Alpha Brutal - Upgrade

Chronique Maxi-cd / EP (25:00)

chronique Alpha Brutal - Upgrade

Time remaining for the Upgrade : 25 minutes

 

Vous habitez dans votre petite cambrousse paumée, ne disposez pas de la fibre. Pire encore, votre baraque est en bout de ligne et votre opérateur vous ravitaille via des corbeaux ? Tant mieux cela me laisse amplement le temps de vous parler d'Alpha Brutal et vous dire dans quoi vous vous apprêtez à mettre les pieds en downloadant cet Upgrade, à mi-chemin entre stand-alone et DLC deluxe.

 

Imaginé d'abord comme un one-man band de chambre, Alpha Brutal finit par se muter comme un véritable groupe, figure à quatre visages officiant à la fois sur tableau de bord numérique ProTools et sur véritables planches de bois organiques. Un premier EP éponyme finit par montrer le bout de son nez il y a deux ans. Un véritable OMNI montrant une tête pensante geek sur les bords qui semble s'être pris une telle claque avec Pryapisme qu'il s'est dit que ce serait sympa de surfer sur cette vague de metal/rock chiptunée. Mais pas de le faire avec mimétisme – peut-on réellement les copier et les égaler de toute manière ? – préférant plutôt apporter fraîcheur et personnalité. Cette dernière, sur le papier, amène lieu à une toute nouvelle étiquette spécialement pour l'occasion : le nintendocore.

 

Késako ? Pourquoi Nintendo ? Pour le 8 Bits, même si on ne voit pas l'ombre d'un plombier moustachu, d'un Pikachu ou encore d'un fantôme rose boulimique. Après, les vrais savent que Sega est plus fort que toi et que sa Gamegear bouffe plus de 30 piles à la minute, pas forcément très économique pour une jeune formation fauchée. Pour cette raison, n'allez pas penser que vous alliez retrouver la reprise du fameux thème de Super Mario Bros tel qu'avait pu le faire Mr. Bungle, vous ne le trouverez pas. Pourquoi Core ? Pour la frénésie électrique à tendance déstructurée, mathcore donc. Bon, on n'ira pas par quatre chemins, la réalité est bien plus putassière vu que même cette étiquette se veut réductrice. Bien qu'à l'écoute de l'essai éponyme, cela semble bien coller tant Alpha Brutal reste plutôt soft et sobre quand bien même sa recette soit originale. Deux tendances semblant pourtant paradoxales mais qui montrent tout ce que représente cet EP : le fait de poser les bases d'une recette hyper intéressante et emprunte d'une personnalité indiscutable tout en se montrant encore trop timide dans sa concrétisation, voire même juvénile tant il regorge de multiples maladresses techniques et artistiques. Imparfait mais assez audacieux pour qu'on se penche sur le cas du quatuor parisien, voilà pour résumer ce premier EP dont je ne détaillerais pas plus le constat vu que j'y reviendrai très probablement dans une chronique qui lui sera spécialement dédiée.

 

La cible bien lockée, on se prend à guetter sa MAJ qui arrive tout fraîchement avec Upgrade. Et juste l'illustration peut donner une idée de ce qui nous attend. Exit le timide chat hyper convenu somnolant dans un paysage aux couleurs douces pastel, bienvenue au design pète-rétine rose fluo sur fond noir. Deux ans après dont un an entièrement consacré à la conception – ce qui, pour six titres en plus d'une revisite d'une vieille composition déjà existante, représente beaucoup – et un changement de figure féminine vocale – oui, les geeks ne sont pas exemptés du concept de discrimination positive – Alpha Brutal nous revient dans nos oreilles. Et pas avec une simple attaque Trempette d'un Magicarpe dans sa besace. Après tout, pourquoi jeter un stupide petit caillou dans l'eau alors qu'on peut balancer une dévastatrice attaque Hydrocanon ?

 

Le combo parisien nous assène là une bonne Fatality qui va bien tant il revient avec une évolution équivoque. Il n'en oublie pas ses bases, il les reprend même aussi strictement que tout bon ordinateur se respecte mais revoit considérablement ses racines à un tout autre niveau. C'est comme s'il prenait toutes les facettes qu'il voulait explorer jadis, les réunissait dans un même programme vomissant des pistes blindées de lignes de code aussi audacieuses qu'uniformes. Le nintendocore prend tout son sens ici, lui ajoutant plus de densité 8 Bits cheapy et de brutalité tout en l'adoucissant avec des lignes pop simples et très largement éculées dans le style mais pourvue d'une très grande accroche mélodique. D'une recette pouvant paraître saugrenue et bancale sur le papier, on arrive à trouver un point d'équilibre surprenant. En cela, « Upswing » représente tout ce que cet Alpha Brutal présente dans sa version 1.5 : une pop technoïdement chiptunée voguant entre kitsch dansant et déstructurations électriques aussi bidouillée aux Bits que djenteuses. Et incroyable mais vrai, une fois la surprise passée, la sauce de cette recette complètement nawakienne et doublement audacieuse – à comprendre, dans sa théorie ET sa pratique – ne fonctionne que trop bien ! Au diable tout notre amour du pogo poilu et viril, armons-nous de tout notre second degré, assumons notre côté gamer tendant vers le geek et bougeons nos popotins sous ces effluves acidulées foutrement catchy en accroches mélodiques tout en s'arrachant la nuque en headbangs quand la saturation électrique mathoïde pointe le bout de son nez.

 

Non content d'affirmer et solidifier sa personnalité, Dread, le programmeur, n'a pas oublié de rajouter ses petites lignes bonus permettant l'incursion de divers autres petits détails et influences supplémentaires. Chose que son logiciel nous met docilement en application de façon procédurale tout le long de cet Upgrade. C'est ainsi qu'on peut rajouter au mathcore basique une dimension prog alternative à la Riverside, Jolly ou encore Porcupine Tree quasi-omniprésente et du jazz fusion très Magma (le pont de « Protection » ou celui de « Waltz ») ou l'utilisation d'atmosphères vertigineuses (la conclusion de « Outage ») tel que le développait Mr. Bungle dans « Quote Unquote » . Le changement de chanteuse a également fait beaucoup de bien à Alpha Brutal tant cette nouvelle voix se veut bien moins timide et plate que sa prédécesseure, ajoutant par conséquent plus d'efficacité et de mordant. Quand bien même son timbre reste très pop et passe-partout, Aude nous assène toutefois un petit hors d’œuvre pseudo-lyrique surprenant en plein milieu de « Protection » qui, à défaut de sonner comme une Floor Jansen ou une Simone Simmons, donne un côté barré rappelant les frasques perchées et schizoïdes d'une Nina Hagen ou encore Kate Bush. Certes, ce n'est pas grand-chose mais voilà qui laisse présager un futur vocal pas si conventionnel qu'on ne pourrait le penser chez Alpha Brutal.

 

Le chant mis de côté, les compositions complètement instrumentales sont également de mise occupent même une place assez importantes. Moins bigarré et complexe qu'un Pryapisme, c'est toutefois dans ce registre que le quatuor parisien se lâche le plus, comme s'il était lâché dans un sandbox à la Minecraft où tout reste à imaginer et à créer. Et c'est dans ces « Waltz », ré-interprétation chiptunée de la célèbre valse de Chopin, « Interlude » ou encore « Growl REMIX », un titre originellement composé en pur chiptune avant même que le projet ne se nomme Alpha Brutal et devienne un véritable groupe, que l'on discerne plus distinctement tout le potentiel qui est présent ici. Car même si de bugs il demeure malheureusement – quelques transitions et chœurs maladroits ou en terme de mise en son en terme d'effets et d'équilibrage sonore entre les divers éléments – il ne s'agit là que d'un problèmes de petits détails isolés. Pas gênant en soi pour apprécier Upgrade filant malheureusement aussi vite que le hérisson bleu de Sega. Mais avec une telle mise à jour, nul doute qu'on attend avec impatience le véritable level-up, celui apportant un véritable disque long format estampillé Alpha Brutal 2.0.

photo de Margoth
le 19/04/2017

3 COMMENTAIRES

cglaume

cglaume le 19/04/2017 à 07:19:58

Pryapisme, Mr Bungle, "nawakien" : n'en jetez pluuuuuus !!!! Je vais essayer :)

cglaume

cglaume le 19/04/2017 à 12:15:22

"... vu que j'y reviendrai très probablement dans une chronique qui lui sera spécialement dédiée"

Je crois bien qu'Eric lui a déjà consacré un papier. Même qu'il sera probablement en ligne dès demain :)

Eric D-Toorop

Eric D-Toorop le 19/04/2017 à 12:55:09

Attention Teasing : "... Des musiciens exigeants qui font tout pour nous assouplir l'ouïe..."

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