Killing Joke - Absolut Dissent

Chronique CD album (64)

chronique Killing Joke - Absolut Dissent

En cette fin d’année, Absolute Dissent débarque sans grand fracas pour marquer la fin d’une troisième décennie du combo anglais. Actif depuis 1978, Killing Joke a navigué entre plusieurs eaux du punk au dub –à leurs débuts- ; du post-punk à la vague new-wave dans les années 1980, ils entament un virage metal largement teinté de réminiscences industrielles via leur album sans concession de 1994 Pandemonium, le bâclé Democrazy et enfin un retour gagnant toujours metal en 2003 via leur album éponyme deuxième du nom. A chaque fois depuis Brighter than a thousand suns (1986) à Killing Joke (2003), nous sommes persuadés de détenir l’acte final des britanniques. Seul le binôme originel Jaz Coleman et Geordie Walker porte la destinée du groupe. 2010, Nous le tenons, l’album récapitulatif de la carrière de Killing Joke. D’abord cette croix noire comme la nuit sur un ciel déchainé qui repose sur des terres brûlées. Comme image d’Epinal, on aura fait difficilement plus kitsch. Pourtant toute la philosophie de l’album repose sur cet artwork peu avenant.  Coleman devenu citoyen Néo-Zélandais en réponse à l’attitude de Tony Blair durant la guerre en Irak, récemment décoré en tant que Chevalier des Arts et des Lettres, a depuis plusieurs années opté pour un travail sur la musique symphonique ou les musiques de films. Les autres membres du groupe ont quant à eux à leur actif des participations à différents groupes et projets.

 

Pour l’histoire Absolute Dissent  (Dissidence absolue) a failli s’appeler XIII : Feast of fools (13 :  Le festin des fous), ce titre prometteur fut finalement écarté de la version finale du disque. Il apparaît sur une version alternative. Prévu pour le début du mois d’avril,  le 13iè effort, largement remanié, bénéficie d’une sortie officielle en octobre dernier.  Plus qu’un clin d’œil, il faut voir dans sa conception le désir de mettre un point d’orgue (final ?) au long périple du groupe. On retrouve tous les ingrédients qui ont fait florès dans les travaux de l’équipée. Dans un premier temps, le line-up d’origine. Jaz Coleman, Geordie walker, Paul Ferguson et Martin -Youth- Glover n’avaient plus joué ensemble sur un album depuis 1982 ! Ils sont accompagnés par un mercenaire pour les claviers et les parties plus percussives  Rezha Udin. Musicalement, le tour de force souhaité de réunir les différentes facettes de leur musique est réussi.  Selon une répartition alliant 40% de Metal-Indus (en ouverture, le titre éponyme pétri d’efficacité), 40% de Post-Punk (le cataclysmique « This World Hell » !) et les 20% restants reposant sur des cendres glaciales de New-Wave « European Super State ».  A ce petit jeu, le groupe perd de son urgence jusqu’au-boutiste dans les parties indus. Ministry a opéré de grands ravages de ce côté-là. Il redonne vie à cette vieille baderne de nouvelle-vague et dynamite toujours aussi fort le fleuron post-punk trempé à toutes les sauces depuis le début de cette décennie. En 2010, Killing Joke est loin, vraiment loin d’être ridicule. Les 4 premiers titres de la plaque font donc la part belle à la facette metal, sans être sublimes ils sont convaincants. Je m’attarde à nouveau sur « European Super State » (question d’âge assumé !) qui est à mes yeux l’un des plus bels hommages au genre new-wave sans effets de manches cold malvenus.

 

« Endgame » (prémonitoire ?)  annonce la fin du monde, sur un mode un peu convenu. Une des marottes de Coleman, mystique devant l’éternel qui participe à des travaux portant sur l’occultisme, la numérologie. Tant de sciences/croyances autres qui baignent dans toute l’œuvre du groupe.  « The Raven King » est bien entendu un titre-hommage à Paul Raven, bassiste du groupe décédé le 20 octobre 2007. « Honour the Fire » qui suit l’ode consacrée est à nouveau un exemple parlant de la virtuosité de Geordie pour tisser des riffs saccadés prompts à bâtir une mélodie qui soutient le chant de Coleman.  Le feu, comme d’autres éléments plus "matériels", est un symbole présent dans tous les travaux de KJ.  A l’époque où le groupe optait pour des références controversées comme en témoigne la pochette de Laugh ? I bearly bought one. Une photo prise en 1934 et montrant l’abbé catholique allemand Albanus Schachleiter au congrès de Nuremberg. Les croix gammées des brassards sont cependant remplacées par les symboles monétaires de la livre sterling et du dollar américain. Rappelons que Coleman écrira plus tard la B.O de Mulan pour Disney !

 

Enfin le terrible « Ghost of Ladbroke Grove » composé par Youth, est un dub évoquant le quartier de Ladbroke Grove, à Londres, quartier qui a vu naître la seconde vague du punk rock et où des groupes majeurs comme The Clash et Killing Joke ont fait leurs débuts. Le morceau, à l'ambiance sombre et nostalgique, parle des « fantômes » qui hantent le lieu : ceux des musiciens, de la famille et des amis décédés ou éparpillés mais aussi celui d'une forme de rébellion contre l'ordre établi. Pièce maîtresse d’un album marquant dans la discographie du groupe. Sans doute, le chant du cygne (un énième !) d’un rassemblement d’individus au sommet de leur art. MAGISTRAL.

photo de Eric D-Toorop
le 01/12/2010

6 COMMENTAIRES

Toudoneki

Toudoneki le 02/12/2010 à 06:56:32

Cet album est incroyable. J'ai tellement pris l'habitude d'être déçu par tous ces retours aux sources foireux (Korn en tête, avec leur infâme bouse), que je ne savais pas quoi attendre d'un nouveau Killing Joke. La légende voulait qu'environ tous les deux chef d'oeuvres, KJ nous sorte un album moyen (Democracy) ou même mauvais (Outside The Gate), alors après l'épo de 2003 et Hosannas, on pouvait s'attendre à de gros risques, surtout qu'on connait le terrain assez glissant depuis la mort de Raven.

Mais merde, cet album est une tuerie! Une heure de pur plaisir, extremement bien dosé (les 4 premiers titres sont bons, sans plus, mais sont un parfait tremplin pour la meilleure partie (de Endgame à la fin), sans oublier le single electro pop, non seulement réussi commercialement parlant mais artistiquement infaillible..le rêve; on repense à Love Like blood, on constate que 25 ans les séparent et que le groupe est bien meilleur).

Ce que j'aime le plus, et ce qui m'a le plus enthousiasmé, c'est que le sens de la mélodie de Coleman n'a jamais été aussi bon! je ne m'attendais pas à ce que ce soit si inspiré (et je repense à tous ces groupes qui se vautrent question inspiration..les Depeche Mode, Korn, Metallica,....).

Ce qui est dommage, c'est justement les titres plus en phase avec la période KJ 2003, surtout This World Hell, qui est le seul titre de l'album que je ne supporte pas. mais un titre sur douze..ça ne me tue pas.

L'autre déception, c'est justement cette promo limitée. L'album aurait mérité un accueil beaucoup plus chaleureux et à une plus grande échelle.

Ouaip..magistral.

gretschy

gretschy le 02/12/2010 à 19:36:47

Légère déception après le monumental Hosannas, mais ça reste du très bon cru !

Ukhan Kizmiaz

Ukhan Kizmiaz le 03/12/2010 à 11:52:19

J'aime beaucoup l'album éponyme de 2003. Pour Hosannas pareil. Les 4 premiers titres convaincants.. mais pas à en faire un classique.
Ici, je pense vraiment, que ce disque est taillé pour le devenir, un classique de chez classique.
GRAND disque !

frolll

frolll le 08/07/2011 à 09:47:00

Putain, et dire que des vieux release ça :o

R.Savary

R.Savary le 24/04/2012 à 09:59:22

Bien d'accord avec tout ça, et puis terrible leur passage au Hellfest 2010 où l'on pu se rendre compte de l'excellent rendu live des chansons de ce Absolute Dissent !

R.Savary

R.Savary le 24/04/2012 à 10:01:36

Hellfest 2009 je voulais dire

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