Greet Death - New hell
Chronique CD album (48:00)

- Style
Bad depression - Label(s)
Deathwish Inc. - Date de sortie
8 novembre 2019 - écouter via bandcamp
"On a fait un portrait photo d'eux avant
et après avoir écouté le dernier Greet death".
On ne peut pas dire que Greet death répande la joie sur Terre. Moi-même, ayant une certaine propension à la dépression, je me suis plusieurs fois demandé s'il était vraiment utile de continuer à vivre à l'issue d'une première écoute. Mais finalement, à force d'essais, c'est fait : je suis bien mort intérieurement et je peux donc te parler de ce second album sans avoir envie de m'ouvrir les veines (surtout qu'il ne reste que des couteaux à beurre dans le tiroir et que j'ai la peau qui marque vite).
Il y a eu un premier album (que je n'ai pas écouté, les journées sont courtes, les sorties d'albums trop nombreuses) qui nous a totalement échappé, mais, à la limite, on s'en branle, on est là pour causer de New Hell.
Tu l'as compris, c'est pas le genre de disque à coller un soir de merguez-party mais il pourrait bien t'accompagner pour alimenter tes grosses soirées de bad.
Le trio américain joue avec une certaine "nonchanlance désabusée". Le rythme lent, lourd marqué par une batterie dont les frappes cinglantes sont accompagnées par une grosse basse rondelette : un gros coup de frein à l'effervescence d'une vie, d'une société, d'un monde dans lequel on ne prend plus le temps de rien.
Greet death, lui, a décidé de (nous faire) ralentir tout en nous enfonçant dans une certaine gravité. Le "post-rock" saturé des trois musiciens n'a rien d'époustouflant musicalement, il se contente assez classiquement de reprendre des gimmicks bien connus (voire usés) du genre.
Mais il n'est pas nécessaire d'être une bête techniquement pour sortir un album qui tord autant les tripes : Greet death enchaîne les pistes en modulant à chaque fois ses structures, en proposant des chants différents, des tonalités et sonorités parfois même inattendues (l'improbable solo qui aurait pu sortir du fin fond du bayou sur "You're Gonna Hate What You've Done" etc.).
Rien n'est fixe dans l'écriture du groupe : terriblement sombre pendant plus de 30 minutes, il peut aussi se révéler d'un seul coup, tristement lumineux sur "Crush". Tristement quand même hein.
Parfois hypnotisant avec ses arpèges mis en boucle en plus de son rythme nonchalant, le groupe réussit à toujours surprendre avec des titres marathons dont on ne voit pas défiler les minutes ou au contraire des titres courts. Avec une apparente facilité, avec une violente douceur, les structures mouvantes du groupe mettent de l'animation dans un disque qui réunit pourtant tous les ingrédients pour ne pas en avoir. Mais le groupe est touchant. Au-delà de la "naïveté" de ses gimmicks de genre conventionnels, l'interprétation vocale à deux voix ajoutée aux textes délivrent un message qui respire la sincérité et cette "fragilité" communicative.
Allez, osons le gros mot : émo. Enfin, c'est pas vraiment de l'emo hein.
Le terme autrefois galvaudé, maltraité, totalement dénaturé trouve tout son sens à chaque mot, sur chaque note. Il y a pourtant une certaine justesse, une mesure, un équilibre dans leur post-rock-emo (un peu inspiré des 90's) : la mollesse et la saturation servent une mentalité sombre et finalement nihiliste qui semble transpirer jusque dans la dénomination des pistes. On a l'impression que le groupe semble dire sur chaque titre : "Allez, faisons du passé table rase...et puis ne reconstruisons rien". Ce message semble marcher à toutes les échelles de la plus petite (personnelle, introspective) à la plus grande (ben...l'humain, la société, le monde entier).
Il suffit de jeter un oeil sur les paroles ou même la pochette au style visuel si proche de l'expression graphique médiévale de l'Apocalypse (ou à la Jérôme Bosch) pour comprendre que ce disque ne parle que de destruction en attendant une ère nouvelle sous le signe du chaos. (Je te remets en gros l'affiche en fin de chro pour que tu puisses te rendre compte).
Il vaut mieux avoir le coeur déjà bien lourd pour écouter Greet Death. Un forme d'expression de son désarroi sans aller sur le forum "dépression" de Doctissimo ou un groupe Facebook de collapsologues : Greet death est l'oeuvre publique d'un trio pour une expérience d'écoute personnelle et même solitaire.
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