Kokomo - Monochrome Noise Love

Chronique CD album (62:00)

chronique Kokomo - Monochrome Noise Love

« Kokomo » est cette aimable ritournelle des Beach Boys que l'on retrouve en 1988 sur la b.o du film Cocktail avec l'inénarrable Tom Cruise en barman vitaminé et impeccablement coiffé. Cette chanson, écrite en partie par Terry Melcher (le fils adoptif de l'actrice Doris Day) connaît une belle vie sous le format du 45 tours. Cette année-là, elle termine de justesse, à la deuxième place, du meilleur titre de film le plus joué. C'est le batteur sourd Phil Collins qui rafle la mise avec « Two Hearts » pour l'insipide Buster.

 

En 2007, Joey Goebel, jeune écrivain américain, publie Torturez l'Artiste ; pamphlet anti-establishment, à charge de l'industrie culturelle de son pays qu'il considère vide de sens. L'ancien chanteur punk (dans The Mullets) règle ses comptes avec les dictats  dédiés à des fins purement commerciales. « Kokomo » en est un extrait de cette nouvelle. Les allemands s'inspirent de l'ouvrage pour leur patronyme... davantage que la chanson finalement, puisque leur musique est presque exclusivement instrumentale... et à la première écoute, on ne parlera pas de ritournelles.

 

À la présentation de Monochrome Noise Love, leur quatrième opus, les allemands insistent sur le fait que l'ouvrage n'est pas un concept album, comme ils ont pu en faire auparavant. Le disque se veut plus sombre, écrit en quintet pour la première fois, et explorant des sons différents de leurs précédentes sorties. Comme il s'agit d'une découverte pour votre serviteur, je ne me prononcerais pas sur les intentions annoncées. Par contre, pour ce qui est de concept album, on en tiens l'un des plus manifeste exemplaire depuis longtemps.
Pas un hasard, si le Mellon Collie and The Infinite Sadness des Smashing Pumpkins trône en bonne place de leurs disques préférés.

 

Vous savez, la chose post-rock a ceci de marquant pour elle, c'est qu'elle incite à la rêverie, à l'image et bien souvent à une b.o organisée pour nos propres films intérieurs.
La lumière est belle chez Kokomo et le cadrage... à quatre épingles.
Les arrangement sont superbes et la participation de la multi-instrumentiste et chanteuse Judith Hess (de Lingby – groupe pop orchestral) sur « Pills and Pillows » et « I'm not dead » ; et ceux de Vanessa Kreutz – violoniste classique- sur un bon tiers des titres n'y sont pas pour rien. « Kill the Captain, feed the fishes », deuxième titre de l'opus est un monument du genre !

 

Monochrome Noise Love comporte 10 titres pour un peu plus d'une heure de musique. Les arrangements, les incursions dans le Metal...les riffs et la voix dans le libéré « Me vs Myselves », le jeu inventif de la basse font que l'on s'ennuie pas un instant.
De Godspeed You ! Black Emperor, ils ont adoptés une certaine malice pour construire des mélodies presque fragiles qui arrivent, chaque fois à surplomber le mur de guitares érigé.

Comme souvent, dans pareille oeuvre, il est difficile de détacher l'un ou l'autre titre de l'ensemble. « I'm Bill Murray » offre une synthèse intéressante du post-rock avec ses tics et son sens de l'envolée.

 

Avec ce quatrième album qui sort sur triple alliance de labels (ou copains) I Corrupt Records, Dunk ! Records et Aloud Music, les natifs de Duisbourg, patelin industriel (sic) de près de 490 000 habitans situé dans la Rhur ; imprègnent durablement leur monde bâti sur des riffs (solides) et l'introspection.
Ce n'est pas un hasard que les samples épars qui sont repris dans « I'm not dead » par exemple sont extraits de la série True Detectives.

 

Kokomo, des gens bien dans leur temps, bien à l'abri de la simple ritournelle d'été !

 

photo de Eric D-Toorop
le 14/09/2017

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