Resurrecting Id - Resurrecting Id
Chronique Maxi-cd / EP (24:08)

- Style
Sax-Djent - Label(s)
Autoproduction - Sortie
2015 - Lieu d'enregistrement Popemobile Studios
- écouter via bandcamp
Ce n’est nullement un hasard si, au coude à coude avec le violon et les boucles BringDaBeatBack de l’Électro, le saxophone (... ainsi que ses frangins cuivrés à grande gueule) est l’un des éléments non Metal les plus fréquemment représentés sur les albums de musique à cheveux longs. C’est que, même en bénéficiant d’un mix particulièrement avantageux, il faut en imposer, avoir du coffre et du volume pour se faire entendre au milieu des déferlantes tchac-boumesques du batteur et des rugissements amplifiés des serial gratteux. Ça, c’est sûr que pour la flûte traversière, le triangle ou encore la harpe, réussir à placer un lead au beau milieu d’une mosh part Slam Death, c'est pas gagné!
Du coup c’est sans surprise que ce gros serpent de laiton se retrouve une fois de plus invité sur une sortie estampillée Metal pour y jouer les "garanties originalité". Car c'est aujourd’hui au tour de Resurrecting Id d'utiliser l'instrument pour tenter de redécorer le bac à sable Djent où il s'ébat dans des tons moins froids, moins déshumanisés que ce à quoi nous a habitués le genre. De l’aveu même du groupe, ce qui leur met le métronome en émoi ce sont des artistes comme Animals As Leaders, John Zorn, et de manière plus générale la scène Prog. Et ce 1er EP 5 titres ne les fait pas mentir, quoique l’extrême télégraphie qui caractérise leur approche mériterait que le terme Djent soit mis en avant avec bien plus d’insistance que celui de Prog, sous peine de voir les Dream Theater groupies s’enfuir en poussant des piaillements d’horreur.
Alors à quoi ça peut bien ressembler du "Djent avec des saxos"? Et bien mot pour mot à ce que laisse entendre un tel énoncé, ni plus ni moins. Sur ces 5 titres, le fond de l’air musical est – comme vous pouvez l’imaginer à l'évocation de cette chapelle accueillant les Meshuggôlatres de tous pays – pilonné en mode stroboscopique par une guitare robotico-rythmique sans concession. Les leads (de guitare comme de saxo) sont volubiles, ceci étant d’autant plus justifié qu'ici nul chant ne vient squatter l’espace sonore. L’auditeur est donc logiquement parcouru de tressautements spasmodiques, la séance de shaker s'avérant tantôt excitante, tantôt usante. Sauf que, pour une fois, le poinçonnage des tympans se fait dans une ambiance plus chaleureuse, plus organique, plus Jazz pourrait-on presque dire, que ce que veut l'usage. On pense forcément aux petits Français de Cartel Carnage – en moins barré et plus « orthodoxe » –, ainsi que, en effet, à la formation de Tosin Abasi… Sauf que Resurrecting Id réussit moins souvent à dépasser son cadre stylistique originel pour s'en aller dessiner ces tableaux, effectuer ces voyages, évoquer ces émotions qui parfois réussissent à émouvoir notre Bisounours intérieur.
Et à vrai dire, en dehors du titre « Awake » – qui réussit véritablement à donner ses lettres de noblesse à cette Fusion moderne, et qui m’a poussé à dépenser les quelques euros nécessaires à l’acquisition de l’EP –, il n’y a pas pléthore de moments où l’écoute de Resurrecting Id nous fait véritablement décoller de nos baskets. La faute à l’une des caractéristiques les moins plaisantes de cette sous-branche moderne du Prog: l’hermétisme. Car trop souvent les mélodies pleines et franches sont méprisées au profit de passages franchement rebrousse-poil sur lesquels les leads dégobillent des notes comme de parfaits autistes, dans l’ignorance quasi-totale des partitions de leurs voisins. Bon, là je force un peu le trait, c'est vrai, mais c'est que nombre de passages sont gâchés par cette approche sans doute un peu trop Jazz pour me plaire, l’inconfort généré venant obscurcir un peu la perception globale que l’on peut avoir d’une œuvre pourtant objectivement très intéressante.
Mais vu que l’EP peut être écouté en intégralité sur Bandcamp – ainsi que, ne l'oublions pas, via notre player, là, en haut à gauche –, inutile d’épiloguer des heures sur Oui-mais-en-fait-la-zic-est-géniale-c’est-juste-le-chroniqueur-qui-ne-supporte-que-la-Pop et Attends-comment-ça-se-branle-la-nouille-en-mode-fractal-là. Resurrecting Id est une œuvre relativement osée, fraîche, exigeante, et « Awake » (pour n’évoquer que le plus-meilleur-du-top-mieux) est vraiment un morceau enthousiasmant. Gardez uniquement ça à l’esprit, et allez-vous tremper les oreilles dans ce bain bouillonnant et intrigant de Metal moderne. Il y a de bonnes chances que vous trouviez cette onde musicale fraîche, profonde-mais-j'ai-pied… Et que vous ayez finalement envie de rester y barboter plus longuement!
La chronique, version courte: quand on emmène de paisibles saxophones paître dans la prairie Djent, qu’obtient-on, d'après vous? Un croisement Animals As Leaders / Cartel Carnage carrément pas vilain, mais qui ne réussit à livrer son plein arôme que sporadiquement, comme sur l’excellent morceau « Awake ». Avis aux fans de télégraphie cuivrée!
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