Archspire - Bleed the Future

Chronique CD album (31:35)

chronique Archspire - Bleed the Future

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Top lapin 2014, #1: Trepalium - Voodoo Moonshine

Top lapin 2015, #1: Dirty Shirt - Dirtylicious

Top lapin 2016, #1: Osaka PunchDeath Monster Super Squad

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Logique. Prévisible même, quand on connaît l'animal.

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Top lapin 2017, #1: Archspire - Relentless Mutation

 

« Quoi ? Du gros Death Metal qui ratatine et balance des bouts de caisse claire jusque dans la stratosphère ? Élu meilleur album 2017 par un panel représentatif de lapins jaunes, devant les albums de Troldhaugen, Igorrr, Trollfest et Toehider ? Il souffrirait pas de sévères carences en Fusion votre collègue ? »

 

Etonnant, en effet. En même temps, ce n'est déjà pas tous les jours qu'on a la mâchoire inférieure qui se décroche jusqu'au clavier à l'écoute d'un album aussi brutal... Mais qu'il soit à ce point excellent qu'on en oublie les joyeuses zébulonneries des trublions du Nawak, ça confine à l'anomalie statistique ! Pourtant c'est bien ce qui était arrivé cette année-là (55 ans après que le Rock'n'roll ait ouvert ses ailes). La faute à un moissonneur-batteur pulvérisateur de records, à un growleur jouant les Usain Bolt du flow, et à des gratteurs de manche hallucinants, tout ce petit monde s'étant associé pour créer un vortex métallique aussi effrayant que séduisant redéfinissant les règles du Death technique avec une fougue et une maestria frisant le divin.

 

Bref, ça butait grave.

 

Alors forcément, après un tel exploit on s'apprêtait à accueillir avec fatalité un successeur vaincu d'avance. Un quatrième album ayant plus ou moins de panache, mais ne pouvant viser au mieux qu'une médaille d'argent. Un peu la même approche qu'avec Matrix 4 : après avoir sauvé l'humanité à la fin de Matrix Revolutions, comme Néo pourrait-il encore espérer nous éblouir, si ce n'est en gratouillant la corde nostalgique ? Non, sincèrement Bleed The Future ne pouvait que ramasser les miettes en espérant que le pain perdu alors obtenu serait suffisamment goûtu pour succéder au festin précédent sans trop essuyer de quolibets.

 

Alors que, tu parles Charles : s'il avait vraiment fallu dresser un parallèle, c'était plutôt Relentless Mutation = Matrix Reloaded et Bleed The Future = Matrix Revolutions. Comment diable ont-ils réussi cet exploit nom de nom ? Combien d'âmes ont-il dû vendre au VRP du BDSM éternel ? Pourtant nul changement de décor. On redevient cette fois encore ces spectateurs impressionnés perdus au beau milieu de déchaînements d'une puissance cyclopéenne, aussi bouillonnante qu'expertement maîtrisée. Tout juste a-t-on l'impression que la basse s'exprime avec un peu plus d'aplomb, et que les mélodies ont gagné du galon face au déferlement de brutalité titanesque qui nous crame l'épiderme auriculaire avec une merveilleuse régularité.

 

Tout comme sur leur sommet de 2017, les Canadiens réussissent à nouveau à transcender une technique folle pour accoucher de morceaux qui remuent notre viscérale intimité et transforment nos avant-bras en porcs-épics angoras. « Mais quelle est cette sorcellerie ? », comme se le demandait Messire Godefroy. D'où viennent ce démentielles orgues de Staline qui crachent leur feu létal au beau milieu de la tempête « Drone Corpse Aviator » ? D'où cette violence affolante cohabite-t-elle aussi harmonieusement avec les délicates caresses guitarisiques du milieu de ce même morceau ? Quel secret permet de transcender en une sublime montée lumineuse la pluie de gravity blasts qui s'abat à partir de 0:46 sur « Abandon the Linear » ? Et d'où sort ce superbe break à la basse juste après ? Comment le groupe arrive-t-il à suggérer la douce mélancolie qui émane du morceau-titre, alors qu'il est avant tout question de s'y faire acupuncturer les tympans à coups de batte de base-ball ? Comment le titre arrive-t-il à ce point à donner l'impression qu'il a été touché par la grâce (quand, à 2:14, éclot cette héroïque mélodie) ? Comment élégance et groove peuvent-ils aller aussi magistralement de paire à la fin de « Drain of Incarnation » ? Comment se fait-il que l'on soit encore éblouit par cette course splendide qui clôt la première minute de « A.U.M. », alors que cela fait quasiment une demi-heure que l'on se fait aussi vertement matraquer ?

 

L'explication tient sans doute dans une maîtrise totale des ressorts du genre. Et un recours plus fréquent aux jeux de contrastes entre confession leads élégantes et dévastation totale du champ de bataille. Toujours utile que, alors que j'étais intimement convaincu que cette nouvelle sortie se ferait voler la vedette par les derniers Ophidian I et First Fragment, il n'en est rien : le nouvel Archspire est à nouveau de la pure graine de Top de fin d'année. Et honnêtement je ne vois pas trop comment le groupe aurait pu revenir avec un meilleur album.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: après un monument comme Relentless Mutation, on espérait évidemment que Bleed The Future sortirait à nouveau la grosse artillerie... Mais on avait du mal à croire que les Canadiens pourraient à nouveau atteindre les sommets de 2017. Eh bien c'était mal les connaître ! Car si l'écoute de ce quatrième album donne une nouvelle fois l'impression que l'on se fait confectionner une coupe « bien dégagée derrière les oreilles » à la D.C.A, l'extrême brutalité de l'exercice laisse pourtant maintes occasions d'observer combien les coussins sont moelleux sur les canapés de l'Olympe. Attention Mesdames et Messieurs : légende en cours d'écriture...

photo de Cglaume
le 29/10/2021

7 COMMENTAIRES

Tookie

Tookie le 29/10/2021 à 10:20:20

Un album...hallucinant.
On a l'impression d'arriver au bout de quelque chose, que cet album dit (ou scande bruyamment) : "Voilà, ÇA, c'est ce qu'on peut faire de mieux, de plus extrême et précis dans le genre, personne n'ira plus loin".

Et franchement, j'ai pas l'impression qu'on puisse repousser les limites au-delà pour les oreilles et le cerveau humain. C'est brutal, précis, plus si innovant quand on connait les précédents, mais la performance technique et le rendu artistique sont bluffants. Le plus dingue étant qu'en live...ben ça passe.
Et quel batteur. !
Il y a un avertissement au début du clip de "Drone Corpse aviator" signalant des images violentes. Un commentaire dit "Immediately goes to a shot of Spencer violating that drum kit." C'est exactement ça pendant 32 minutes (et heureusement pas plus, sinon j'ai tous mes vaisseaux auriculaires qui pètent).

Bref, oui, c'est de la bonne came.

8oris

8oris le 29/10/2021 à 12:03:21

De l'excellente came même.
Le niveau d'écriture est assez dingue et le groupe est d'une propreté hallucinante.

Après techniquement hmmmm...je pense qu'on peut largement trouver plus extrême, plus technique, plus complexe. Mais ils sont clairement dans le haut du panier.

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 29/10/2021 à 17:50:48

J'allais troller mais l'exercice m'a fait sourire. Et il commence à devenir appréciable. 8oris, tu dis nawak (le voilà mon troll !!)

Xuaterc

Xuaterc le 30/10/2021 à 13:35:13

Je pensais qu'avec Origin, on avait atteint le sommet, je me trompais sévèrement...

Ludwigretsch

Ludwigretsch le 31/10/2021 à 08:52:45

La vélocité de la batterie est proprement hallucinante et insuffle une énergie peu commune dans un registre ou les matraqueurs de fûts et excités du manches sont pourtant légion... C'est assez fun et jouissif sur le court terme mais, comme dit plus haut, pas sûr que le cerveau puisse encaisser une telle débauche de violence passée la demi-heure !

It's a trap

It's a trap le 03/11/2021 à 23:26:37

Roooh. Je n'arrive à me départir d'un rictus de plaisir, merci pour le kif.
Il y a que moi qui entend des influences marquées de trap dans le rythme/flow du chant et même parfois les réponses de la section instru?

cglaume

cglaume le 04/11/2021 à 13:18:16

Trap spécifiquement, je ne saurais pas dire. Mais en effet le flow du chanteur est souvent comparé aux sprinteurs du Rap


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