Organized Chaos - Inner Conflict

Chronique CD album (1:19:01)

chronique Organized Chaos - Inner Conflict

Ce n’est pas la première fois – et sans doute pas non plus la dernière – que je l'affirme, mais crénom: Bandcamp est vraiment un moyen génial de faire de sacrées découvertes! Comment, sans ce genre de site qui permet de farfouiller dans le bouillonnant bain créatif des formations non signées, réussirions-nous à croiser la route de groupes aussi improbables qu’Organized Chaos? Improbable oui, c’est le mot, du moins pour ceux qui, comme vous a priori, évoluent dans le microcosme de la metalosphere francophone. Parce que, dites-moi: où l’auriez-vous déniché, vous, ce groupe serbe dont le premier album autoproduit donne l’impression d’écouter un Operation Mindcrime du IIIe millénaire, croisé avec les registres de Devin Townsend, Pantera, Symbyosis, Shaolin Death Squad ou encore Uncolored Wishes? ... Mmhh? D’habitude non seulement ce genre d’entreprise nous passe bien loin sous le nez – au niveau des chevilles, voilà –, mais de plus, si d’aventure on tombe sur une galette élaborée selon ce genre de configuration, les règles de Mesdames Logique et Statistiques sont formelles: il s’agit alors d'un brouillon certes plein d’ambition et de bonne volonté, mais souffrant d’un manque de moyens comparable aux bouts d'ficelle d'un Plan 9 From Outer Space.

 

Parce que, diantre: Rome ne s’est pas faite sur une première autoprod’, par un groupe de petits jeunes issus de contrées dont on serait bien embêté si on nous demandait d’en citer les 3 plus grandes villes…

 

Et pourtant… ‘tin TIIIIIIIIN!! Inner Conflict est un superbe album tout de longues compos constitué, dense, fastueux, technique, sensible, théâtral, sophistiqué. Une bien belle œuvre pleine de dentelles, de riffs modernement musclés, de piano, de chants variés et profonds, de pétages de câble, d’ambition, d’atmosphères et de mélodies extrêmement léchées. Tout ça, oui. Avec même, parfois, des violons et du hautbois. Ouaip. Le tout possédant par ailleurs le label qualité "Grosse Prod Inside". Allez, tout juste regrettera-t-on que le son de la guitare soit un peu synthétique et plat – pas tout à fait la gouaille grésillante des Cowboys From Hell quoi…

 

Et puisqu’on en est à évoquer l’une de ces petites échardes qui entachent la finesse de cet imposant édifice en chêne massif, profitons-en pour finir d’emballer le méchant paquet des reproches qui empêchent l’album d'obtenir la même note qu’un Cybion ou un Maestro. Le problème c’est qu’une quantité non négligeable de morceaux font un peu trop dans la complainte dramatique de ténor Rock blessé (« Beacon of Hope »), ou dans le rose bonbon d’échanges impliquant le berger Vladimir et la bergère Marta (« Love », ou « The Beginning of Something Beautiful » qui incorpore pourtant une basse et un synthé Nature&Découverte évoquant Sadist). De plus il n’est pas rare que l’on soit balloté un peu sauvagement entre des parties qui gagneraient à être emboitées selon une logique plus globale, cette occasionnelle absence de cohésion laissant parfois l'impression d'évoluer le popotin entre 2 chaises, ceci malgré les somptueux décors et costumes où se déroule l’action.

 

Maintenant Inner Conflict regorge de subtiles dorures, délicates dentelles et autres tours de force artistiques qui titillent les sens, ceux-ci donnant parfois naissance à des morceaux fleuves particulièrement dantesques comme « Prejudice Idol », le relativement foutraque « My Own Personal Garden of Sin », ou encore le morceau-titre. Mais aussi au très rythmique « Hey God! », ou encore au final « Antidote » qui s'offre quelques séances de zouaveries dont une improbable performance de scat évoquant – bizarrement – Toehider. Et il faudra encore mentionner le magnifique « La Sonrisa Eterna » qui nous caresse d’une délicate main de brunette italienne…

 

Le petit plus (... non: le GROS plus) de cette formidable pièce en 14 actes, vous l’aurez compris au détour de certaines des remarques explicites ci-dessus: c’est une propension peu fréquente mais néanmoins régulière à incorporer des éléments purement Nawak à cette grande épopée dramatique. Du coup ne vous étonnez pas de voir passer un passage chaloupé à la Sebkha-Chott vers la fin de « Prejudice Idol », un craquage SYLien et du gros groove snap’y’fingaz sur « My Own Personal Garden of Sin », ou encore une envolée Soul’n’Blues sur la 1e moitié d’« Antidote ». Et ça, ça fait toute la différence!

 

Vu la maturité et la richesse de cette première œuvre, je n’ose imaginer ce que le groupe pourrait faire avec les gros moyens d’un label d’envergure, ainsi qu'avec ce petit supplément d’expérience qui permet d’éviter les derniers écueils. Parce qu'on ne s’en rendait pas forcément compte vu d’ici, mais dieu que le chaos peut accoucher de belles choses en ex-Yougoslavie, pour peu que celui-ci soit organisé et non pas accompagné d’un ballet d’impuissants casques bleus!

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: l’ambition et la sophistication d’un Queensrÿche, quelques riffs à la Pantera, des craquages de bon goût à la Shaolin Death Squad, des touches Devin Townsendesques, une mise en scène et des costumes fastueux… Inner Conflict ne vous laissera froid que si vous êtes fans de Black nihiliste, de Drone comateux ou de Punk hystérique.

photo de Cglaume
le 18/08/2016

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