One Step Closer - This Place You Know

Chronique CD album (28:16)

chronique One Step Closer - This Place You Know

Je suis assez facilement influençable en ce qui concerne le rajout de nouveaux noms à mon interminable liste d'albums et de groupes à écouter (et je sais de source sûre que la vôtre ne l'est pas moins). Alors quand sur le forum de CoreandCo, daminoux parle de This Place You Know par One Step Closer comme de l'un, voir de son disque de hardcore de l'année, ça m'intrigue. De 2021 certes, parce que je suis en retard (à vot' service), mais quand même. Et d'autant plus lorsque ledit disque reçoit en parallèle les commentaires plus qu'élogieux de Raton du côté de chez Horns Up, qui a jugé bon d'en faire une chronique à part entière en plus de sa trimestrielle Bagarre récapitulative (Bagarre dont je recommande par ailleurs la lecture à celles et ceux qui aiment le hardcore et ses dérivés ou les trucs peu recommandables que j'ai tendance à chroniquer ici moi aussi).

Je m'y lance donc gaiement, avec un a priori tout de même fort positif, solidarité animale oblige.

 

Bref, une fois les poils lissés donc, et quelques réserves de bouffe pour passer l'hiver, on se confronte à la pochette, qui semble renvoyer assez directement à l'inspiration de Hyeronimus 'Jérôme' Bosch, tout de même, à moins que je ne me trompe. Et en plus violet, certes. Un premier plan assez apocalyptique et ravagé, où l'on distingue, entre les figures animales et les restes d'effondrement, un petit personnage accroupi regarder pensivement ce qui semble être la nature, les montagnes, de l'autre côté du fleuve, dans l'arrière-plan.

 

On peut voir dans cet artwork (par Jeffrey Kam) l'illustration du concept, ou tout du moins du sentiment qui a guidé les membres de One Step Closer pour accoucher de This Place You Know, jusque dans son titre : “Tout va bien et tu te sens bien du fait d'être chez toi, à la maison, jusqu'à ce que tu perdes des aspects de ce chez toi, et que cet endroit ne te semble plus être le même”, d'autant plus depuis ce printemps 2020 qui nous a tous et toutes un peu chamboulé-e-s.

 

C'est donc logiquement que l'on retrouve le sujet dans les paroles, dès le premier morceau « I Feel So » ou encore « Home for the night », aux côtés d'autres thématiques telles que la perte sur « Leave me behind », l'angoisse de la solitude ou d'un futur assez peu radieux, dans tous les cas liées a des espaces émotionnels, du ressenti et du vécu, ce qui donne – forcément – du poids, en écho, aux émotions véhiculées à travers leur musique.

 

Parce que oui, au-delà d'être propenseurs d'intros à rallonge sur webzines périphériques (et néanmoins magiques, mais faut pas se voiler la face, y'a que pidji qui arrive à se payer des vacances à Charleville-Mézières grâce à l'activité qu'on exerce ici bénévolement, exploités que nous sommes), One Step Closer font aussi de la musique ! Et là, pour le coup, pas la peine de chercher des montages alambiqués, de sortir une carte de Moscou pour essayer de se repérer à Marseille ou de faire appel au bagage musical impressionnant et de l'amour inconditionnel de Crom dans le domaine du hardcore mélodique : One Step Closer s'engagent complètement dans la veine des groupes de hardcore plutôt émotionnels à la Have Heart, Defeater ou Modern Life is War. Ils ont d'ailleurs fait la première partie des deux premiers en 2019, au moment de la sortie de leur EP From Me To You, et ça n'a rien d'un hasard.

 

Très inspirés aussi, signalons-le, par la musique et l'héritage local de Title Fight (autre groupe de punk-hardcore mélodique originaires comme eux de Wilkes-Barre en Pennsylvanie, notamment impliqués dans l'ouverture d'un local où pouvoir organiser des concerts après la fermeture du précédent), OSC slaloment en effet entre les compositions des trois pontes du genre cités plus haut, que ce soit dans les vocaux de Ryan Savitski, vraiment à mi-chemin entre ceux de Patrick Flynn et de Jeffrey Eaton, à la fois hurlé et légèrement étouffé, permettant de bien saisir les paroles en général (bien qu'il passe parfois à deux doigts d'ambiances screamo, sur « Time Spent, Too Long » par exemple, ce qui a une certaine logique, le style étant lui aussi vecteur de pas mal d'émotions : quelques réminiscences de Touché Amoré ?), ou dans les mélodies à deux guitares portées sur fond de punk hardcore.

 

Jusque là, rien de bien fantasque me direz-vous, pas mal de groupes peuvent correspondre à cette description, et je vous répondrais 'certes les p'tits loups, et je n'en mettrai pas mon aile ou ma patte à grignoter sous vos petits chicots, MAIS !'. Parce qu'un 'mais' il y a : dans l'ensemble, ça marche.

 

Et si je ne suis pas du tout, mais alors absolument pas du tout réceptif à la balade centrale « Hereafter » (très emo, tout en chant clair sur fond d'arpèges mielleux et piano, à m'en faire avaler des myrtilles de travers, ce qui serait dommage), elle vient tracer une ligne entre les deux parties plus punk-hardcore de l'album et – convenons-en – elle est plutôt bien réalisée, pour peu que l'on soit friand de ce type d'exercice (et moi, c'est plutôt les myrtilles, vous l'aurez compris).

 

« I Feel So », dès les premières secondes de l'album, lance dans le bain dans ce qui ressemble à un revival de The Things We Carry des sus-nommés Have Heart. Batterie roulante puis typiquement hardcore, mélodie à deux guitares, un bridge mid-tempo, et toujours ce timbre de voix toujours efficace dans le style. Mention spéciale à la fin du morceau et le petit drop sur un « I feel so ! » détaché.

 

« Lead to Gray », le second morceau, ira pour moi plutôt chercher du côté de Modern Life is War pour le coup, même les mélodies rappellent au bon souvenir de Witness. Un petit simili-refrain en voix claires que l'on appréciera ou non.

 

Pour la suite, je ne vous ferai pas l'affront d'un piste par piste. Disons simplement que le titre scandé de « Leave me behind » et les riffs l'accompagnant fonctionnent très bien, tout comme les choeurs de « Home for the night » ; que dans la plupart des morceaux l'exergue est mise sur la fin de piste en intensifiant la mélodie, et en variant la rythmique aussi bien vocale qu'instrumentale ; que des voix claires s'invitent ici et là, bien que rarement ; que le fond de l'air est résolument punk-hardcore mais que les mélodies sont très mises en avant du fait de ces deux guitares.

 

Au bout du compte, This Place You Know est assez 'léger', si l'on peut dire, dans le sens où il n'est pas axé sur la lourdeur, l'agression ou la volonté de distribuer des mandales à tour de bras. Si vous comptiez venir aux concerts avec votre linge sale et un paquet de lessive à balancer dans la fosse en comptant sur les moulinets pour servir de fonction essorage, vous vous seriez trompé d'endroit.

A la différence des groupes de hardcore plus 'old'school', et c'est probablement une question générationnelle et de monde qui a changé, les messages plutôt positifs et classiques du HxC comme se relever ensemble et se battre face au monde ont laissé la place à la désillusion et à la perte de sens.

L'écoute est ici plus axée sur le personnel et l'émotion, plutôt dans le doute existentiel que dans l'affirmation alpha-style, assez fidèle donc à l'héritage stylistique des groupes dont ils descendent.

 

Je ne suis finalement pas aussi convaincu que mes illustres influences à l'écoute de ce disque, mais il n'empêche que One Step Closer se font tout de même une fort bonne place sur la scène du hardcore mélodique actuel avec ce premier long format, qui gagne en profondeur à mesure des écoutes.

 

Par ailleurs, si ça vous intéresse et que la dystopie en cours ne rattrape pas le hardcore, ils passent sur scène à Paris le 7 février.

 

A écouter, comme ils le disent eux-mêmes, lorsque l'on est dans un mood plus introspectif, « à la recherche de la liberté d'être qui l'on veut et qui l'on rêve d'être ». Avec bonus si l'on vit dans une ville marquée par la grisaille (Charleville-Mézières par exemple, je dis ça au hasard).

photo de Pingouins
le 19/01/2022

5 COMMENTAIRES

cglaume

cglaume le 19/01/2022 à 18:25:28

Pidji ? Il loue une suite tout l'hiver à Courchevel, en colloc' avec Bolloré !!

Pingouins

Pingouins le 19/01/2022 à 18:58:39

Je sais pas pourquoi, j'ai lu "en colloc avec Balladur", et ça m'a fait marrer.

pidji

pidji le 19/01/2022 à 19:06:46

Ahahaha bande de nazes !

Tookie

Tookie le 20/01/2022 à 16:55:32

Exactement le genre de truc auquel je suis réceptif. Pas prise de tête et un petit côté "ouin ouin grr grrr" que j'adore.

Freaks

Freaks le 21/01/2022 à 06:00:09

Deux bonnes sorties: La chro et ce très efficace Hardcore melo ;) 

AJOUTER UN COMMENTAIRE

anonyme


évènements