Nocturnus A.d. - Paradox

Chronique CD album (52:09)

chronique Nocturnus A.d. - Paradox

Entombed A.D., Nocturnus A.D., Farf A.D., Cajdefar A.D., Musc A.D. Si le suffixe "A.D." signifie bien évidemment « On n’a plus le droit d’utiliser le nom de feu notre groupe… Mais devine qui c'est-y qui revient? », l’esprit du fan fatigué par les déboires juridiques de ses ex-groupes préférés traduit souvent cette acronyme final en un moins reluisant « Le même groupe, mais dégradé » (Degr A.D.? OK j’arrête). Pourtant il faut savoir regarder au-delà des tirages de couettes entre ex-membres, et ne juger ces fragments de formations courant derrière un succès révolu uniquement que sur la musique qu’ils proposent. La qualité de Bowels of Earth, le dernier Entombed A.D., est là pour nous le rappeler.

 

Alors voyons voir ce que ce Paradox propose… Mais d’abord, petit rappel rapide: Mike Browning, ex-Morbid Angel, a créé Nocturnus en 1987. Il sort 2 albums, The Key et Thresholds, devenus depuis référentiels, puis se fait lourder de son propre groupe pour d’obscures raisons que j’ai oubliées si je les ai jamais sues. Les organisateurs de la mutinerie continuent un temps à naviguer de l’avant en sortant un 3e album de relativement triste mémoire, pendant que Mike forme After Death, groupe qui ne sort que des démos et pioche dans le répertoire de Nocturnus en live. Las, Mike finit par former un Nocturnus A.D. au patronyme plus vendeur qu’After Death, et revient pour l'occasion avec son premier vrai album depuis un sacré bail.

 

Ça sent la poussière et les envies de revanche tout ça!

 

Certes. Mais avant de vous asséner les vérités définitives du chroniqueur sûr de ses goûts, laissez-moi quand même vous avouer que je ne connais vraiment que Thresholds, album qui fût le 3e CD d’une collection qui en compte maintenant moult. Du coup si je loupe tel clin d’œil ou telle référence évidente, je demande la clémence du jury. Fin de la piteuse parenthèse...

 

Ce qui saute aux oreilles quand on cale Paradox dans son lecteur, c’est que le retour aux racines est sacrément réussi. En terme de style, de son, de composition, d’ambiances: la patte et le feeling Nocturnus ont brillamment été préservés. A tel point qu’on pourrait croire l’album sorti en 1994, 2 ans après le second opus. On y retrouve ce Technodeath touffu, tarabiscoté, au clavier très présent, dont l’occultisme spatial nous mène de galaxies abandonnées en divinités cosmico-rientales oubliées. Même le chant – qui pourtant était assuré par Dan Izzo sur Thresholds, alors que c’est Mike qui reprend ici le flambeau – a su conserver cette dynamique et ce grain particulier, relativement mat et monocorde, qui colle si parfaitement aux morceaux. La prod est merveilleusement poussiéreuse, cette poussière qui sent le vieux tableau de bord de soucoupe retrouvé dans la malle de Grand Mamie, et non pas le fond de garage miteux du Tonton à Kevin. C’est un peu étouffé, un peu granuleux, mais on sent qu’il s’agit d’un choix assumé, et pas d’un manque de moyen. Côté compos on retrouve ces longues pelotes duveteuses à la structure souvent abrupte, pleines d’à coups et de heurts, mais truffées de passages sympas et de soli alambiqués.

 

« Seizing The Throne » démarre les choses avec faste en ouvrant grand la vanne du plaisir nostalgique. La compo est longue, le clavier adoucit les contorsions vicieuses des guitares, la patte tourmentée d’un Morbid Angel affleure parfois, quand ce n’est pas l’élégance du Pestilence de Spheres, lors de cette multitude de courts leads qui clôt le morceau. Et de là l’album enchaîne les titres sans jamais vraiment faiblir… Ni, malheureusement, réussir à imposer de véritables nouveaux incontournables. On savoure le voyage minute après minute, le nez collé au hublot. On a la pupille qui brille, l’oreille gourmande… Mais on a cette diffuse impression de rester un spectateur extérieur, la musique refusant de réellement pénétrer en nos trépidantes intimités afin de ne plus faire qu’un avec nous. Peut-être est-ce dû à ces moments où le synthé se fait criard, sur « The Bandar Sign », « Paleolithic » ou encore « Number 9 ». Peut-être sont-ce ces loooongues intros, sur « The Return of the Lost Key » et « Apotheosis » (plus d’une minute à chaque fois!). Peut-être est-ce ce dernier morceau qui se contente de dérouler un seul et même thème mélodique pendant près de cinq minutes afin de servir de toile de fond à une myriade sans fin de leads – de guitare, comme de clavier.

 

Toujours utile que – vous l’aurez compris – malgré les paillettes, malgré les prouesses techniques, malgré le faste et les dorures, malgré un retour réussi à l’époque des 2 premiers albums, Paradox échoue à me mettre le feu au ventre. C’est ballot, tiens. J’écoute et réécoute cet élégante nouvelle sortie comme une convive repue devant un riche festin: malgré de multiples plats plus alléchants les uns que les autres, j’ai du mal à vraiment m’enthousiasmer, comme s’il n’y avait plus vraiment d’espace libre en mon système auriculo-digestif pour assimiler la chose, et la savourer à sa juste valeur.

 

Ça vient de moi, dites-vous?

 

Je vous le souhaite.

 

Allez, 7.5, parce que c’est quand même de la sacrément belle œuvre!

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: même son, même patte, même technique, même clavier, même riffing, mêmes thèmes. Le Nocturnus A.D. nouveau est dans la parfaite continuité de Thresholds et son grand-frère. Alors allez savoir pourquoi, mais malgré de belles compositions joliment travaillées, l’album refuse de tracer un grand sourire sur ma face de vieux fan encroûté. J’en attendais sans doute trop, notamment côté accroche. A vous de voir, tout cela étant vraisemblablement hautement personnel.

photo de Cglaume
le 04/10/2019

9 COMMENTAIRES

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 04/10/2019 à 21:42:50

Entre Technodeath et Death technique, c'est quoi la différence ???

cglaume

cglaume le 05/10/2019 à 00:15:52

C'est pareil. Mais on disait Technodeath quand j'étais djeune :)

korbendallas

korbendallas le 07/10/2019 à 10:21:08

Perso je fais une différence ... dans le techno death, la technique pose une ambiance, dans le death technique, elle est démonstrative, comme pour beaucoup de groupes actuels et généralement plus brutaux (origin et compagnie ...) :)

cglaume

cglaume le 07/10/2019 à 11:22:51

Je ne l’avais pas vu comme ça mais c’est vrai que ça colle aussi avec l’usage qui en est fait. Pour Origin et compagnie, perso j’étiquette ça Brutal Death technique. Cephalectomy il faudrait appeler ça du Brutal Technodeath alors ? :)

korbendallas

korbendallas le 07/10/2019 à 13:44:09

Oui voilà, je pensais à du brutal death technique, tous les trucs de chez Unique Leader quoi :) ... je fais la différence car autant, j'aime beaucoup le technodeath, autant le death technique ça me les brise :)
Cephalectomy ? connait pas ! C'est un croisement entre Origin et Cynic du coup ?

cglaume

cglaume le 07/10/2019 à 14:20:29

C'est du Death brutal mais melodico-atmosphérique, et finement agencé. Ça m'avait bien fait craquer il y a quelques temps de ça : https://m.thrashocore.com/chroniques/chronique/3158-cephalectomy-an-epitaph-to-tranquility-2009-chronique.html

cglaume

cglaume le 07/10/2019 à 14:22:30

Du coup c'est plus Edge of Sanity que Cynic :)

korbendallas

korbendallas le 10/10/2019 à 13:51:58

Je viens de jeter une oreille à Cephalectomy ... Ouille, la BAR ça pique ... rédhibitoire pour moi !

cglaume

cglaume le 10/10/2019 à 19:16:50

Oui c'est vrai, il y a cet aspect...

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