Sightless Pit - Grave of a Dog

Chronique CD album (38:49)

chronique Sightless Pit - Grave of a Dog

Chez Coreandco, on est ouvert d'esprit. (« Aware » nous aurait dit JCVD. Pour les plus jeunes, voyez ça par vous même). C'est peut-être même notre marque de fabrique et c'est pas Lapinou qui nous dira le contraire. C'est même aussi pour ça que j'ai signé chez eux. Bref, de l'ouverture d'esprit, il va falloir que vous en fassiez preuve pour aborder Grave of a Dog. La première écoute de cet album peut, et va sûrement même, en déstabiliser plus d'un. En cause? Sa profondeur, sa diversité, sa cohérence. Il faut que je vous dise que derrière Sightless Pit se trouvent la magistrale et virtuose Kristin Hayter (Lingua Ignota), le nerveux Dylan Walker de Full of Hell et le talentueux Lee Buford de The Body. Et sboum. Brelan d'as balancé sur un tapis. Tout le monde est sur le carreaux. Vu les antécédents des trois protagonistes, rien de bien étonnant à les voir se rassembler une nouvelle fois pour ensemble pousser les murs encore un peu plus loin. Le processus d'écriture lui aussi est original. Étalé sur deux ans (2017-2019), l'enregistrement se faisait à partir de sessions individuelles; chacun s'appuyant et s'inspirant de la session précédente sans y avoir participé. Une sorte de cadavre exquis musical. Entre black, électro et expérimentation sonore vous allez pas mal voyager. Mais prenez bien votre pied, vous êtes en de bonnes mains.

Analyse.

 

On pense avoir bien cerné le sujet après la première piste,'Kingscorpse'. De l'électro, des pistes MIDI et une voix bien saturée par là dessus. Un poil déstabilisant aux premiers abords, on y accroche très vite car s'y retrouve toute la puissante énergie destructrice du black, lovée dans un écrin d'électro. Surprenant. Plaisant. La recette est bonne alors roule ma poule. 'Immersion Dispersal' sera sur la même corde. Obscure. Nerveuse. Actuelle.

Alors quand arrive 'The Ocean of Mercy', on se retrouve un peu con. Un loop vocal au semblant ethnico-chamanique, des voix cleans, une piste synthé. Et rien ne nous choque. On a toujours la rage au bide, l'estomac hameçonné et la bile qui nous ronge. Exactement comme 'Love Is Dead, All Love Is Dead', la piste finale. Kristin Hayter nous balance à la gueule, pendant 9 minutes et avec le plus grand calme, toute les ambivalences de ce monde, aussi singulières soient elles. Une démonstration vocale, à n'en pas douter, rythmé par un pouls électronique et accompagné d'un piano volatile. Le genre de chose qui te laisse de marbre. Immobile et perplexe. Complètement sonné. Sonné ici en l'occurence par tant de violence non-violente.

Cependant, on a aussi des pistes un peu moins accessibles émotionnellement. Plus conceptuelles et nécessitant plusieurs écoutes. Mais n'y voyez pas ici un jugement dépréciatif, au contraire (malgré l'utilisation pourtant déontologiquement interdite de l'autotune sur 'Violent Rain' punissable par une expurgation définitive de la communauté musicale). Réussir à mêler coeur et cerveau, émotion et intellect sur un même album est une très grande réussite. Ce sera le cas notamment de 'Whom The Devil Long Sought To Strangle', beaucoup plus bruitiste et imagé ou encore 'Drunk On Marrow' largement cinématographique et épuré.

Toujours est-il qu'il règne au sein de ce triumvirat un véritable souffle d'égalité (musicale j'entends). Chacun ayant sa place et respectant celle des autres ce qui confère à l'album un aspect métaphysique. Aucune individualité n'en ressortant au profit de l'oeuvre elle même. A défaut de me répéter avec l'intro, le travail de composition est donc vraiment remarquable.

 

Grave of a dog est surprenant, Grave of a dog est délirant, Grave of a dog est perturbant mais Grave of a dog est avant tout obscur. C'est dans sa diversité que Grave of a dog va chercher cette obscurité et tends vers une certaine forme d'universalité. Dès le départ, dès la genèse du projet, dans les veines de chacun et partout où se porte leur regard pourtant différents, l'obscurité et la douleur sont appréhendés pour ensuite s'enchevêtrer de manière si naturelle. Une chance, sincère, que ces trois là se soient rencontrés.

photo de Vincent Bouvier
le 14/03/2020

3 COMMENTAIRES

cglaume

cglaume le 14/03/2020 à 18:54:40

C'est pas moi qui dirai le contraire, en effet ;)

Xuaterc

Xuaterc le 15/03/2020 à 10:07:35

Moi non plus :)

gulo gulo

gulo gulo le 15/03/2020 à 13:51:36

Ce passage à l'autoune est ensorcelant, un des plus beaux et obsédants moments du disque.

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