W!zard - Definitely Unfinished
Chronique CD album (27:15)

- Style
Post Fuzzy Fat Rock’n’Noise’Roll - Label(s)
Autoproduit - Date de sortie
4 juin 2021 - écouter via bandcamp
Trois ans après un album sobrement intitulé “Wizard”, les Bordelais sont de retour avec ce Definitely Unfinished, un EP de 5 titres marqué d’un sceau résolument électrique mais qui ferait trembloter les étiqueteurs stylistiques les plus clivants et les sigillographes les plus chevronnés. Punk? Rock? Trop sale pour l’un mais trop clean pour l’autre, (et les morceaux sont trop longs pour les deux), W!zard nous trimbale sur la frontière entre ces deux styles mais en rajoute un troisième à l’occasion, comme ce sludge fuzzement lourd dans "Dead Space", ou ce rock ultra-noisy comme dans le déluge fréquentielle de l’outro finale de l’EP.
Eux se revendiquent Rock Noise mais je trouve ça tellement réducteur. Qu'on vous explique: on est quand même en présence d'un groupe qui va nous faire manger une mousse citron vert avec inserts de yuzu sur son pralin de feuillantine à la bergamote après nous avoir vendu une "tarte au citron". Non, il y a un moment où quand tu fais de la grande cuisine, il faut assumer et donner un nom qui claque à tes plats. Je ne sais pas si le style existe, mais si je devais tenter le coup je choisirais sans hésiter "Post Fuzzy Fat Rock’n’Noise’Roll".
Plus sérieusement, ce groupe est d’ors et déjà en lice pour mon top annuel car il y a de la modernité dans W!zard, l’impression d’entendre quelque chose véritablement nouveau mais reposant sur des concepts, des recettes éprouvées et surtout reprises avec un respect et une parfaite maîtrise.
Cette intro martiale en guise de première minute, cette sensation de captation à vif immédiatement, ce groupe qui joue faussement “in the pocket”, ces riffs faussement lourds, ces refrains faussement légers, ces arpèges faussement cleans, cette logorrhée fréquentielle faussement noisy, ce math-rock qui nous rappelle faussement At The Drive In...Non content de nous balader dans des ambiances qui diffèrent autant qu’elles s’accordent parfaitement, W!zard enchaîne les faux-semblants tout en restant plus vrai que jamais.
Ils ont cette espèce de classe rock’n’roll et flegmatique, cet élan de fraicheur, cette jeunesse déjà écorchée et mûrie, cette énergie pure qui utilise plus que sa puissance pour exister et se faire entendre. Et si W!zard rappelle beaucoup de choses, W!zard a quand même une saveur reconnaissable.
Le son est superbe, croustillant et chaleureux. Avec Amaury Sauvé (The Phantom Carriage, Mourir, Zapruder) derrière les manettes, pas étonnant. Le mixage est vraiment superbe. Il gère parfaitement les différentes intensités de jeu au sein d’un même titre, il n’y a pas de sensations de "trous", de perte de dynamique et tout cela en maintenant un grain à la saturation hypra-chaleureuse. Un vrai plaisir à l’écoute.
Côté guitare, on a ce grain typique de la Telecaster, du cristallin un peu sec, qui croustillerait presque dans l’oreille, la plus chocapic des guitares. Elle est très rythmique, les leads sont simples mais les accords aguicheraient l’oreille d’un Lee Ranaldo.
La basse est monstrueuse et traitée d’égale à égale avec la guitare. D’ailleurs, le jeu de basse est très guitaristique et de fait a une tessiture très large (elle peut être profondément grave et hautement aiguë), ça change un peu et c’est diablement efficace.
Et comme la caisse claire est très grave elle aussi, on a le droit à une section rythmique martial, métronomique mais assurément vivante et qui ajoute beaucoup de lourdeur à l’ensemble. La voix est parfaite, ni claire, ni éraillée, gouailleuse à souhait, qui vit ce qu’elle chante, qui s’exprime et exprime; avec un côté très anglais et très rock dans l’approche rythmique.
Il y a des groupes qui hésitent entre les styles, papillonnent d’une étiquette à l’autre et ne se positionnent jamais complètement dans un registre. Chez W!zard, le dilemne s’est transformé en trilemne: Rock? Punk? Math-noise? Avec Definitely Unfinished, le trio résout cette équation musicale avec brio et prouve qu’il n’est pas nécessaire d’user de technicité pour faire preuve d’inventivité sonore.
Je vois donc difficilement comment faire le difficile ici. Cet EP ne manque ni de maturité, ni d’inventivité, ni d’énergie, ni de Son (avec un grand S), ni d’une certaine classe, ni l'absence de fautes de goûts, artistiques (toutes subjectives qu’elles soient). Evidemment, 3 ans après un premier album, on en aurait attendu un deuxième mais finalement comme le format EP invite plus facilement à la réécoute, de ce côté là, pas de faute non plus. Ca sera donc un beau 10 bien mérité.
On aime bien: le style multiple à la fois moderne et classique, le son, la qualité d’interprétation
On aime moins: je laisse ici ma place à ceux qui sont vraiment vraiment vraiment difficiles...
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