Amuse to Death - Phantasmagoria

Chronique Maxi-cd / EP (16:45)

chronique Amuse to Death - Phantasmagoria

Je suis désolé, je vais sans doute me répéter. Mais après toutes ces années à écouter des guitares qui pétillent et écrire des chroniques qui frétillent, comment l'éviter ? Le propos, donc, que vous aurez peut-être déjà lu ici, le voici : mes yeux s'emplissent d'étoiles dès que sont évoquées ces années (2007 & 2008) où, en quatre salves relativement rapprochées, Diablo Swing Orchestra, Stolen Babies, Pin-Up Went Down, puis Akphaezya ont jailli du néant tels des diablotins malicieux zébulonnant hors de leur boîte, avec chacun un premier album époustouflant sous le bras. Leurs points communs ? Un peu d’astuce, d’espièglerie, et de grosses louches de nawakeries. Ainsi qu’un micro confié à une brillante diva affublée d’un gros, gros grain.

 

Depuis lors, pas beaucoup d’équivalents pour égayer nos foyers. Du moins pas dans l’exact créneau où s'étaient lovées ces formations. En dehors de Kontrust, bien sûr. Et de Tardigrade Inferno. Et de Dirt Poor Robbins – allez, je vous l’accorde également celui-là. Et d'öOoOoOoOoOo, même si c’est de la triche, parce qu’il s’agit plus ou moins de la suite "logique" de Pin-Up Went Down. Bon, ok, ok : ces quinze dernières années ne se résument donc pas qu'à disette et pénurie. M’enfin vous avouerez qu’on ne peut pas non plus parler d’abondance…

 

C’est là qu’entre en scène Amuse to Death, groupe allemand qui – z’êtes trop forts, vous avez deviné – ne pratique pas le Depressive Gothic Metal, mais bien un Nawak Metal soyeux du chant et stylistiquement chatoyant. Si vous leur demandez directement, ces joyeux lurons seront cependant un poil plus précis : ils vous parleront de « Swinging Cartoon Progressive Death Metal ». Et pourquoi pas, après tout… Même si le « cartoon » en question fait plus référence à leur univers visuel qu’à leur production musicale stricto sensu. Et même si – 2e bémol – on pourrait en fait élargir le spectre au « Metal extrême » plutôt que de se cantonner au Death – le riff qui occupe seul les six premières secondes de l’album, sans froufrou ni costume coloré, sonne plus Black que Death. Sinon, en effet, tout ça sent le cabaret déluré, les doigts qui claquent, ainsi que le blast, les Groâârg d’ours mal léché, et les riffs rugissants. Car à ma gauche, c’est un cor que vous entendrez encuivrifier les compos, avec, dans sa roue, la voix d’une Carmen Grandi semblant tout droit sortie d’Akphaezya. À ma droite, en revanche, c’est toute l’expérience de Tom "Fountainhead" Geldschläger – membre de Nyn, ex-guitariste d’Obscura, ancien mercenaire live pour Belphegor, Defeated Sanity et Nader Sadek – qui nous garantit sur facture une dimension Metal particulièrement affutée.

 

Phantasmagoria est le premier EP de ces musiciens qui, si l'on en croit leur patronyme, s’en payent une telle tranche qu’ils sont à deux doigts d’en casser leur pipe. Et celui-ci – l'EP – fait office d’appétissant apéritif (… car, oui : on espère un album !). « Ill Fated », qui ouvre les hostilités, offre exactement ce à quoi l’on pouvait s’attendre : un Nawak Cabaret Metal légèrement sombre, mais également bien punchy, qui donne envie de chalouper du boule et de porter un Borsalino. Sur « Blacktoothgrin » – qui commence pourtant tout au fond de la boîte de Jazz – de furieux accès de Tech Death brûlant et autres geysers de décibels rappellent quant à eux ces jours heureux où Unexpect sortaient des disques joyeusement exigeants…

 

Après deux morceaux, mis en confiance, on se dit naturellement : « Mais c’est que ça miame tout ça, dites donc ! ». Oui, malgré cette prod’ pas vraiment nickel chrome (faite maison, par Tom), qui sent l’enregistrement en conditions live – ce qui est plutôt un plus – mais qui manque de coups de ponceuse et de couches de vernis. Ça gratterait même aux entournures, sous ce léger voile obstruant. Heureusement, notre attention est vite détournée par l’accroche folle de « Lowlifer », son groove insolent, ses riffs tranchants, et son cor claironnant. Le mélange Metal / Youpla y culmine au maximum de l’inspiration : croyez-le ou non, on est à deux doigts de squirter – oui, même un vieux lapin poilu comme moi (remarquez c’est peut-être un problème d'incontinence dû au grand âge)…

 

Le tableau serait pas loin d’être uniformément positif si, en piste #4, « The Alibi » n’occupait pas trois bonnes minutes – autrement dit toute sa première moitié – à minauder dans le tiède et le sucre. Puis, pendant la 2nde mi-temps, s'il ne passait pas tant de temps à dispenser du solo en veux-tu en voilà, chacun des musiciens en présence participant à cette trop généreuse distribution (… non, pas le batteur, faut pas déconner quand même). Scrogneugneu : ils auraient pu imaginer final plus équilibré ! Même si, soyons honnête, la prestation reste quand même de qualité.

 

Alors voilà M. le Juge : c’est vrai, Amuse to Death fait beaucoup de bien au-dedans de la tête et des oreilles. Il nous amène parfois même à la limite de la jubilation auriculaire. Il s’avère pointu de la technique, généreux du swing, et mérite aussi bien notre attention que nos applaudissements. Mais sa proximité un peu trop grande avec Akphaezya, son enveloppe sonore perfectible, et ses aurevoirs un peu en deça m’obligent à réclamer pour lui une peine de 7,25/10 ferme, avec en prime inéligibilité au poste de Meilleur EP Nawak 2024. Mais je comprendrais tout à fait que vous lui accordiez votre clémence et, conséquemment, un sursis : son avenir semble en effet des plus prometteurs…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte : Amuse to Death, comment dire… C’est une sorte d'Akphaezya allemand, mais mis sur pied par un ex-Obscura. Un cousin germain d’Unexpect qui passerait plus de temps à arpenter les cabarets que son regretté parent québécois. En guise de carte de visite, celui-ci nous livre Phantasmagoria, un premier EP qui aurait eu une bien meilleure note si son enveloppe sonore avait été plus limpide, et son dernier morceau plus pimpant. Affaire à suivre très bientôt – du moins l’espère-t-on sincèrement !

 

 

 

photo de Cglaume
le 02/01/2025

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