Harmony Bay - Jestli to strávíš... / Bezcharakterní Šprým Idiomiasmatického Koníka
Chronique Démo CD (49:36)

- Style
Nawak Metal expérimental - Label(s)
Autoproduction - Sortie
2009
écouter "Palindrom Lučního Koníka"
Il y a un an et demi de cela fermait un site précieux: The Weirdest Band in the World. Bien que son nom puisse suffire à se faire une idée de ce que l'on pouvait y trouver, on en rajoutera une couche en précisant que si l'on peut considérer CoreAndCo comme le Usain Bolt du Nawak et de l'Avant-Garde Metal (parfaitement, non mais), alors ce site en était le Flash. On pouvait en effet y trouver les plus incroyables freaks ayant jamais émis un son sur la surface de la Terre. Mais ne laissez pas la mélancolie vous envahir à l'annonce de ce rendez-vous manqué, car la toile est pleine de ressources, et les curieux pourront trouver une version archivée de ce Club de l'étrange sur le site web.archive.org. Quant à la motivation de cette séquence nostalgie introductive, elle est simple: c'est sur ce site que votre interlocuteur a découvert l'existence d'Harmony Bay. Et le moins que l'on puisse dire est que ce duo tchèque avait toute sa place dans ce haut lieu de l'improbable musical... Allez, magnéto Serge:
Vous avez cliqué sur le lien Youtube? Vous avez tenu jusqu'au bout? Félicitations: vous gagnez un badge WeirdAndCo! Sachez maintenant que ce « Palindrom Lučního Koníka » offre un échantillon représentatif de ce que le groupe propose sur Jestli to strávíš... (2004) et Bezcharakterní Šprým Idiomiasmatického Koníka (2009), ses deux uniques démos dont la présente chronique vous propose un aperçu « 2 en 1 ». Mélange de gros Metal qui tâche (les 2 gugusses ont été guitariste et batteur du groupe de Death Parricide), d'expérimentations jazzy extrémistes, d'effusions vocales débilos dignes de PoiL et d'une incroyable maîtrise instrumentale, les 50 minutes que dure l'écoute de leur courte discographie sont une épreuve pour les nerfs et le cerveau.
Si d'un morceau à l'autre la recette d'Harmony Bay n'est jamais exactement la même (notamment sur Jestli to strávíš..), l'impression globale qui reste après l'écoute de la plupart d'entre eux et celle d'un patchwork hystérique et incessant de micro-mélodies lapidaires se succédant les unes aux autres à un rythme effréné. Heureusement, pour éviter d'émousser trop vite notre attention, le groupe parsème ce labyrinthe épuisant d'épisodes humoristiques (la mélodie de piano simplissime et les ricanements à la fin de « Žbluňk », la marche nuptiale et le jingle « problème Windows » sur « Palindrom lučního koníka »...) ainsi que de petits exercices de style (trois morceaux finissent de traviole, que ce soit une minute avant la fin de la piste, en plein milieu d'un passage, ou sur N fausses fins successives). Les zozos vont même jusqu'à terminer leur première démo en prenant le contre-pied complet de leur démarche habituelle, sur un long jam bluesy où la guitare se lance dans une impro à la Carlos Santana et la batterie se laisse enfin vivre, le tout sur une boucle de basse simple et amicale.
A noter que si la plupart des morceaux demandent des terminaisons nerveuses d'un autre monde afin de pouvoir en goûter toute la substance (on ne m'enlèvera pas de l'idée que certaines pistes, comme « Koroptví tání » par exemple, doivent beaucoup à Arnold Schoenberg et sa théorie de la musique atonale), d'autres nous permettent parfois de respirer un petit peu. Comme « Matouš spletenec », qui rappelle un peu le registre de Bangladeafy et nous amadoue par le biais de sonorités subtilement moyen-orientales.
Mais soyons réalistes: la grande majorité des être humains censés considérera tout cela comme un beau bordel complètement hermétique, rendu d'autant plus inécoutable que la prod laisse souvent à désirer, et que le clavier produit régulièrement de ces sons cheap à l'extrême qui évoquent la compil Mes pires compos, by Playskool. Et l'on ne pourra pas entièrement leur donner tort. Sauf que les deux zigotos à l'origine de ces maux de crâne sont loin d'être d'affreux punks tapant sur des grille-pains avec des cuillères à soupe: leur musique est dûment réfléchie, et manifestement conçue sur papier millimétré. Les curieux auront donc ici matière à mener moult enquêtes musicales passionnantes... Et à se faire de méchants nœuds aux tympans!
PS: les 4 dernières pistes de Bezcharakterní semblent constituées de commentaires farfelus portant respectivement sur les quatre premiers morceaux de la démo. Énoncée entièrement en tchèque sur un fond sonore minimaliste et par un narrateur usant d'une diction burlesquement outrée, la chose est inécoutable si l'on ne parle pas la langue – et peut-être même si on la parle d'ailleurs!
La chronique, version courte: parés pour le plus extrême des exercices de style Nawako-expérimental qui soit? Prêts à affronter un déluge sonore aussi pointu que farfelu, aux frontières de l'inécoutable? Lancez les deux démos d'Harmony Bay d'une traite, et rendez-vous dans 50 minutes pour votre admission aux urgences de Bedlam.
0 COMMENTAIRE
AJOUTER UN COMMENTAIRE