Heet Seas - Interview du 10/01/2009

Heet Seas (interview)
 
Tout d'abord, comment procèdez-vous pour composer, sachant que Yanik habite Le Mans? Est-ce une véritable difficulté pour le groupe ?
Yanik : Hello Will. Alors disons que pour composer...et bien cela fait quatre mois que j'habite au Mans, ce qui correspond à ce qu'il a fallut comme temps pour simplement enregistrer quelques overdubs et surtout mixer, puis masteriser les deux albums d'Heet seas, ce que j'ai fait moi-même (faute de moyens et aussi par soucis de confier un tel travail à quelqu'un qui aurait pu dénaturer tout le son du projet, vu que j'avait une idée très précise du travail final).
Le travail de composition est plutôt quelque chose que je me réserve en grande partie depuis le début, les autres membres ayant une tache plus précise à donner pour les phases d'enregistrement. Cela dit je leur ai confié la lourde tache de composer eux-mêmes un futur album du groupe, histoire de me faire pardonner... Il faut dire aussi que les autres ont de leur côte leurs projets à eux , Speed Science, Moonwrath et Wayfarer.
Bat : Pour ma part, je considère ce projet depuis quelques temps comme un "projet-studio". Alors quand on travaille tous devant un PC et qu'internet permet de se transmettre les différentes ébauches de batteries guitares ou synthé, ça reste assez simple. D'autre part, Ynk compose tout dans son coin et je n'ai ensuite plus qu'à écouter et composer (ce qui se fait très vite en général (je dois beaucoup au fait d'avoir pu apprendre à jouer en groupe dès que je me suis mis à la batterie)).


Quel a été l'élément déclencheur, collectivement ou individuellement, de la naissance du groupe ?
Yanik : En fait, avant Heet seas, j'avais monté un groupe de métal indus mélodique insupportable nommé LAPSE. J'y jouais uniquement de la guitare, je ne faisais même pas de voix, il y avait une chanteuse pour ça, mais je me devais de tout contrôler, de manière presque totalitaire. Je composais en permanence des concepts mélos et dans le ton de la musique, qui au final n'ont jamais vu le jour puisque ça a avorté assez rapidement. Après ça, j'ai décidé de me lancer dans l'univers de la MAO en lâchant complètement les guitares et ai donc composé "Tales From A Quiet Attic" (vous pouvez y trouver la première version de "Crayfish"). Etant plutôt content du résultat, j'ai demandé à mon frère Bat de construire avec moi un projet plus collectif.. Même si je compose seul, je trouve que c'est plus intéressant d'écouter un projet collectif plutôt qu'un mec tout seul déguisé en groupe.. le fameux "Nine Inch Nails IS Trent Reznor", ça je trouve pas ça intéressant alors que j'aime donner de la liberté aux autres, tout en veillant à... l'intégrité du projet.
J'ai donc fait l'inverse de "Lapse" avec Heet seas, en me donnant une liberté totale dans la musique, et en écrivant les paroles les moins personnelles possibles et les moins engagées. On obtient quelque chose d'ambigu, des histoires absurdes et irréelles mêlées à une musique directe mais aventureuse. Un peu comme le faisait Genesis (première époque) avec leurs ingrédients à eux et leur talent démesuré.


Heet seas a t-il des influences très précises sur lesquelles il s'appuie plus directement, ou est-il le résultat d'une somme d'influences dont il réalise l'amalgame ?
Yanik : Je dirais que mes influences sont forcément les plus voyantes dans notre musique, mais Bat compose toutes ses parties comme il le sent, et comme il est plutôt métal, ça colore fortement le tout.
Pour JL et Vyküü, c'est pas pareil, ils sont là depuis trop peu de temps, mais comme je le disais, je pense essayer un truc intéressant pour le 4e album. Au final je dirais qu'un groupe nous lie tous, c'est Metallica. Comme beaucoup, ce groupe nous a beaucoup influencé, et on peut donc le sentir dans la batterie, ainsi que dans les guitares, le chant, et même peut être la façon dont j'utilise les machines. Après je pense que je compose en espérant réentendre ce que j'aime dans mes fameuses influences, l'accessibilité sombre de Depeche Mode et Talk Talk, la liberté sonore de Ministry et Killing Joke, le format long et épique de Genesis et la folie de Peter Gabriel, et le dosage impeccable de Metallica. J'en oublie forcément mais je pense que ce sont les ingrédients principaux.
Bat : Mes parties de batteries sont totalement le fruit du hasard à la base. Quand on habite sous le même toit, on entend forcément la musique qui passe dans la chambre d'à côté, et du coup tous ces batteurs que je ne connaissais pas me sont revenus d'un coup lors de la décision de monter le groupe. Ce qui m'a donné au début un style totalement impersonnel, que j'ai réussi finalement à dompter et que j'aime accommoder maintenant dans tout ce que je fais. C'est comme ça que vous pouvez trouver des parties-batteries presque electro dans mon groupe de thrash (Speed Science), et des parties presque thrash dans mon groupe electro (Heet seas donc). Ce style que je ressens propre à moi par contre ne ressort pas du tout dans le dernier projet qui m'a accueilli (Moonwrath) car la mentalité n'est pas la même. Peut-être ais-je fais une liaison Speed Science/Heet seas sans trop m'en rendre compte.
Yanik : Le rapport entre l'electro-indus et l'urgence heavy metal m'interresse.. d'ailleurs on peut trouver dans nos albums quelques traces de "twin guitars", un truc que j'adore et que j'avais délaissé pendant des années, me concentrant sur l'electronique et les sons numeriques, mais je reviens peu à peu à expérimenter la guitare.


Vos goûts respectifs correspondent-ils parfaitement à ces influences ?
Yanik : Et bien...oui. Je suis du genre à écouter un million de fois un artiste pour en cerner toutes les subtilités, donc ceux que j'ai cité au dessus sont encore dans mes playlists. Même si j'ai toujours un album qui tourne en boucle (d'ailleurs en ce moment c'est "Spirit Of Eden" de Talk Talk). En tout cas, je peux dire que je n'écoute pas de métal.
Bat : Et bien... non. Au final, et comme je le disais à la première question, j'ai plus essayé de reproduire ce que j'entendais jouer chez les groupes écoutés par mon frère plutôt que de me laisser envahir par mes propres influences (nouveau projet=NOUVEAU projet). Pour la chanson "Dirty March Of A Weak Giant" par exemple, il m'aurait été facile de jouer du Soulfy-Machine Head pour que ça pète, mais c'est en pensant tout de suite à Skinny Puppy que je me suis le plus éclaté à composer pour celle-ci.


Quel regard portez-vous sur la scène locale, donc amienoise, et l'avènement de formations telles que les MOLLY'S ?
Quels sont vos échanges avec ceux-ci? (par extension donc, les Beyonders, Milk, The Void, The Chils etc...).

Yanik : Le "Revival Rock" Français sent le moisi pour moi. Si la scène Amiénoise est gouvernée par Milk ou les Beyonders, et bien pour avoir joué avec eux, je peux vous dire que j'suis pas mécontent d'être ailleurs. Les Beyonders nous ont appris qu'il ne fallait pas faire une première partie électronique avec une tête d'affiche alcoolique..mais cela dit je garde un souvenir impérissable de la prestation charismatique du chanteur.. Quant à Milk...j'pense qu'on en parlera quand la brique de lait sera périmée! Je ne dis pas ça gratuitement, les gens de ces deux groupes n'ont aucune courtoisie ni aucun professionnalisme avec les musiciens d'autres univers. Ce sont des donneurs de leçon irrespectueux.
JL : La scène Amiénoise est véritablement à l'agonie (point de vue scène underground). Il n'y a effectivement plus personne dans les concerts... Il est vrai aussi qu'il y a de moins en moins d'endroits qui acceptent de nous faire jouer. Mais surtout l'événement qui me permet d'affirmer ça a été sur la tournée de Lycosia/Sixteen Sinners, qui est passé par Amiens, et dont j'étais le coorganisateur pour la date amiénoise, a été à la limite du fiasco. Le programme était attractif, une performance artistique (Heet seas aurait du faire la première partie), 3 concerts, des mix entre chaque changement de plateau, il y avait vraiment de la "matière", mais non.... L'endroit n'était peut être pas approprié certes, mais on attendait largement le double de monde, et c'est triste de se dire que finalement il n'y a plus aucun intérêt a jouer sur Amiens. Le publique reste caché.
Bat : Ohlala oui c'est vrai les Beyonders...Allez, mis à part la bière collante qu'ils ont balancé sur tout notre matos (n'ayant pas le leur), disons que j'ai bien rigolé. Pour ce qui est de Milk...leur batteur est très bon, je le connais assez bien et je crois sincèrement en son potentiel, on sent qu'il aime ce qu'il fait. Mais tout ça est gâché par la prétention démesurée de la chanteuse (peut-être trop jeune? Espérons-le). C'est dommage, car mis à part ça j'ai trouvé leur prestation plutôt chiadée, même pour un style qui ne me touche pas forcément.


Lors de vos prestations Amienoises êtes vous parvenus à attirer un public un tant soi peu conséquent ?
Yanik : Non. On a pas vraiment fait ce qu'il fallait pour non plus au niveau promo. Mais personnellement j'aime faire un concert pour le plaisir de jouer dans un nouvel endroit, même si ça s'est presque limité au caveau mortuaire du BABYLONE d'Amiens (pour les connaisseurs). Donc le but n'était pas d'avoir du monde à ces concerts, surtout dans notre registre. Ni pour faire de l'argent, nos albums sont d'ailleurs gratuits.
Bat : Conséquent, non pas vraiment. A Amiens si vous voulez remplir un bar il faut amener tous vos potes (en général bien sûr). Mais je garde quand même quelques bons souvenirs, comme ces gens que je ne connaissait pas et qui viennent vous dire que votre solo était cool ou bien qui repartent de la soirée en sifflant une de vos chanson dans la rue. Si on touche ne serait-ce qu'une seule personne, on se dit qu'on a pas bossé pour rien, c'est agréable.


Quelles sont vos ambitions vis-à-vis du groupe? Souhaitez vous le faire perdurer, voire vivre de votre art, ou est-il voué à rester un plaisir, un vecteur d'échange ?
Yanik : Un plaisir, j'ai abandonné tout espoir de vivre de l'art, surtout de la musique. Sauf peut-être pour me faire un peu d'argent de poche à l'occasion mais l'occasion ne s'est pas encore présenté. Question projets, il y en a puisque je compose en ce moment le 3e album, qui est déjà bien avancé (la pochette est déjà sur le myspace donc c'est pas une connerie), et je commence à songer à un gros concert, une sorte de spectacle très visuel avec beaucoup de nos morceaux, histoire qu'ils aient une existence live. Mais je prend souvent le temps d'imaginer avant de projeter.
Bat : Vivre de ça, non non. On verra où cela nous mène mais même si tout tombe à l'eau, pour ce projet ou pour un autre, je me dis que les fous-rires et autres émotions pas mal fortes ressenties en répètes ou en concert me feront de bons souvenirs quoi qu'il en soit. (comment? et les prises de têtes?...euh..attendez je passe sous un tunnel...).


Suite à la question précédente, que vous apporte le groupe d'un point de vue "humain" ?
Yanik : et bien...j'ai passé beaucoup de temps à chercher des membres pour répéter la musique d'Heet seas, et au final je préfère inviter des amis comme JL et Vyxou à se joindre au projet, c'est plus agréable. Quant à Bat, ça semblait assez logique de lui proposer le projet puisque nous avons appris ensemble la musique, et tout ce que nous avions comme groupe était un groupe parodique de Sepultura/Soulfly... Le meilleur batteur que je connaissais était mon frère, pourquoi se priver?
Bat : Merci
JL : D'un point de vue humain, je suis très heureux que Ynk m'est invité à me joindre à ce projet. Quand je suis arrivé il y a maintenant à peu près un an et demi, il avait besoin d'un gratteux pour une date (qui a vraiment été génial), et je n'était pas du tout dans l'electro, mais Heet seas m'a vraiment mit dedans et converti, maintenant j'adhère a 100%. Ynk est un excellent compositeur, j'ai connu LAPSE, il nous avait dépanné un concert avec Speed Science car nous n'avions plus de bassiste. Ca fait plus de 5 ans que je joue dans Speed Science avec Bat, bref les choses se sont faites assez naturellement, et l'arrivée de Vyküü et de son talent pour la 4 cordes a véritablement finalisé le projet, je n'ai qu'une hâte, (re)commencer les concerts !!!



Quelles orientations pensez-vous donner à Heet seas à l'avenir ?
Yanik : Deux sorties par an (au moins un album). Questions orientation musicale, ça dépend de beaucoup de choses.. Il y a beaucoup de différences d'un album à l'autre. [1] est primaire, massif et il tâtonne beaucoup. On est proche de mes vieilles influences, avec toutes ces guitares métal et ce côté super dépouillé. D'ailleurs j'ai fait la pochette dans cette optique (les deux hommes préhistoriques, qui illustrent par ailleurs le morceau "A Great Song From The Den", sont une référence à l'époque où Bat et moi n'étions que 2 à jouer en terrain inconnu sans trop savoir où aller..le début de tout). L 'album [2] est plus décomplexé, les compositions sont plus courtes dans l'ensemble et couvrent plus de styles musicaux. J'y ai expérimenté beaucoup de choses sur le son et les arrangements, c'est pourquoi [2] est bien plus mélodique. Le 3e album est pour l'instant assez lent, touche davantage à la new-wave en étant beaucoup plus progressif et mélancolique, avec des compos très longues! Mais on verra quand il sera bouclé! Il sortira donc en 2009 mais avant lui nous mettrons en ligne "Bee-Tracks", une compilation de versions longues, de versions courtes, de remixes et d'inédits. En bref Heet seas ne s'impose pas de contraintes stylistiques, les albums auront toujours une belle part d'instrumentales, plusieurs couches de voix, des guitares, des machines, des histoires à dormir debout, des pochettes que je prendrai plaisir à dessiner. Un groupe crédible est un groupe qui doit savoir où il veut aller.

Pour finir sur une note amusante, que pensez-vous du retour des mythiques GUNS N'ROSES et de leur (très faiblard à mon goût) "Chinese democracy" ?
Bat : Personnellement je ne connais pas Guns n'roses. Mais l'autre jour j'ai écouté un titre de cet album qui devait être un single je pense, et j'ai plutôt accroché dans le sens où je m'attendais à quelque chose de pépère (un préjugé), au final j'y ai trouvé des accents ressemblant à des choses que j'écoute depuis le début. Partant de là peut-être qu'ils ont une chance de conquérir de nouveaux fans. Mais apparemment ils sont bien partis pour perdre les anciens, c'est souvent le cas avec ce genre de groupe/dinosaure qui perdure dans le temps.
Yanik : Je connais surtout ce qu'a couté cet album. Mais pour 20 millions de dollars, l'album a juste un bon son (et encore tout est relatif). Preuve que l'argent ne ressuscite pas le talent. En tout cas merci Will pour cette interviouse.

 

 


 

Interview riche en enseignements, qui me permettra d'effectuer les chroniques des deux albums de HEET SEAS...pour COREandCO évidemment, avec sérénité et doté de précieux renseignements.

photo de Refuse to keep silent
le 13/01/2009

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