Eternity - Mundicide

Chronique CD album (43:09)

chronique Eternity - Mundicide

Je ne sais pas si on peut affubler la pochette de la dernière plaque des Norvégiens d’Eternity  du titre d’artwork le plus moche et/ou le plus génial de l’année, mais dans tous les cas, accompagnée de son titre Mundicide on-ne-peut-plus limpide quant au message délivré, on ne peut que la trouver parfaitement raccord avec les malheurs de notre temps !

 

Il s’agit ici du troisième album de son maître d’œuvre tourmenté, biberonné à l’athéisme et pécheur invétéré : Evighet. J’ai eu l’opportunité de chroniquer le pur condensé de haine luciférienne que constituait son To Become The Great Beast, sorti en 2019, déjà chez Soulseller Records. Un acte musical de « rébellion satanique » destiné à « libérer l’esprit et l’âme du carcan de la prison mentale de l’endoctrinement, de la construction de l’ego que la société nous force à créer* ». Et rien de mieux pour cela qu’un Black Metal tradi mais happant – qui prenait ses racines dans l’âge d’or du BM des 90’s –, un pot-pourri fielleux presque hors du temps, pour lequel le fondateur avait reçu à la basse l’appui de Blasphemer (Vltimas, Aura Noir, ex-Mayhem), son acolyte encapuchonné depuis bien des années. Après un silence de … 13 ans, ce To Become The Great Beast (qui avait eu une place bien au chaud dans mon Top annuel) s’appuyait sur une vieille demo de 2005, ce qui avait permis de donner à l’ensemble de ce méfait un côté implacable et épuré, qu’Eternity n’a pu que trop rarement valoriser en concert (ici un set avec Mork, là un autre avec Dødheimsgard), alors même qu’Evighet avait reçu des soutiens de poids pour la scène, tous les deux membres de Conjuration, à savoir T. Ødegaard derrière les fûts et V. Fineidet (Den Saakaldte, Sovereign) à la basse (bye-bye Blasphemer).

 

De ses propres mots, exprimant cette fois-ci dans Mundicide sa « douleur », sa « frustration » et son « désespoir face aux événements extérieurs », Evighet pare son BM luciférien d’un côté « dystopique », dont les lyrics font écho « à des temps sombres orwelliens où la guerre est paix et où la vérité est trahison ». Il redirige en quelque sorte sa colère « contre un monde devenu complètement fou », « un monde d’espoir perdu où la religion est morte* » !

 

Certes, ce sont de ses représentations et de ses rêves qu’est parti l’artiste de All Things Rotten pour accoucher de cette pochette avec un résultat final détonant… Mais il s’agit là de la première sortie d’Eternity née d’un véritable travail collectif (rajoutons la contribution de J. Röe à la gratte) qui aura duré trois ans. Pour quel résultat final me dites-vous ? La « Lumière noire de Lucifer » qui avait jailli de la Grande Bête est sans doute moins éclatante et moins pénétrante sur ce Mundicide. Ce BM reste toujours aussi puissamment exécuté, mais la double conséquence de ce travail de groupes et d’une attention bien plus prononcée accordée à la production a un effet immédiat et redoutable : la source noire et dépouillée s’éloigne… Fort heureusement, elle ne se délite pas complètement sur les titres bien troussés (et qui s’enchainent) "Journey Towards the Darkside", "Under the Gaze of the King" et "Mundicide". Dans la seconde moitié de l’opus, les aspérités méphistophéliques qu’offrait jusque-là Eternity ont souvent été rabotées, en faveur d’une ambiance moins viscérale, moins monochrome, moins glaçante, moins trve (utilisation plus franche de samples sur "Hymn", "Gunmetal Sky", ainsi que sur l’outro aux accents apocalyptiques). On tire vers un BM de plus en plus convenu, avec des propositions telles que "Pest!", "O Discordia" et "The Seventh Seal" même si ces deux derniers morceaux commencent de manière féroce. C’est dommage…

 

… En fait, j’ai l’impression qu’Evighet lui-même si attendait : « J’ai un jour craint qu’il soit plus difficile de conserver une vision singulière, qu’en devenant pluriel, Eternity risquait de perdre quelque chose de ce qui le rendait unique, mais ces inquiétudes sont depuis longtemps dissipées*. » Pas totalement « dissipées » de mon dispensable point de vue…

 

* Merci à mon collègue d’Acta Infernalis ; son interview d’Evighet, publiée début août, m’a été très précieuse.

 

 

photo de Seisachtheion
le 25/08/2023

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