos quelques réserves pour un paragraphe « Exigences démesurées et ingratitude crasse » ultérieur : c'est là leur place, au fond du couloir après la salle de bal. Car l’expérience que l’énorme majorité des auditeurs va faire à l’écoute de cette nouvelle sortie peut se résumer en quelques mots : « Bonheur, fraîcheur et bonne humeur ». En effet Dirty Shirt n’a changé ni sa démarche, ni son fusil d’épaule, et sa Fusion « Folkcore » mêlant Metal moshy (du Néo boosté au Death), Musiques tradi’ sentant bon l’ouest de la Mer Noire, et coquetteries Electro vivifiantes fait toujours un carton. Pour autant la bande de Mihai Tivadar reste toujours ouverte à d’autres vents, ce dont on fait l’expérience dès les tout premiers morceaux de ce nouveau millésime. A l’écoute de l’introductif « New Boy In Town » tout d’abord, qui abandonne vite son respirateur artificiel pour s’offrir une escapade dans les grands espaces d’un western balkanique. Puis sur « Pretty Faces » – qu’on avait pu découvrir avant la sortie effective de l’album – dont les tressautements enthousiastes se voient colorés de rouge, de jaune et de vert par le ragga-flow de Benji Webbe (Skindred)... Même pas 7 minutes cumulées, et le groupe est déjà vainqueur par K.O. !

 

Mais ce ne sont pas là les seuls coups d’éclat de ce gros poisson d’avril (sorti le 1er) qui ne fera rire aux dépends de personne, mais uniquement de plaisir. Car quand on continue à dérouler le fil de la bobine discographique, on tombe sur d’autres superbes prises. Le grandiose « What’s Going On » notamment, au cœur plus tendre que la moyenne, mais doté d’un refrain aux dimensions d’hymne universaliste (à noter une intervention rapée de Mathieu « Boots » Di Pilla – Mr Ze Gran Zeft – le bonhomme s’étant également chargé de l’intégralité des textes en Anglais de l’album). En continuant sur notre lancée on tombe bientôt sur « New Conspiracy », morceau à l’entame pétillante, mais qui s’avère vite le plus poilu de la cuvée – ce qui n’empêche nullement une cohabitation fructueuse avec les habituelles trilles Folk entraînantes… On ne lui reprochera peut-être qu’une fin un peu prématurée (au bout de 2:40) : on aurait bien repris un peu de rab’, nous ! Point final – que certains pourront également considérer comme culminant – de l’album, « Geamparalele » est la mise au goût du jour d’une danse traditionnelle du sud-est roumain, celle-ci ayant la particularité, en plus d’être complètement irrésistible (mais est-ce vraiment une particularité ?), d’être majoritairement chantée par les « choristes » du groupe. ‘y a pas à tortiller : ce type d’au revoir, c’est carrément la classe !

 

Incroyable mais vrai: malgré sa prodigalité, le chapitre précédent ne clôt pas la liste des plaisirs apportés par cette 6e dose de vaccin antimorosité. Car si, au premier abord, « Cand s-o-mpartit norocu' » semble faire grise mine, celui-ci fonctionne en fait comme « Saraca Inima me » (sur Freak Show) : il prend le temps de bien nous accrocher aux tripes avant de majestueusement déployer ses ailes, telle une version sexy du proverbial phœnix. Ajoutez à cela un superbe EP bonus, Pandemic Special, qui compile les moments forts de l’activité en ligne du groupe pendant le confinement, et vous réaliserez à quel point le menu 2022 propose double dose de tout ce qui est bon – gras ou non – dans le dirtychon. Parce que l’EP en question n’est pas qu’un simple gadget sympa mais dispensable : il renferme entre autres une reprise de « Resonate » (cf. Prodigy), sans doute la meilleure cover que le groupe ait jamais enregistrée – et pourtant, si vous vous rappelez de l’excellent « Rocks Off », vous savez à quel point la barre avait été mise haut.

 

Pourtant, malgré toutes ces bonnes choses, je dois reconnaître qu’il y a des moments où le petit nuage Get your Dose Now ! redescend un peu plus près des pâquerettes. Ainsi « Dope-A-Min » a beau être un modèle d’accroche, il s’avère peut-être plus téléphoné, et un peu moins punch-in-the-face que ce que l’on aurait pu espérer. C’est d'ailleurs sur ce genre de morceau hyper sautillant que le groupe perdra les ronchons qui trouvent ce genre de musique trop guillerette pour s’accorder avec leur t-shirt noir (... m'enfin vous avez raison: faut-il s'attarder sur ce genre d'énergumènes?). « Hot For Summer » est plus ou moins fait du même bois, bien que le côté folle farandole rehaussé de growleries soit tout à fait en phase avec les attentes que l’on peut avoir vis-à-vis du groupe… Mais pour une raison qui m’échappe, il n’a pas fonctionné sur votre interlocuteur, comme s’il y avait un côté un peu forcé dans sa dynamique. Dernier point qui a bêtement crispé la vieille ganache qui vous parle, c’est cette mini-prolifération du gimmick « Hop-hop ! S-Asha ! », cri de joie sans doute ancré dans le folklore local, mais qui a le don de me fatiguer les connexions nerveuses quand il est appliqué en couches trop épaisses…

 

Alors oui, cette chronique contient quelques passages où ça rouspète, où ça ronchonne, où ça rechigne – quelle vieille carne atrabilaire ce lapin, on croirait un mélange de Tatie Danielle et de Carmen Cru ! C'est que rhaaaa, frustration : on n’a pas pu sortir cet improbable 12/10 qui aurait été une première, et qui nous aurait gonflé le cœur de bonheur. Mais crénom, à l’impossible nul n’est tenu, d’autant que Get your Dose Now ! est objectivement le meilleur album que l’on pouvait raisonnablement espérer après un tel parcours. Il apporte ce que tout fan réclame à corps et à cris – de nouveaux tubes ! – et finit, s’il était encore besoin, d’imposer Dirty Shirt comme un groupe incontournable… Vérité que les festivals (Wacken, Hellfest…) semblent avoir mieux compris que les labels : quand donc ces derniers sortiront-ils enfin de cette bulle autiste qui les conduit à signer des Incite mais à snober nos Transylv-amis ? Daignez pardonner, ô T-shirts crados, à ces écuries aveugles, ainsi qu'au fan de peu de foi, et préparons avec ferveur la grand-messe qui se tiendra en l’église St Temple sur Clisson, en ce jour à l’avance béni du 23 juin 2022 !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: 6e album, et nouveau carton pour Dirty Shirt ! Pour fêter dignement la fin des confinements, le groupe a en effet composé une nouvelle poignée de hits, tout en s'accordant un petit plaisir via un featuring de Benji Webbe (Skindred) sur l’un de ses plus gros tubes nouveaux. Bien que cela ait beau être depuis longtemps une évidence, Get your Dose Now ! confirmera à ceux qui sortiraient d’un long coma la pertinence de cette Fusion Metal pêchu / Folklore roumain / Electro guillerette que le groupe appelle « Folkcore »... Et ravira ce faisant une grande majorité de fans !

photo de Cglaume
le 01/04/2022

7 COMMENTAIRES

8oris

8oris le 01/04/2022 à 09:35:25

un mélange de Tatie Danielle et de Carmen Cru...Tu es vraiment dur avec toi même!

cglaume

cglaume le 01/04/2022 à 09:45:56

Tu ne n’as jamais entendu rouspéter quand je constate qu’il n’y a plus de madeleines à tremper dans ma camomille !!!

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 01/04/2022 à 10:51:33

"... m'enfin vous avez raison: faut-il s'attarder sur ce genre d'énergumènes? "OUI ! Ils sont la base de toutes pensées critiques et un moteur d'évolution positive de notre société individualiste et consumériste basée sur les apparences.

cglaume

cglaume le 01/04/2022 à 11:02:29

:D

Pingouins

Pingouins le 02/04/2022 à 01:18:11

Ben moi, cette pochette me fait penser à celle de Enema of the State de Blink 182. Voilà, c'est dit. Retour vers l'adolescence.

cglaume

cglaume le 02/04/2022 à 09:54:10

Carrément, j’avais pas tilté !
Dommage du coup je n’ai pas posé la question à Mihai durant l’interview (… à venir ici)

cglaume

cglaume le 02/04/2022 à 09:59:55

Vérification faite : c’est un pur hasard, et pas une consigne réfléchie…

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