Dukatalon - Involuntary Action

Chronique CD album (47:01)

chronique Dukatalon - Involuntary Action

Il y a des groupes dont l’œuvre s’impose comme une évidence. Ce Involuntary action de Dukatalon se place sans crier gare comme une claque : un joyau, une bombe thermonucléaire... Cédons même à l’outrecuidance de bousculer les gros mots : un chef d’œuvre.


Sur le papier, le trio de Tel Aviv brandit la bannière du sludge. Sur le terrain, ou la platine, c’est bien plus que ça. Témoin, la biffle qui ouvre « Involuntary action » : la prod s’avère propre, précise, moderne, dans l’air du temps. On pense au son de grands groupes tels que Meshuggah. Musicalement, qui dit sludge pense aux 3 L : lent, lourd, long. Eh ben que nenni. Ici, les titres tournent autour des 5 minutes à peine, en moyenne, les riffs, s’ils se veulent agressifs, ne traînent pas dans une fange propre au genre. Les trouées aériennes se font cependant rares, car l’ensemble reste incisif et percutant, notamment grâce à un chant râpeux à souhait. Mais ce qui frappe surtout, dès l’écoute de « Above the flames », c’est comment, en quelques minutes (5 minutes dans le sludge, c’est court), le groupe passe aisément d’une ambiance à l‘autre sans crier gare. Sans fioriture, sans intro, on plonge sans préambule dans son univers avec 2 riffs lourds, chaloupés, en fusion, invitant à la transe en faisant l’économie de tout préliminaire. Deux minutes plus tard, une fois le tableau dressé, sans transition, le titre s’emballe : ça martèle, ça cisaille dans les chairs et les esprits sans se soucier des éclaboussures. Même lorsque les premières trouées aériennes viennent apporter mélodies et légèreté (dans le même 1e morceau), on reste dans une ambiance générale de fureur tellurique. En résumé : en un morceau, en 5 minutes, les Israéliens nous baladent déjà aux quatre coins de leur univers en combinant avec brio 3 ambiances différentes savamment dosées.


Si ce coup de maître vous a séduit, vous pouvez fermer les yeux et plonger à pieds joints et oreilles grand ouvertes dans le reste de l’album. Ce qui vous attend à l’atterrissage est un gouffre sans fond dans lequel vous vous abîmerez avec délice. C’est simple, chaque titre apporte son lot de bonne surprise. Entêtant, hypnotique et lourd (« No consolation »), proche du death metal avec un mid-tempo lancinant (« Conscience bleeds ») et des arrangements inquiétants (entendez les sirènes sonner comme des trompettes de l’apocalypse au lointain) ou encore solennel, rampant et martial (« Dark pool »), lorgnant l’univers sidéral de Meshuggah, l’album dévoile mille et une bifurcations au chemin tortueux qu’il emprunte, à chaque titre.


Extrêmement précis dans les constructions complexes de ses titres, l’album s’enrichit de chaque détail de chaque chanson, de chaque rupture, de chaque arrangement, pour constituer un tout protéiforme qui le place parmi les albums qui exigent une écoute attentive répétée pour en saisir toutes les arcanes mais qui, dès la première visite, happe définitivement l’auditeur dans le tourbillon de son univers aux richesses infinies. Prenez « Blackened disease » par exemple : une courte intro à la basse, des couplets tirés au cordeau, un refrain au groove démoniaque, et un break chaleureux pour un final lourd mais charnel : le titre prend par la main l’auditeur mais le laisse glisser sur chaque piège qui se tapit sur le chemin qu’il trace. Sans jamais laisser l’ennui s’installer. Inutile de s‘attarder sur le court interlude acoustique « Myopia » qui sert à mieux rebondir sur « Angels in red » sur les riffs duquel il sera impossible de s’empêcher de dodeliner furieusement de la tête, ou encore sur le titre de clôture, le plus long et le plus thrash de l’album, qui finit d’ouvrir en grand les vannes pour mieux déverser des torrents de lave au fond des oreilles : on l’aura compris, « Involuntary action » ne contient aucun déchet, aucun morceau à jeter, mais au contraire, sans s’éterniser inutilement, cache moult chausse-trappes sur lesquelles on se plantera allègrement. En un mot : un album parfait, qui vous fait aimer saigner. Chef d’œuvre, qu’on vous dit !

 

photo de Moland Fengkov
le 14/01/2021

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